La compagnie maritime a licencié 800 marins britanniques pour les remplacer par de la main d'œuvre étrangère. Les liaisons entre Calais et Douvres sont suspendues.
L’annonce a eu l’effet d’une déflagration outre-Manche. Jeudi 17 mars, la compagnie maritime P&O Ferries a annoncé le licenciement immédiat de 800 marins britanniques via une simple vidéo. Soit plus du quart des salariés de l’entreprise.
Conséquence directe, les liaisons quotidiennes – de particuliers ou de marchandises – entre la ville portuaire britannique et Calais ont été suspendues. De longues files d’attente se sont créées à l’entrée du port. "Normalement, nous avons presque toutes les demi-heures un départ", a indiqué Jean-Marc Puissesseau, président des ports de Calais et Boulogne. "Le trafic de P&O qui était d’environ 1 500 camions ce jeudi a été progressivement chargé par les deux autres compagnies : Irish Ferry et DFDS".
Les traversées opérées par les navires de la compagnie ne pourraient pas reprendre avant plusieurs jours.
Une décision pour la "survie" de l’entreprise, jugée "scandaleuse" par les syndicats
Cette décision a été justifiée par la direction, qui assure que la "survie" de l’entreprise "dépend de changements rapides et significatifs". Selon la compagnie, propriété d’un opérateur basé à Dubaï, P&O n’est plus rentable : 120 millions d’euros de perte en un an, à cause de la pandémie mais aussi, selon les observateurs, d’erreurs de gestion et de la baisse du trafic après le Brexit. P&O va faire appel à une main d’œuvre moins chère pour exploiter ses navires.
De leur côté, les salariés ont jugé cette décision "scandaleuse". Mick Lynch, secrétaire général du syndicat des transports RMT, a annoncé vouloir attaquer cette décision en justice le plus rapidement possible, dénonçant "l’un des actes les plus honteux de l’histoire industrielle britannique".
Des manifestations sont par ailleurs prévues ce jour dans plusieurs ports du pays, dont celui de Douvres.
Les salariés français pas concernés
À Calais, l’inquiétude des 250 salariés français de P&O a été forte, tout au long de la journée. Peuvent-ils être concernés par cette restructuration brutale ? "Pour l’instant, aucun licenciement n’est prévu à Calais", assure Thorir Thorisson ; délégué syndical CFDT.
On est géré par des financiers qui sont assis devant un tableau excel et voient juste les coûts.
Thorir Thorisson, délégué syndical CFDT
Il dénonce la méthode employée, et dit craindre pour ses collègues britanniques licenciés. "On est géré par des financiers qui sont assis devant un tableau excel et voient juste les coûts. Et tout ce qu’ils peuvent faire pour diminuer les coûts, ça leur convient, malgré les risques de dégradation de notre entreprise, des conditions de travail et des conditions de voyage pour le tourisme et le FRET", résume-t-il.