Ces Picardes ont décidé de tenter l'aventure. Elles participeront à l'édition 2019 du Rallye Aïcha des Gazelles du Maroc, une course d'orientation de 2 000 kilomètres à l'ancienne dans le désert marocain, qui débutera le 16 mars prochain.
Des représentantes de la Picardie seront sur la ligne de départ de la 29ème édition du Rallye Aïcha des Gazelles du Maroc, le 16 mars prochain.
Cette course d'orientation de 2 000 kilomètres à travers le Maroc réunit 300 équipages exclusivement féminins. En binôme, ces femmes devront rejoindre chaque étape à l'ancienne, à l'aide de cartes, de boussoles, et sans GPS, le tout hors-piste, en alignant le moins de kilomètre possible. Elles devront passer entre 10 et 13 heures dans le désert pendant 9 jours.
Une aventure hors du commun dans laquelle ont choisi de se lancer Audrey Lépine (team Amarok, n°161), originaire de Braine, dans l'Aisne, Marion Moutiers Emery (Les Gazelles en Amarok, n° 174), basée à Mont L'évêque, dans l'Oise, ou encore Jessica Vanaker (les Green'Zelles, n°149), d'Ansauvillers, dans l'Oise.
Dissiper les préjugés
Audrey s'est lancée dans ce rallye à la recherche des sensations fortes. Et pour se prouver, à elle et à sa famille, qu'elle pouvait relever ce défi.À 34 ans, cette conseillère clientèle à Volkswagen Finacial Services prendra la route aux côtés de Kattel, originaire de Marseille, à bord d'un 4x4 Amarok, mis à disposition par son entreprise.C'est une belle aventure, celle d'une vie. Je voulais découvrir de nouvelles choses, prendre du temps pour moi, et prouver à mon mari et mes enfants que je pouvais le faire, les rendre fiers. La fondatrice du rallye, Dominique Serra, a dit à sa création il y a 29 ans qu'elle voulait dissiper les préjugés. Je me retrouve là-dedans.
Elles ont toutes les deux eu la chance d'avoir été sélectionnées via un concours interne, après des tests physiques et psychologiques. Pas de difficultés de financement, donc, mais une épreuve tout aussi intense une fois sur place.
Quand on regarde les valeurs du rallye, il faut du talent, de la détermination, de la coopération, du courage. La durée fait assez peur, on quitte les siens, et sur place, on est coupé du monde. Mais je pense qu’on sort de cette expérience grandie.
Le binôme a été formé pendant deux jours à la navigation et quatre jours au pilotage. Pendant le rallye, elles vont alterner les rôles.
Avec cette aventure naît aussi une nouvelle amitié avec sa coéquipière, qui vit à distance. "On s’est découverte, on s’appelle beaucoup, chaque semaine. Je suis même descendu un week-end avec mon mari."C'est vrai qu'au départ je voulais conduire, mais en découvrant la navigation, je me suis rendu compte que c'était très intéressant. Il faut être observatrice, tracer les points, calculer où est-ce qu'on est, c'est beaucoup de responsabilités.
Dépasser ses limites
Pour Marion Moutier Emery, 37 ans, commerciale chez Volkswagen également, participer au Rallye des Gazelles représente un "choc émotionnel intense". Tellement fort qu'elle s'apprête à vivre son second rallye, aux côtés de Céline, sa binôme basée en Haute-Savoie.Forte de son expérience passée, elle sait que la course demande beaucoup d'énergie et de concentration.C'est un dépassement de soi qui donne une telle adrénaline, qui nous fait sortir de notre zone de confort. Dans le désert, je me suis trouvée. On est dans un univers où d'un seul coup, on n'est plus la "maman de" ou la "femme de", mais on se challenge en tant que femme, on découvre comment on réagit dans l'adversité.
Il faut se préparer à tout. Un excès de confiance, un moment d'inattention, on peut dérailler, foncer dans une dune, avoir de la casse, simplement se tromper de cap. Le secret, c'est de savoir perpétuellement où l'on est exactement. C'est donc éreintant, il ne faut pas oublier que c'est un défi sportif. C'est dur de se lever à 5 heures du matin, de faire des repérages terrain de plusieurs kilomètres à pied, de bouffer du sable à longueur de journée.
Constamment encadrée, la course n'est selon elle "jamais réellement dangereuse". Au-delà de la difficulté de l'épreuve, elle retient surtout "les paysages, les rencontres, et la façon dont on a surmonté les galères".
Un parcours du combattant
Jessica attend le moment du départ avec impatience. Cela fait maintenant 6 ans que cette picarde de 34 ans rêve de tenter le rallye. Assistante de direction chez un revendeur de matériel agricole, elle s'est décidé en novembre 2017 de proposer à l'un de ses fournisseurs, CLAAS, de la sponsoriser. C'est ainsi qu'elle rencontre sa future copilote, Micheline, originaire du Mans.Mais le sponsor ne les finance pas entièrement. Car pour participer, entre les frais d'inscription de 15 000€, l'achat du véhicule, les assurance, les stages de conduite et de navigation, le matériel et le transfert jusqu'au Maroc, la note est salée.
On estime à 30 000 euros les frais. Pour les récolter, c'est le rallye avant le rallye, confie Jessica.
Pendant plus d'un an, elles ont cherché des sponsors. De la salle de sport de Jessica au garage du coin. En tout, 26 sponsors figurent sur leur 4x4, un Toyota Land Cruiser Hdj 80, trouvé sur Leboncoin. "Il a déjà fait le rallye deux fois, il tient la route !", lâche Jessica.
Le binôme a également mis en place une cagnotte pour financer les frais annexes. Elles ont pu récolter 830 euros auprès de leurs proches.
Pour Jessica, sa participation au rallye est la preuve que l'impossible est atteignable. C'est du moins ce qu'elle souhaitait transmettre à ses enfants en bas-âge. "Je veux leur montrer qu'il faut vivre ses rêves et pas rêver sa vie. On n'est pas cantonné à l'endroit où l'on vit."
Les valeurs humaines qu'elle partage avec le rallye ont aussi été déterminant dans sa participation. "J'y vais pour voir de quoi je suis capable, mais aussi pour trouver une certaine entraide féminine que l'on ne trouve plus tellement dans la vie de tous les jours, où c'est un peu chacun pour soi".
Le départ de la course, le 16 mars, se déroulera à Nice, devant le Théâtre de Verdure, à 10 heures. Plus de 40 000 personnes devraient y assister. Les gazelles franchiront la ligne finale le 30 mars à Essaouira, au Maroc.