Jean-François Zobrist, ex-patron de la Favi, aujourd’hui en retraite donne des conférences dans le monde entier sur sa méthode. La Favi est considérée comme pionnière en matière de bien-être au travail.
L'entreprise Favi est un équipementier automobile picard installée à Hallencourt dans le Vimeu depuis 1957. Elle emploie 380 salariés.
Au début des années 80, un nouveau directeur général arrive, il s'agit de Jean-François Zobrist, il prend une grande décision, le management par la confiance sera sa principale source d'économies. Il applique les principes de l’entreprise libérée. Autrement dit, plus personne ne sera payé pour exercer principalement une activité de contrôle (de la qualité, des quantités, des process).
Le management par la confiance
La Favi devient alors une référence en matière d’organisation du travail.
Selon Jean-François Zobrist il n’y a pas de performance sans bonheur. Finie l’organisation pyramidale : les ouvriers s’organisent eux-mêmes en mini-usines de 25 à 30 personnes et co-optent un leader. Chaque mini-usine travaille directement pour un client (PSA, Renault, etc…)
Suppression de la pointeuse. Aux ouvriers de savoir s’ils doivent mettre un coup de collier et revenir le week-end, par exemple, pour terminer une commande. Valorisation : tous les mois, un concours récompense la meilleure idée d’un ouvrier ou d’une ouvrière destinée à améliorer la productivité ou le confort de travail sur les machines. Des primes identiques pour tous, de l’ouvrier au grand patron.
Jean-François Zobrist ne s’en cache pas : « Un patron est une machine à faire du fric. Et l’humanisme est le meilleur moyen d’en faire ».
Il est parti à la retraite en 2008, mais donne aujourd’hui des conférences dans le monde entier sur sa méthode.Mi-mai, il est par exemple parti à Montréal. Cette stratégie a permis à la Favi de gagner 3% de productivité par an pendant plus de 20 ans. Elle a aussi réussi à traverser la crise de 2008.
Le bien-être au travail et le bonheur sont reliés
Le bien-être au travail, c'est savoir pourquoi, je travaille, être libre du comment, qu'on m'exprime un peu de reconnaissance (...) Les ouvriers veulent juste qu'on leur dise qu'on est content d'eux (...) De tout temps, le travail et le bonheur étaient liés (...) Un cadre maladroit peu rendre 100 ouvriers malheureux, un contremaitre maladroit peut rendre des dizaines d'ouvriers malheureux. (...) On passe plus de temps à travailler qu'à dormir ou avec son conjoint. (...) Par le bien-être, on gagne plus d'argent qu'en contrôlant l'entreprise (...) En bon picard, on a fait en allant pas à pas.
L'entreprise libérée, ce n'est pas le club Med, c'est de l'auto exploitation, c'est le prix à payer pour rester dans son village, c'est l'instinct de conservation l'argent n'est pas le but, c'est le moyen
On a des savoirs colossaux, des années d'expérience dans nos entreprises qui sont gâchées par ce qu'on impose le contrôle. Dans mes conférences, j'ai peu de questions parce que je dis des évidences ce que je vous dis, ce sont des évidences.
Mais qu’en est-il aujourd’hui ?
L’entreprise n’ouvre plus ses portes aux journalistes, et l’unique syndicat, la CFTC, ne parle pas sans l’accord de la direction. Pendant 30 ans, il n’y a pas eu de syndicat à la Favi : selon Jean-François Zobrist, c’est parce que tout allait tellement bien qu’ils étaient inutiles. Mais en mai 2016, la CFTC réussit à faire élire 8 délégués.
L'entreprise est actuellement en pleine mutation : après avoir travaillé le laiton pendant des années, elle se lance dans les pièces en aluminium. Une adaptation nécessaire pour survivre, dans un secteur très concurrentiel. Mais aussi très délicate. Dans ce contexte, la méthode Zobrist est-elle toujous d'actualité ?