"Décevant mais pas surprenant". Le silence opposé à ses juges bruxellois lundi par Salah Abdeslam a été accueilli de façon mitigée, avec un certain fatalisme, par les représentants des victimes des attentats de Paris et Bruxelles présents au procès.
"Je n'ai personnellement jamais pensé qu'il serait prêt à collaborer avec la justice belge, pas plus qu'il n'a collaboré avec la justice française", a déclaré devant la presse Philippe Duperron, dont le fils Thomas a été tué dans la salle parisienne du Bataclan le 13 novembre 2015. Les attentats ce soir-là dans la capitale française avaient fait 130 morts au total.
Lundi, dès l'ouverture de son procès pour sa participation présumée à une fusillade avec des policiers en mars 2016 à Forest (une commune de Bruxelles), Salah Abdeslam a refusé de répondre et défié la justice avec des références à l'islam. Contre tout attente, le seul membre encore en vie des commandos jihadistes du 13 novembre avait pourtant souhaité comparaître à ce procès dans la capitale belge.
L'audience était très attendue car Abdeslam est resté mutique devant les enquêteurs depuis son incarcération en France en avril 2016. Lundi, il n'a finalement fait que confirmer "son comportement incohérent", selon Philippe Duperron. "Il n'a pas répondu autrement que par une déclaration provocante et provocatrice, en appelant à son dieu Allah", a déploré ce père de victime. "La déception est là mais on a aussi des motifs d'espérance", a nuancé auprès de l'AFP Me Guillaume Lys, qui défend V-Europe, une association de victimes du terrorisme créée au lendemain des attentats de Bruxelles (32 morts le 22 mars 2016).
"Ce n'est pas parce qu'il refuse de parler que son avocat ne va pas nous apprendre des choses", a-t-il ajouté. La présence de V-Europe au procès de la fusillade de Forest a fait débat lundi matin.
Me Sven Mary, avocat d'Abdeslam, a estimé que l'association n'avait pas d'intérêt à agir, les personnes ciblées par des tirs ce jour-là lors d'une perquisition étant des policiers. V-Europe, qui dit représenter près de 200 victimes d'attentats, réclame un euro symbolique de dommages et intérêts. Une audience spéciale a été programmée le 29 mars pour que le tribunal puisse débattre de la recevabilité de sa constitution de partie civile. "On est juste là pour essayer de trouver des réponses", a fait valoir Me Lys.