Samedi 9 novembre, la ville d'Albert a honoré les quatre villes qui ont financé sa reconstruction après la première guerre mondiale. Entre la Chine, l’Angleterre et l’Algérie, découvrez ces marraines de guerre qui ont contribué à soigner la gueule cassée de la Somme.
Albert, une ville anéantie
Enjeu de violents combats, la ville d’Albert est victime de nombreux tirs d’artilleries pendant la première guerre mondiale. Détruite à 90%, le siège de la Communauté de Communes du Pays du Coquelicot n’est plus qu’un champ de ruines lors du départ des troupes allemandes en août 1918.
Parmi les bâtiments détruits, le dôme de la basilique d’Albert marque les esprits. Victime d’un projectile allemand en 1915, la statue de la Vierge placée au sommet de l’édifice bascule et penche dangereusement au-dessus de la place d’Armes. La Vierge restera ainsi à l'horizontale jusqu’à la rénovation de la basilique.
La "Vierge penchée" de la basilique d'Albert.
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© Archives INA
Quatre villes marraines
À la fin des hostilités, le monde entier reste sidéré par la violence du conflit. Emues, plusieurs villes des quatre coins du globe décident spontanément d’aider Albert à se reconstruire.
- En Angleterre, la ville de Birmingham offre un soutien financier pour bâtir l’un des pavillons du nouvel hôpital moderne. L’édifice sera inauguré en 1932. "Gérald Forty, un vétéran anglais ayant vécu à Albert pour affaire, a encouragé sa ville à participer" commente Valentin Piermé, guide-conférencier au musée Somme 1916.
- La ville chinoise de Tien-Tsin (aujourd’hui rebaptisée Tianjin) finance une maternité. Désormais, le bâtiment accueille la Maison du Domicile, qui accompagne les personnes âgées. "Expatrié en Chine, l'ingénieur Félix Pernaut a encouragé les travailleurs français de la ville de Tien-Tsin à se cotiser au profit d'Albert, ajoute l'historien. Au total, 20 000 donneurs ont participé à hauteur de 227 000 francs".
- En Algérie, c’est la ville d’Aïn-Temouchent oeuvre pour Albert en permettant l’aménagement du jardin public et l’installation d’une fontaine.
- En France, la ville de Bordeaux participe également à l’effort de reconstruction en finançant une crèche pour les enfants issues de familles modestes. Le bâtiment a depuis disparu.
Pourquoi ces deux dernières villes ? L'histoire ne le dit pas : "C'était une aide spontanée, explique Claude Cliquet. Cela se faisait à l'époque, c'était un signal positif pour aider la ville à renaître de ses cendres".
Un devoir de mémoire
Un siècle plus tard, la cité d’Ancre tenait à rendre hommage aux villes marraines ayant contribué à sa renaissance. Chaque ville marraine a droit à sa propre rue. La semaine dernière, la commune d’Aïn-Temouchent a été la dernière à avoir une plaque à son nom. "Le chemin Aïn-Temouchent relie symboliquement les rues du 11 novembre et du 8 mai" souligne Claude Cliquet.
Samedi 9 novembre, une œuvre mémorielle a été inaugurée en leur honneur dans le jardin public, en présence des représentants des quatre cités. Cette œuvre a été construite par des collégiens et des lycéens de la ville avec des briques rouges. "C’était pour faire un clin d’œil à ce matériau utilisé pendant la reconstruction de la ville" précise Stéphane Demilly, député de la Somme et ancien maire d’Albert.
Si les vestiges de cette générosité spontanée s’affichent fièrement sur les murs de la ville, la mairie a souhaité exprimer une dernière fois sa gratitude avec une citation empruntée à l’écrivain Andersen. Gravée dans l’esprit des Albertins, cette citation s'affichera désormais éternellement sur l’œuvre des écoliers : "La reconnaissance est la mémoire du cœur".