Le 20 août 2023, Ayden, trois ans et demi, a été attaqué par un chien qui lui a retiré un bout de joue. Quatre opérations plus tard, le petit garçon va mieux mais devra subir de nombreuses interventions chirurgicales durant sa croissance. Son père et un ami de la famille ont lancé une association pour aider les victimes et leurs familles dans la même situation.
La soirée a tourné au drame. Ayden, trois ans et demi, et ses parents, faisaient un barbecue chez une collègue de sa mère. "La soirée se passait super bien", explique Julien Toupart, le père. À un moment, l'enfant est fatigué et lui réclame un câlin. "Je lui ai dit : fais le tour de la table et viens", chose qu'il fait. Sauf qu'il marche sur la patte du chien de la collègue, qui était déjà blessé. L'animal lui saute alors directement dessus et le mord au visage, lui arrachant un bout de joue.
"Le temps que je fasse le tour, notre ami Arnaud avait déjà agi en frappant le chien une première fois pour l'écarter". Mais le chien revient à la charge deux fois de suite. Arnaud ramasse le bout de joue et le conditionne tandis que Julien attrape son fils, lui met une serviette sur le visage et monte dans la voiture pour l'emmener aux urgences de Montdidier, dans la Somme.
Arrivés sur place avec la mère, les médecins ne peuvent rien faire et font appel à l'équipe de l'hélicoptère d'Amiens Sud. "Ils sont arrivés en dix minutes, poursuit Julien. Arnaud était revenu à Montdidier pour nous ramener le greffon, le morceau qui avait été arraché".
Déjà quatre opérations, et beaucoup d'autres à prévoir
En arrivant au CHU d'Amiens, les parents apprennent que leur enfant doit passer immédiatement au bloc opératoire. La chirurgienne "a reconstruit le visage avec le greffon, le morceau de joue qui a été arraché". La première opération a duré six heures, une éternité pour eux. Une fois l'intervention chirurgicale terminée, il a fallu attendre trois jours pour voir si le greffon tenait. Malheureusement, des parties se nécrosaient.
Trois opérations ont eu lieu avec l'aide d'un deuxième chirurgien pour sauver la joue de l'enfant. Mais le combat est loin d'être terminé. "Plus il va grandir, plus les opérations vont s'enchaîner, par rapport à l'évolution de sa peau, de sa taille", souligne Vanessa Toupart, la mère, émue aux larmes. D'autant plus que depuis ce qui s'est passé, elle constate que "ce n'est plus le même petit garçon."
"Au moment de l'accident, j'ai cru le voir mourir devant mes yeux, c'est traumatisant pour une maman, pour un papa, ça peut toucher n'importe quels parents."
Vanessa Toupart, mère d'Ayden
Son grand frère, Enzo, a aussi été fortement touché par ce qui est arrivé à Ayden. "J'avais aussi peur de le perdre, comme ma mère et mon père". Une semaine après l'opération, il a pu le voir à l'hôpital. "Je voulais bien mais en même temps, je ne voulais pas parce que c'était dur pour moi. C'était un grand soulagement qu'il soit, encore là", confie-t-il.
"C'est un traumatisme"
Le comportement d'Ayden a changé à la suite de l'attaque du chien. "Il est devenu en quelque sorte une pile électrique. Il a tout le temps la bougeotte et ne tient pas en place", constate sa mère. Avant cela, "c'était un enfant très calme, j'arrivais très bien à le gérer et depuis l'accident, je n'y arrive plus". Le petit garçon a du mal à tenir en place, a développé des problèmes d'élocution, "et quand il a du mal à parler, il s'énerve".
Son père ajoute que sa bouche est désormais plus petite. Pour manger, "des fois, quand il veut en mettre trop dans la bouche, ça atterrit à côté et pour lui, c'est quelque chose de frustrant".
"Il nous ressort : 'J’ai ma bouche plus petite, du coup, je ne peux plus manger correctement. Pourquoi le chien m’a fait ça ? Moi, j’adore les animaux'. Du coup, tout se rejoue dès qu’il y a une erreur. Même la douche devient compliquée, dès que ça touche son visage, c’est compliqué."
Julien, père d'Ayden
Aujourd'hui, c'est un véritable traumatisme pour le petit garçon. Les promenades extérieures sont rendues difficiles. Dès qu'il croise un chien, il saute dans les bras de son père et se met à crier. Il se retrouve aussi à crier la nuit, "ça peut être à une heure, deux heures, trois heures du matin". Les parents ne sont pas en reste. La mère a du mal à s'endormir "avant trois heures du matin", tandis que le père revit la scène quand il ferme les yeux.
Suivi par une pédopsychiatre
Ayden est suivi par une pédopsychiatre depuis l'accident. "C'est un moment où il s'échappe. Il y a de la discussion, du jeu, c'est un moment où il parle de son histoire. Et je pense qu'il va être suivi pendant très longtemps parce qu'il en a besoin", assure Julien. La spécialiste note que le petit garçon répète souvent la scène "sous forme de jeux avec les bonshommes, avec un chien" où il dit "le chien est méchant, il va en prison".
Le garçon n'est pas le seul à souffrir psychologiquement. Son frère était à ses côtés et a vu toute la scène. "Il est aussi traumatisé, il ne parle pas beaucoup de tout ça donc on s'est beaucoup inquiétés. Du coup, il est aussi suivi par une autre personne", déclare la mère.
Malgré les séquelles, le petit garçon a hâte de retourner à l'école pour retrouver ses copains. Il n'a pas encore effectué sa rentrée scolaire du 31 août à cause de l'accident. "Il est sorti de l'hôpital le 11 septembre et avait des soins à faire deux fois par jour à la maison". Bien que le chirurgien ait donné son feu vert au mois d'octobre, les parents avaient peur pour lui. "Avant de le remettre à l'école, j'avais besoin de me soulager, d'aller voir la directrice, de mettre en place des choses", raconte Julien. Une réunion avec les maîtresses a permis de les rassurer.
Une association créée
Julien et Vanessa Toupart peuvent compter sur le soutien indéfectible de leurs proches. "Ma sœur est venue tout de suite à l'hôpital, mon frère nous a rejoints le lendemain et mes parents qui étaient en vacances dans le Sud sont remontés en catastrophe", se rappelle Julien. Autre personne importante à leurs yeux : Arnaud Roussel, ami de la famille, qui était présent lors de l'attaque et qui a réussi à neutraliser le chien. "On se parle 24h/24", indique Julien.
C'est avec lui qu'il a cofondé l'association à but non lucratif "Le combat d'Ayden et les vôtres". "Julien a eu la première démarche de m'en parler et je lui ai dit : écoute, j'allais te le proposer", explique Arnaud. Celle-ci a été validée le 27 octobre et est parue au Journal officiel le 31 octobre. Grâce à cela, ils vont pouvoir "entamer certaines démarches pour avoir des adhérents et pouvoir créer six manifestations dans l'année".
Le but de cette association est d'aider les victimes ou familles de victimes "dans les démarches administratives qui sont quand même lourdes : les frais d'avocat, la CPAM, s'il y a besoin d'un hébergement d'urgence" par exemple. Ils veulent aussi pouvoir apporter un soutien moral pour que personne ne se sente seul dans un tel drame.
"Le plus dur, c’est de lancer la machine judiciaire aussi. Une fois que la machine judiciaire est lancée, croyez-moi que c’est long, très long. Et puis après, il faut attendre, et ce n’est pas toujours évident."
Arnaud Roussel, co-fondateur de l'association Le combat d'Ayden et les vôtres
En somme, le combat "a désormais démarré ce 20 août" et pour eux, cette date restera à jamais marquée dans leurs esprits. "À la date d'anniversaire, je pense que ce sera compliqué pour tout le monde, mais ce n'est pas grave : ensemble, on est plus fort, on va plus loin". D'où la création de l'association : "il ne faut pas penser qu'à soi et il faut aider les gens, dans la mesure où on peut le faire, on est dans ce principe-là", conclut Arnaud.
Avec Léna Thobie-Gorce / FTV