Témoignages. "Pour les gens qui souffrent du regard des autres, de la grossophobie, c’est un soulagement" : Les Petits Poids, une association qui soigne les corps et les esprits

Publié le Écrit par Elise Ramirez
partager cet article :

L'association Les Petits Poids, dans les Hauts-de-France, est un relais des centres de rééducation pour les personnes en surpoids ou souffrante de handicap et de pathologies chroniques. Elle propose des activités physiques adaptées et des ateliers pour améliorer l’estime de soi et sortir de l’isolement. Un accompagnement global dans une région où près d'un quart de la population souffre d'obésité.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Nous retrouvons Jean-Marie sur un sentier à Camon. Pour ce retraité, la marche est déjà une victoire en soi. Miraculé d’un accident de moto à l’âge de 18 ans, il a développé une spondylarthrite ankylosante, une inflammation chronique des articulations. Jusqu’en novembre dernier, en surpoids, il ne se déplaçait pas sans sa canne. Depuis, il a rejoint l’association Les Petits Poids. "Le centre de rééducation de Corbie m’a envoyé vers l’association parce que j’avais pris du poids, mes articulations souffraient. Il fallait absolument que je bouge", explique Jean-Marie.

Objectif perte de poids et mobilité

Dans cette structure, quatre heures par semaine, il suit des ateliers sportifs. Ce matin-là, il est en séance cardio, sur le vélo, surveillé de près par l’encadrante. Autour de lui, plusieurs participants s’entraînent sur les équipements mis à disposition dans la salle : tapis de course, machines de renforcement musculaire…

La coach sportive contrôle attentivement leur rythme cardiaque et leur taux d’oxygène dans le sang, grâce à un oxymètre. "Je contrôle la saturation pour qu’elle ne baisse pas en dessous de 90. Dans ce cas, on arrête l’activité pour éviter les risques cardiaques. On surveille aussi que toutes les personnes ne dépassent pas 80 % de leur fréquence cardiaque théorique. On est là sur un travail d’endurance et par de performance. On s’adapte en fonction de l’âge et des pathologies de chacun", détaille Iris Leleu, enseignante en activité sportive adaptée.

J’ai moins de douleurs articulaires et au niveau musculaire, ça s’est beaucoup amélioré.

Jean-Marie Monvoisin, adhérent de l'association Les Petits Poids

Dans la même salle, un peu plus tard, Jean-Marie enchaîne avec un atelier de renforcement du dos. Des exercices encore difficiles pour lui qui vient de se faire opérer. "J’ai moins de douleurs articulaires et au niveau musculaire, ça s’est beaucoup amélioré. Ce matin, j’ai vu mon chirurgien qui me disait que mes muscles étaient parfaits pour mon soutien. Dix jours après l’opération, je marche sans béquille, sans rien. Donc aucune rééducation n’est prévue, simplement des exercices ici. Pour moi, c’est merveilleux", se réjouit le retraité.

Deux fois par an, un bilan de condition physique complet est prévu pour chaque adhérent. Et rien n’est laissé au hasard. Le questionnaire préalable revient sur toutes les activités du quotidien dans les moindres détails, les habitudes physiques, alimentaires, les conditions de vie. Puis, une série d’exercices permet aux encadrants d’évaluer les progrès réalisés et d’identifier les points de blocage. "On les rend acteurs de leur santé et on les informe sur leur situation, leurs progrès et les résultats qu’ils soient mauvais ou non. Ça leur permet de prendre en compte leurs évolutions", explique Jérôme Hudym, enseignant en activité physique adaptée et santé.

Pour Jean-Marie, le résultat est encourageant. "Même si j’ai encore des déficiences au niveau de l’équilibre et de la marche, je vois que je me suis amélioré dans d’autres domaines et cela me réconforte. J’ai un objectif pour ma motivation. Ça m’encourage", ajoute Jean-Marie.

Je me suis lancé un défi : participer à la marche de la Jules Verne. Quand j’ai terminé, j’étais très fière.

Maryse Dupont, adhérente à l'association Les Petits Poids

Maryse, elle, a intégré l’association en mars 2022. Son histoire avec Les Petits Poids a commencé au parc Saint-Pierre, à Amiens. Elle participait à des marches encadrées organisées le samedi matin. Elle pesait alors 30 kg de plus et éprouvait des difficultés à se déplacer. En plus de deux ans, elle mesure le chemin parcouru. "C’était des marches lentes, à notre rythme, en petit groupe. Petit à petit, ça m’a donné la force de me lancer. Je me suis alors fixé un défi : participer à la marche de la Jules Verne. C’est une randonnée pédestre de 50 km dans Amiens. Quand j’ai terminé, j’étais très fière. Depuis, je la fais tous les ans et je garde mes médailles dans mon salon."

Un lieu de rencontres pour sortir de l'isolement

Les adhérents se retrouvent régulièrement aux Petits Poids même s’ils ne participent pas aux ateliers du jour, juste pour discuter autour d’un café. La structure soigne les corps, mais aussi et surtout les esprits. "L’association, c’est mon médicament. Quand je ne vais pas bien, je viens, je bois un café et je parle. Pour les personnes seules, comme moi, c’est une bouffée d’oxygène. Ici, il n’y a pas de préjugés. J’ai retrouvé le sourire depuis que je viens ici. Ma vie a changé. Merci les Petits Poids !", nous confie Clarisse, une adhérente.

Apporter du sourire, c’est toute la philosophie de l’association qui se donne pour objectif d’améliorer la qualité de vie, le bien-être physique et moral de ses adhérents et de les sortir de leur isolement. À l’origine, le centre a été créé par des personnes en surpoids, obèses ou marquées par des pathologies handicapantes, chroniques, qui, après une hospitalisation de rééducation physique et nutritionnelle de Corbie, ne trouvaient pas d’infrastructures pour la poursuite des activités.

Mais cette association s’est retrouvée inactive après quelques années. Lydie Boury, aide-soignante et elle-même ex-patiente du service de rééducation de Corbie l’a relancée en 2013. "Quand on sort d’une rééducation, il n’y a aucune alternative proposée pour la prise en charge. Ici, on est formé à l’éducation thérapeutique pour avoir la bonne posture qui permet d’accompagner les personnes avec bienveillance, sans jugement. On ne se veut pas 'médicalisé' mais on peut aussi orienter les personnes vers un psychologue, un médecin, un diététicien", précise la présidente de l’association Les Petits Poids.

Ce centre, c’est aussi une ouverture vers de nouveaux horizons, avec des ateliers pour recréer du lien social. Au-delà du sport, les adhérents peuvent s’essayer à la couture, à l’art-thérapie, au théâtre. "Cette approche permet de se canaliser. Quand on a des troubles alimentaires, qu’on se retrouve seul chez soi, cela peut être compliqué. Mais si on a trouvé une passion, on peut s’y adonner plutôt que de manger, ça limite les crises", ajoute Lydie.

J’ose mettre des jupes, j’ose m’affirmer au travail, j’ai appris à dire "Non".

Maryse Dupont, adhérente Les Petits Poids

Depuis son adhésion à l’association, Jean-Marie a redécouvert l’autonomie. "Je peux désormais monter les escaliers sans m’arrêter à chaque pas, je peux me baisser, me relever. Dans les gestes du quotidien, c’est un changement radical pour moi. Je vis seul et je dois me débrouiller. Avant, j’avais des difficultés pour attraper une casserole en bas d’un placard". Maryse, de son côté, a opéré une reconstruction physique et mentale. "J’ose porter des jupes, j’ose m’affirmer au travail, j’ai appris à dire 'non' et j’ai recréé du lien avec ma famille. Avec le recul, j’ai un regard de bienveillance vis-à-vis de moi. Cela m’a apporté de la douceur dans mon quotidien. Les rencontres m’ont ouvert l’esprit. J’ai découvert un monde où on peut trouver sa place. Pour les gens qui souffrent du regard des autres, de la grossophobie, c’est un soulagement."

L'association compte 250 adhérents et plusieurs antennes dans les Hauts-de-France. Pour accompagner son développement, les membres cherchent de nouveaux locaux.

Qu’avez-vous pensé de ce témoignage ?
Cela pourrait vous intéresser :
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information