Deux hommes de 27 ans de nationalité irakienne ont été mis en examen le 14 juin pour homicide volontaire et tentative de vol avec violences ayant entraîné la mort, un mois après qu'un chauffeur routier de 39 ans a succombé à ses blessures sur une aire de l'autoroute A28 au Translay dans la Somme.
Il n'aura finalement fallu aux enquêteurs qu'un mois après le meurtre de Mihai Spătaru, un chauffeur routier de 39 ans, sur l'aire du Translay sur l'A28 pour arrêter deux suspects.
Ces resortissants irakiens d'origine kurde âgés de 27 ans ont été mis en examen lundi 14 juin après-midi pour homicide volontaire passible de 30 ans d'emprisonnement et tentative de vol avec violences ayant entraîné la mort, des faits passibles de la réclusion criminelle à perpétuité. Ils ont été immédiatement incarcérés.
Les deux hommes sont défavorablement connus de la Justice : l'un est un employé d'une boulangerie avec a un casier judiciaire vierge, mais il a des antécédents et une condamnation (pas pour faits de violence) qui a fait l'objet d'un appel ; l'autre en revanche a déjà été condamné trois fois pour des faits de violences aggravées, notamment des violences avec arme, par le tribunal correctionnel du Havre et a été récemment incarcéré.
Ils ont été interpellés le week-end dernier, le premier samedi 12 juin à Grande-Synthe dans le Nord et le second dimanche 13 juin à Rouen en Seine-Maritime, suite au travail de la cellule d'enquête dédiée réunissant des gendarmes de la section de recherche d'Amiens, de la brigade de recherche d'Abbeville et de l'escadron départemental de la sécurité routière.
Traces ADN et vidéosuveillance
Les deux hommes ont contesté les faits lors de leurs gardes à vue à Abbeville avec des versions contradictoires, ce qui renforce les soupçons des enquêteurs : "L'un d'entre-eux dit qu'il était présent avec le deuxième sur la scène. Il le dit notamment parce qu'on a retrouvé un masque avec son ADN sous le véhicule. Le deuxième individu nie totalement avoir été présent", précise Alexandre de Bosschère, procureur de la République d'Amiens.
Les enquêteurs ont toutefois des éléments prouvant que le deuxième homme a été blessé lors de cette soirée et a fini au centre hospitalier de Rouen. Une luxation de l'épaule qui témoigne d'une lutte et donne là encore lieu à des explications contradictoires de la part des mis en cause, ainsi qu'avec les éléments de vidéosurveillance reccueillis par les gendarmes.
Selon le colonel Thierry Chétrit, commandant la section de recherches d'Amiens, les enquêteurs ont pu établir le parcours des deux hommes le soir du drame à bord de leur véhicule, un Citroën Evasion "passé de main en main entre des personnes qui ne déclaraient pas les cessions". Ils sont partis "de la région rouennaise vers Abbeville en prenant le temps de s'arrêter sur l'ensemble des aires de repos".
Ils sont ensuite retourné "dans le sens inverse pour s'arrêter plus particulièrement sur l'aire du Translay sur l'autoroute A28, pour regagner ensuite la région rouennaise et faire par ailleurs un détour par le centre hospitalier de Rouen".
Le mis en cause qui reconnaît sa présence sur les lieux du crime explique cet étrange périple par une recherche de cigarettes dans les aires de station.
Deux coups de couteau mortels
Dans la nuit du 15 au 16 mai, M. et Mme Spătaru, tous les deux chauffeurs routiers, dormaient dans leur camion sur l'aire du Translay sur l'A28 dans le sens. Vers 1h du matin, la victime est descendue, après avoir entendu du bruit au niveau de la remorque.
Quelques minutes plus tard, Mme Spătaru a vu son époux revenir en sang et deux hommes s'enfuir. Mihai Spătaru est mort peu de temps à après. L'autopsie a révélé deux blessures au couteau, une au côté et l'autre au thorax.
Forte émotion en Roumanie
Selon le procureur, "une des hypothèses très sérieuse envisagée est qu'il s'agit d'une tentative de vol qui a été interrompue par la victime et que c'est dans ces conditions que les coups de couteau mortels auraient été portés".
La mort de Mihai Spătaru avait suscité un émoi important dans son pays, la Roumanie. Selon le média Stirile Pro-TV, l'eurodéputé Vlad Gheorghe a demandé aux autorités françaises de clarifier plusieurs questions liées à la mort du Roumain, mais aussi à la Commission européenne de clarifier publiquement les questions liées au stationnement des camions dans l'Union.
Une vive émotion partagée aussi par la communauté des chauffeurs routiers, comme en témoigne ce message sur Facebook d'un certain Ilie Matei, "L'homme des routes", déjà liké par près de 8000 personnes.
Ilie Matei y fustige violemment l'inaction de conducteurs de camions présents, selon lui, le soir du meurtre : "Aucun collègue n'a répondu à l'appel désespéré de la femme, même en plus, ils ont fermé les rideaux et continué leur repos. Mes garçons... Vous êtes des lâches, demain vous pouvez être les prochains à mourir comme des chiens, sans que personne n'intervienne pour vous ! Cela devrait vous donner à réfléchir ! Un seul collègue avec une camionnette de 3,5 est intervenu en aidant avec ce qu'il pouvait sur notre collègue."