Lourdement pénalisée par l’épidémie de coronavirus, la société Serdym, installée dans la Somme, s’est lancée dans une aventure inédite pour sauver des emplois. Spécialisée dans le retri de verre, elle propose désormais aussi des créations à base de palette de bois.
Un parfum étrange embaume l’atmosphère. Si la petite entreprise Serdym nichée à Embreville dans la Somme est spécialisée dans le retri verrier des flacons de cosmétiques et de parfumeries, rien ne prépare les narines à être titillées ainsi par cette odeur boisée. Pourtant, depuis plusieurs mois, un atelier de menuiserie est venu s’installer dans les locaux. Une réponse des patrons et de leurs employés à la covid-19 qui a profondément malmené leur activité.
Comme toutes les PME de France, la crise nous a touché de plein fouet. On a commencé à vraiment souffrir en juin quand nous avons fini d’exploiter nos stocks et a enchaîner les période de chômage partiel. Au final 2020, c’est une perte de près de 40% du chiffre d’affaires.
Afin de préserver les emplois, l’esprit et le moral des 35 employés de l’entreprise, les méninges ont fourmillé dès juin. Les tentatives de prises de contact avec d’autres entreprises dans le secteur verrier se heurtent à un secteur essoufflé par les mesures sanitaires. "Avec le confinement et les fermetures de commerces non essentiels on ne pouvait plus compter sur les parfumeries, les duty free (produits de luxe détaxés dans les aéroports). Mais on ne voulait pas se laisser abattre, alors on s’est dit pourquoi pas essayer de faire quelque chose d’artisanal", expose Florence, co-gérante de Serdym.
Sauver des emplois et garder l'esprit occupé
Les discussions sont lancées. Les groupes qui alternent une semaine sur deux font remonter leurs idées. "Nous avons deux garçons au niveau du tri de verre c’est d’ailleurs assez rare et l’un d’eux est un ancien artisan. Même si l’on n'a pas à la base de savoir-faire en menuiserie on s’est dit que le bois et les palettes étaient une bonne solution et je pense qu’on ne se débrouille pas trop mal", lâche Florence dans un rire.
La recherche sur les premiers prototypes comme les salons de jardin, les arbres à chat a rapidement été lancée. Aujourd’hui, on est six à travailler dessus. Les garçons désossent les palettes et les montent, Christine s’occupe du ponçage et des finitions, Virginie gère la com’ du site Facebook, Sophie met au propre les fiches techniques et je cherche des idées et calcule les tarifs des créations.
Si l’initiative ne connaît pas un démarrage fulgurant, le pôle création bois "permet d’avoir l’esprit occupé" et de "garder espoir", confie-t-elle. Surtout, il permet d’ajouter une deuxième corde à l’arc de l’entreprise qui ne peut que s’avérer précieuse. "Le tri de verre n’est pas complètement à l’arrêt. Il y a même un certain élan sur le carnet de commande du moins pour le mois de mars. Nous avons de la visibilité sur le mois prochain, mais avant nous en avions sur trois mois. On ne sait jamais s’il y a un nouveau confinement, rien n’est fixé."
"Ils nous ont tout piqué"
Malgré l’incertitude, le sourire reste flanqué sur le visage de la co-gérante. Il faut dire qu’outre la crise sanitaire, la PME samarienne a redoublé de malchance et de difficultés à dépasser. "À peine le matériel de menuiserie acheté qu’on a été cambriolé une première fois en août. Ils ont piqué le matos, le pc à l’entrée, le camion. Quand tu es déjà en galère financière, tu n’as pas besoin de ça ! Alors on rachète tout et rebelote le 17 novembre. Les filles m’appellent à 5H45 pour me dire - ils nous ont tout piqué - Ils ont fouillé, cette fois, pièce par pièce volant jusqu’aux cafetières et réserves de café", se remémore-t-elle.
On garde la positive attitude malgré tout, même si on a eu l’impression d’un très mauvais rêve qui ne termine jamais. On use de notre esprit créatif. Il ne faut pas se laisser abattre et puis on a conscience qu’on ne s’en sort pas si mal, il y en a de la misère.
Et pour alimenter cette positive attitude, les idées ne manquent pas. La PME compte développer un site internet et un showroom est prévu le 13 mars dans ses locaux pour présenter les créations. "Il n’y a pas eu un départ fulgurant, mais d’une certaine manière on se dit qu’on a traversé le plus dur, l’hiver. L’esprit printanier arrive, des gens commencent à passer et nous demandent des brasero pour cet été. On croise les doigts, mais on pense qu’il y a tout ce qu’il faut pour que ça marche."