Habitants, entreprises ou services publics, plus personne n'est à l'abri d'une panne de réseau liée aux vols de câbles en cuivre. Le groupe Orange en compte deux fois plus en 2023 que l'année dernière. Un fléau en progression constante dans les Hauts-de-France.
Ce n'est plus la chasse à l'or, mais la chasse au cuivre. Négocié à prix d'or, le métal rouge est de plus en plus prisé par les malfaiteurs. Câblages électriques, ornements de tombes ou industries de la construction, le cuivre est pillé sous toutes ses formes et aucun secteur n'est épargné.
Les Hauts-de-France particulièrement ciblés
Un des derniers larcins en date remonte au mercredi 15 novembre. Des bobines de cuivre pesant chacune 4,5 tonnes ont été dérobées chez un transporteur axonais, à Gauchy. Montant du préjudice : deux millions d'euros, rapporte L'Aisne Nouvelle.
Fin octobre, toujours dans l'Aisne à Anizy-le-Grand, 600 m de câbles de l'opérateur Orange ont été dérobés. Les administrés de la commune ainsi que ceux de Faucoucourt et Brancourt ont immédiatement perdu leur connexion au réseau.
Un mois plus tôt, cette fois dans l'ouest de la Somme, pour la deuxième fois en une semaine, 1 500 mètres de câble ont disparu. Les habitants de sept communes ont été privés d'internet, de téléphone fixe et de télé. 700 foyers ont été impactés. Les délais pour remplacer les câbles sont longs. Sur place, il a fallu s'adapter. "Les clients ont payé en tickets restaurant ou sont revenus aux bons vieux chèques" expliquait une restauratrice.
Pas un mois sans larcin. Pour les équipes du groupe Orange (ex France Telecom), "la situation est de plus en plus intenable, confie Gautier Bezeau, chargé de communication. On compte en moyenne deux vols par jour dans la région, soit deux fois plus qu'en 2023. Au 31 octobre, Orange en est à 420 vols sur les Hauts-de-France, dont 120 en Picardie, soit une centaine de plus que l'an dernier à la même date. Le phénomène n'est pas nouveau, mais ce qui est inédit, c'est son ampleur". Le préjudice subi monte à 15 millions d'euros pour l'opérateur en 2022.
Des délais de rétablissement rallongés
Difficile en l'état de rétablir la situation rapidement : "Les durées s'allongent et ça peut aller jusqu'à quatre semaines dans les cas les plus longs avant de retrouver une connexion internet". Croulant sous les incidents, l'opérateur priorise les pôles les plus sensibles.
Les études pour rétablir le réseau prennent du temps et l'étendue du réseau cuivre n'arrange rien à la situation. Dans les années 70, des milliers de kilomètres de lignes ont été déployés dans tout l'Hexagone pour moderniser le réseau et permettre un accès plus rapide à la téléphonie puis à Internet. "Aujourd'hui dans les Hauts-de-France, le réseau ADSL, c'est un million de câbles en cuivre, souligne Gautier Bezeau, ou un aller/retour de la terre à la lune sur le territoire français. Vous avez des câbles en cuivre en stock partout".
La récidive
Impossible donc de surveiller toute la chaîne, d'autant plus que les malfaiteurs agissent très rapidement. Ils opèrent surtout la nuit et en 20 à 30 minutes, le larcin est fait. Pour tenter d'endiguer le phénomène, Orange organise des visites de terrain pour comprendre comment opèrent les voleurs.
"L'autre difficulté, c'est la récidive. Le Bassin minier comme la métropole lilloise sont très touchés par la récidive. Lorsqu'une portion de câbles est dérobée, quelques jours plus tard, une autre portion disparaît sur le même câble. Est-ce qu'on étudie des câbles existants ou est-ce qu'on en pose des plus petits ? Une réflexion est à l'étude. On travaille étroitement avec les préfectures".
Comment éviter ces vols ?
Le cuivre est utilisé dans 60 % des équipements électriques car il est facile à travailler et présente une conductivité élevée.
Son prix a plus que doublé en cinq ans. La tonne de cuivre se revend environ 10 000 € et encore mieux au marché noir.
Le vol se situe souvent sur le domaine public. Selon un enquêteur, la meilleure parade à ce fléau, est la vigilance des populations.
Par ailleurs, Orange encourage ses clients à passer à la fibre optique. "Elle ne fait pas l'objet de vol car elle est peu revendable contrairement au cuivre" assure Gautier Bezeau. Fin 2019, l'opérateur a annoncé sa volonté de fermer techniquement son réseau cuivre progressivement entre 2023 et 2030.