Le président des Hauts-de-France a fait voter une délibération lui permettant de toucher une indemnité de 4 000 euros brut en tant que président de l’agglomération de Saint-Quentin.
Cumuler moins sans gagner moins. Le président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand (LR) est au coeur d'une polémique après la révélation par Le Courrier Picard du vote d'une indemnité de 4000 euros pour son poste de président de l'agglomération de Saint-Quentin. Une polémique qui l'agace beaucoup : "Moi je me suis augmenté de 4000 euros ? Et puis quoi encore ? J' ai un peu de mal à accepter qu’on dise que j’ai augmenté en douce mon salaire alors que mon revenu aujourd’hui est de 5000 euros inférieur", a-t-il expliqué à Europe 1.
Ce vendredi matin, au micro de France 3 Picardie, Xavier Bertrand s'est également défendu : "Si j'avais voulu faire de l'argent, je n'aurais pas fait de politique".
S'est-il vraiment "augmenté" de 4000 euros ?
Oui et Non. Xavier Bertrand n'a pas pris la décision seul. Il a bien soumis au vote une augmentation de ses indemnités pour son poste de président de la communauté d'agglomération de Saint-Quentin. Et cette "augmentation" qui a été votée le 26 janvier dernier. 4000 euros brut. 2 400 euros après impôt. Mais en réalité, ce n'est pas tout à fait une augmentation. Xavier Bertrand perçoit en fait ce qu'il ne percevait pas de 2008 (date d'accès à la présidence de l'agglo) jusqu'à fin 2015.Cela coûte-t-il plus cher aux contribuables ?
Non. Avant ce vote, Xavier Bertrand ne touchait rien en tant que président de la communauté d'agglomération de Saint-Quentin... parce qu'il ne pouvait rien toucher. La loi plafonne le montant des indemnités des élus qui cumulent les mandats. Ce plafond est établi à 1,5 fois le montant des indemnités de base, soit 8 231 euros brut par mois pour les députés.Tant qu'il était député-maire, cette somme était partagée entre les 14 vice-présidents de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin. Désormais, leur indemnité est amputée de 200 euros pour permettre à Xavier Bertrand de toucher les 4000 euros. Cela ne coûte pas plus cher aux contribuables. Les vice-présidents, eux, l'ont accepté (puisque voté) mais pas forcément tous digéré puisque Le Courrier Picard affirme que c'est l'un d'eux qui a fait filtrer l'info (qui date de fin janvier).
Comment justifie-t-il ce vote ?
Depuis qu'il est devenu président de région, Xavier Bertrand a démissionné de son poste de député et de maire de Saint-Quentin. Deux mandats qui lui assuraient un revenu mensuel d'environ 7200 euros net par mois. En n'étant plus que président du conseil régional, il ne gagnerait que 4300 € par mois. Mais l'élu Les Républicains n'a pas complètement abandonné toute idée de cumul. Il est resté conseiller municipal de sa ville (ce qui ne lui rapporte pas d'argent) et a du coup pu conserver son poste à la communauté d'agglomération.Ce dernier poste lui permet donc de gagner 4000 euros bruts, 2300 euros net. Si on y ajoute son salaire de président de région, cela fait environ 6725 € net. Résultat : il gagne environ 500 euros de moins par mois qu'avant comme le montre cette infographie réalisée par ses amis (et publiée sur son compte Twitter) pour tenter d'éteindre un peu la polémique. Attention, les chiffres ci-dessous sont nets.
Ethique, communication et droit : tout le monde y retrouve-t-il ses petits ?
Sur le plan éthique, cette augmentation, parfaitement légale, pose évidemment question. D'autant que Xavier Bertrand a beaucoup communiqué sur le « Plus rien ne sera jamais comme avant ». Si vous aviez cru comprendre lorsqu'il a annoncé qu'il ne serait plus député-maire que le nouveau président de région n'allait se consacrer qu'à un seul mandat et en assumer les conséquences financières, vous aviez mal compris. L'arrangement pour ne pas trop perdre d'argent tout en cumulant a évidemment des relents de ficelle politicarde. Garder vraiment un seul mandat, s'y consacrer vraiment et ne toucher qu'une seule indemnité, ce n'est pas encore pour maintenant. D'autant qu'un de ses proches, Gérald Darmanin, a fait un peu le même calcul en récupérant une indemnité de 3 783 euros en tant que maire de Tourcoing.«Non-cumul ne doit pas dire paupérisation des élus», justifie un proche d'un candidat à la primaire de la droite dans Libération. "C’est pratique la politique : on peut adapter son revenu à sa situation", écrit ironiquement le même journal. "Parce que je fais de la politique, je ne peux pas être sincère ? Parce que je fais de la politique, je suis forcément quelqu’un qui va chercher à améliorer sa situation ? Mon Dieu, si je voulais faire du pognon, je ferais autre chose que de la politique", ajoute Xavier Bertrand. "Je demande une chose, c’est qu’on arrête de me faire passer pour un pourri. C’est pas parce que je fais de la politique que je suis un puching-ball." Le débat est ouvert.