Un immeuble pas comme les autres, en terre crue, se dresse dans le nouveau quartier de la Confluence à Lyon. Une construction au bilan carbone excellent. Nous avons rencontré Nicolas Meunier, le maçon spécialiste du pisé qui dirige le chantier.
Des bureaux en pisé
A Lyon dans le quartier moderne de la Confluence en plein quartier de Perrache, la deuxième tranche de cet important projet d'urbanisme est bien avancée.Depuis le début du réaménagement côté Saône, les formes contemporaines des immeubles s'épanouissent au gré de l'imagination des architectes et des tendances actuelles. Sur l’îlot B2, à l'emplacement de l'ancien marché-gare, un bâtiment sort de l'ordinaire. 1000 m² de bureaux sur 3 niveaux, en pisé, clin d’œil au patrimoine lyonnais. L’Orangery -nom donné en écho à celle du Parc de la Tête d'Or- est conçue par les cabinets d’architectes Clément Vergély et Diener & Diener (cabinet Suisse). Pour cette technique ancienne de construction en terre crue, trouver un bâtisseur compétent n'a pas été facile.
Un spécialiste rare
A l'orée du projet le promoteur Ogic cherche avec ses partenaires des spécialistes tous azimuts. Perle rare, Nicolas Meunier est contacté le premier. L'idée lui plaît, il planche de longs mois sur le moyen de réaliser cet ouvrage. Cet écologiste de toujours a fait du pisé le matériau au service de son art de la construction.Afin de comparer plusieurs propositions, les maîtres d'oeuvre dénichent l' Autrichien Martin Rauch qui propose une alternative : couvrir de pisé une structure en béton. Trop loin du projet initial : c'est finalement l'idée de Nicolas Meunier, du pisé porteur et ossature bois, qui l'emporte. Il veut utiliser des blocs de terre crue pour la construction, ils seront préfabriqués sur place.
Une vie de maçon
Maçon conventionnel à ses débuts, Nicolas Meunier a commencé avec la terre en 1981, après un passage par le Mali. Là-bas en observant les chantiers en construction traditionnelle, l’intérêt de la technique avec l’usage de la terre locale et l’application des savoir-faire vernaculaires lui paraît évident. De retour chez lui, il entreprend de transposer ce qu’il perçoit déjà comme porteur de sens, même en France. Nicolas Meunier nous explique la technique.
Nicolas Meunier se présente et nous explique la technique du pisé
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Un savoir-faire régional
En région Rhône-Alpes et dans le Gers la technique du pisé était utilisée il y a longtemps. Les savoir-faire ont disparu avec les hommes pendant la guerre, et l’arrivée du “progrès” aux énergies lourdes a fait le reste, les constructions en terre sont devenues rares. Pourtant il en reste à Lyon.Des immeubles en pisé, on en trouve encore dans Lyon
Nicolas Meunier évoque le patrimoine lyonnais construit en pisé
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Un bilan carbone incomparable
Le matériau est neutre pour la santé, sans conséquence pour l'environnement. Pas besoin d'emballage pour la terre, apportée en vrac et recyclable : la terre peut retourner à la terre ! Ici l'impact environnemental est examiné à la loupe durant tout le chantier.
L'excellent bilan carbone de l'Orangery et la neutralité du pisé pour la santé
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La terre pour cet immeuble vient de Saint-Quentin-Fallavier, à 30 km de là. Apportée à son état naturel, elle est d’abord débarrassée de ses gros cailloux afin de pouvoir être compactée. Au total, 286 blocs sont fabriqués directement sur le chantier avec une machine conçue spécifiquement.
77 blocs dont les arches sont réalisés plusieurs mois à l'avance, en 2018, pour obtenir un bon degré de séchage. Les 209 autres blocs sont produits au fur et à mesure de la construction.
Quelques images des blocs en fabrication sur le site de Lyon Confluence
Un chantier à taille humaine
Au pied des grues, les autres ouvriers, des bâtiments traditionnels, regardent avec une curiosité presque envieuse le chantier hors du commun. L’équipe de Nicolas Meunier est constituée de 5 personnes très soudées qui vivent cette aventure ensemble depuis le début. Chacun d’eux est le maillon d’une chaîne de confiance ...
Le chantier touche à sa fin, diaporama :
Le pisé, une solution pour l'habitat du futur
La société industrielle montre tous les jours ses limites. La prise de conscience de la fin des énergies fossiles et les impératifs de lutte contre les pollutions pourraient aboutir au renouveau des techniques artisanales du 19e siècle.si on ne le fait pas (le choix du pisé) par plaisir et par confort, on risque de le faire par obligation
L'avenir de la construction est dans l'artisanat et le savoir-faire, parce que les énergies à fort bilan carbone, il faut arrêter !
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Pour aller plus loin :
Du côté des architectes, l'îlot B2 expliqué par Clément Vergély.
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