Michel Barnier a utilisé les termes "rigueur et humanité" pour définir la future politique immigration qu'il souhaite mettre en place avec le gouvernement. Les termes et les anciennes positions très fermes sur la question migratoire du Premier ministre inquiètent les médecins du camp de Ouitreham, où vivent une trentaine de migrants.
"J'ai des craintes, clairement" affirme sans détour Jean-François Cartery. Le médecin du Collectif d'aide aux migrants de Ouistreham (CAMO) dans le Calvados ne cache pas ses inquiétudes concernant la politique immigration que vont mener le Premier Ministre Michel Barnier et le ministre de l'Intérieur fraîchement nommé, Bruno Retailleau.
"Quand on connaît le passé politique de Monsieur Barnier et ce qu'il a proposé pour l'immigration et encore plus Monsieur Retailleau sur les mêmes problématiques, évidemment, nous sommes très très inquiets" lance Jean-François Cartery.
Lorsqu'il briguait l'Elysée en 2021, Michel Barnier défendait notamment un "moratoire" sur l'immigration de trois à cinq ans, il voulait "cesser les régularisations inconditionnelles des sans-papiers" et réduire la délivrance des visas longs séjours.
Le récent nouveau Premier ministre a défini sa ligne politique pour l'immigration en deux mots : "rigueur et humanité". Pas rassurant pour le médecin du collectif d'aide aux migrants de Ouistreham.
Monsieur Barnier et Monsieur Retailleau ont, à plusieurs reprises, remis en cause la possibilité de la continuation de l'AME, l'aide médicale d'Etat, qui permet à des demandeurs d'asile au bout de trois mois d'avoir accès à des soins médicaux quels qu'ils soient.
Jean-François Carterymédecin au centre d'aide aux migrants de Ouistreham
"Un déni d'humanité"
Quel impact aurait eu la suppression de l'AME au camp de Ouistreham si elle avait été mise en place l'an dernier ?
"Cet hiver, nous avons eu plusieurs cas de tuberculose sur le camp de Ouistreham. Si l'aide médicale d'Etat n'avait pas existé, cela aurait posé des problèmes d'un point de vue épidémique. En tant que médecin, je ne me vois pas dire à quelqu'un : "non, non, je ne peux pas vous soigner". C'est impossible" affirme Jean-François Cartery, qui estime qu'une suppression de l'AME par le nouveau gouvernement s'apparenterait à "un déni d'humanité".
En cette fin septembre 2024, une trentaine de migrants vivent sur le camp de Ouistreham.
"Le nombre est extrêmement variable, souligne le médecin du CAMO. Des informations indiquent qu'un certain nombre de migrants soudanais pourrait arriver de nouveau. C'est une illusion de dire qu'on va empêcher des migrants irréguliers de franchir les frontières. C'est impossible. Donc qu'est-ce qu'on fait. Une politique de rigueur, répressive, toujours et encore ? Pour nous, non".