La 29e édition du Prix Bayeux des correspondants de guerre démarre lundi 3 octobre avec une série d'expositions et de projections avant la remise des trophées le samedi suivant. Cette année, l'Ukraine est bien évidemment au premier plan.
Après l'annexion de quatre régions ukrainiennes par la Russie en fin de semaine dernière à l'issue de référendums contestés par une bonne partie de la communauté internationale, le président du Conseil européen Charles Michel a annoncé ce dimanche que les dirigeants de l'Union européenne et leurs homologues du continent se retrouveront ce jeudi et ce vendredi à Prague pour discuter des réponses aux conséquences de la guerre lancée par Vladimir Poutine il y a bientôt sept mois. Depuis le 24 février, ce conflit fait la une de l'actualité et la 29e édition du Prix Bayeux qui débute ce lundi 3 octobre va bien évidemment mettre en lumière le travail des journalistes qui le suivent sur le terrain.
C'est en couvrant une autre guerre menée par la Russie que le président de cette 29e édition, le photo-reporter Thomas Dworzak, s'est fait un nom dans le métier. "Une journaliste anglaise m'a embauché comme traducteur russe. En la ramenant en Tchétchénie, j'ai pu faire des photos exclusives de l'exode tchétchène. J'ai fait les meilleurs photos de ma vie en tant que traducteur", explique cet autodidacte. Son travail sera publié dans Newsweek, Paris Match, le New York Times et lui vaudra de remporter le second Prix Bayeux en 2000.
La Tchétchénie pour comprendre l'Ukraine ?
Le grand reporter allemand âgé de 50 ans, qui a dirigé l'agence Magnum, s'est dit "impatient et curieux de pouvoir débattre du traitement de l'invasion russe en Ukraine avec ses confrères". Hors compétition, Thomas Dworzak participera mercredi avec d'autres journalistes à une soirée débat qui propose "d'éclairer le présent" en Ukraine en revenant sur les deux guerres russes en Tchétchénie (1994-1996 et 1999-2000). "Et si Vladimir Poutine, en lançant l'opération contre l'Ukraine en février 2022, avait voulu rééditer la guerre de Grozny ? Les discours et les méthodes sont proches", s'interrogent les organisateurs.
L'Ukraine fera également l'objet de deux expositions dont une présentera à partir de lundi "l'indispensable travail des deux seuls journalistes à être restés à Marioupol pendant le pilonnage de l'armée russe", soulignent les organisateurs.
Le retour des Talibans au pouvoir
Autre sujet majeur de cette 29e édition du Prix Bayeux, le retour des Talibans en Afghanistan. La journaliste britannico-iranienne Ramita Navai viendra présenter son documentaire "Afghanistan: no country for women" sur des femmes détenues par les talibans sans procès ni chef d'accusation.
L'exposition d'images en grands formats organisée chaque année dans les rues de Bayeux sera consacrée au travail de la photographe iranienne basée à Kaboul depuis huit ans Kiana Hayeri. "J'ai recueilli" par exemple "les histoires de femmes pour qui le fait d'assassiner leur mari était la seule solution afin de sortir d'une relation abusive et mettre fin à des violences conjugales. Elles ont aujourd'hui trouvé la paix en prison", témoigne la journaliste.
51 reportages sélectionnés
Le jury international présidé par le photoreporter allemand Thomas Dworzak examinera ce vendredi et ce samedi une sélection de 51 reportages. La palmarès sera dévoilé ce 8 octobre (une dizaine de prix). Cette année, les organisateurs du festival ont enregistré un peu plus de 350 candidatures. En attendant le palmarès, parmi les nombreux autres rendez-vous, le Prix Bayeux proposera également pour cette édition "un retour aux fondamentaux du journalisme" avec une exposition signée Hervé Brusini sur "le travail photographique jamais dévoilé" d'Albert Londres (1884-1932).
Autre temps fort, une nouvelle stèle à la mémoire des journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions sera comme chaque année inaugurée jeudi. La cérémonie se déroulera en présence des familles et collègues de Maks Levin, le photoreporter ukrainien "exécuté" selon Reporters sans frontières par des soldats russes en mars, de Shireen Abu Akleh, la journaliste palestino-américaine de Al Jazeera tuée d'une balle dans la tête en mai et de Frédéric Leclerc-Imhoff, le reporter français tué en mai en Ukraine.