Vendredi 20 décembre, trois ex-dirigeants d'Orange/France Télécom ont été condamnés à un an de prison dont 8 mois avec sursis, pour harcèlement moral institutionnel. Béatrice Pannier, calvadosienne et ancienne salariée, a témoigné lors du procès. Elle fait part de son soulagement après le verdict.
Salariée de France Télécom depuis 1982, Béatrice Pannier ne cache pas son soulagement après le verdict qui condamne l'ex PDG de l'opérateur téléphonique Didier Lombard, et deux de ses collaborateurs. "C'est une libération totale, une belle victoire. Entendre dire le mot "coupable" résonne en moi comme une reconnaissace de la justice. Les anciens dirigeants d'Orange ont été condamnés pour harcèlement moral institutionnel, ce qui constitue une première dans le droit pénal du travail. La Calvadosienne est par ailleurs outrée du fait que l'ancien dirigeant interjette appel. "On a tous été interloqué de cette décision qui montre un déni total de tout ce qui s'est passé sous sa direction. C'est halluciant et limite scandaleux".
Lors du procès qui s'est déroulé pendant deux mois et demi au printemps dernier avec 167 parties civiles, Béatrice Pannier a pu vider son sac devant ceux qui ont mis en place sa descente aux enfers. "J'ai pu vraiment exprimer ce que j'ai vécu, avec Didier Lombard juste à côté, à un mètre de moi, qui pouvait entendre ce que je disais. Plusieurs fois, j'ai jeté un oeil vers lui. D'avoir pu lui dire "j'ai vécu ça à cause de vous, prenez-en acte !" était pour moi nécessaire pour entamer un processus de guérison".
Un livre et un Grenelle des conditions de travail
Car même si elle s'est libérée "d'une chappe de plomb", Béatrice Pannier n'est pas encore rétablie, huit ans et demi après son burn out et sa tentative de suicide sur son lieu de travail, à Caen. Le verdict du procès ne sonne pas la fin de son combat, loin de là. Elle vient de publier Burn out, plus jamais ça, un livre retraçant ses combats judiciaire et de reconstruction personnelle et appelant à une prise de conscience globale sur le mal-être au travail. Elle y liste un cinquantaine de mesures à prendre d'urgence et invite à la création d'un Grenelle des conditions de travail.
"Ma fille a 16 ans, elle va entrer dans le monde du travail dans les cinq ans qui viennent. Pour moi, il est impensable que nos générations d'enfants et de petits-enfants rentrent dans un monde du travail mortifère comme celui d'aujourd'hui. Je me dis qu'il faut que ce verdict fasse date pour qu'il y ait une prise de conscience en haut lieu". Désormais ex-salariée d'Orange, qu'elle a quitté en 2018, Béatrice Pannier a écrit une lettre au Président de la république pour qu'il se saisisse du sujet. "Il faut de la prévention en haut lieu qui soit suivie d'effets. M. Macron doit prendre les choses en main, il lui reste deux ans et demi de mandat, il va falloir qu'il se remonte les manches".
Fin janvier, Béatrice Pannier ira au Sénat pour témoigner encore, et débattre autour de la souffrance au travail. Sa bataille judiciaire terminée, son combat politique ne fait que commencer.