Mort suspecte d'une résidente d'Ehpad : 10 000 euros d'amende requis contre l'établissement

Le procès de l'affaire de la mort suspecte d'une résidente de l'Ehpad de la Source à Mondeville près de Caen (Calvados) se tenait ce jeudi 17 octobre 2024 au tribunal judiciaire. L'établissement est accusé d'homicide involontaire par négligence. Une amende de 10 000 euros a été requise pour reconnaissance de la responsabilité.

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"Nous sommes aujourd’hui ici pour savoir si la responsabilité de l’EHPAD est engagée dans la mort de la résidente de 77 ans, en mai 2015", indique la présidente du tribunal judiciaire de Caen ce jeudi 17 octobre 2024.

Atteinte d'Alzheimer, la résidente retrouvée blessée dehors en pleine nuit

La femme âgée, atteinte d’Alzheimer et intégrée trois jours plus tôt dans l'Ehpad, était décédée environ deux heures après avoir été retrouvée à l’extérieur de l’établissement spécialisé en pleine nuit dans des circonstances troublantes.

Le procès qui se tenait ce jeudi matin devait éclaircir les événements qui ont amené la septuagénaire à se retrouver en dehors de l’Ehpad, les raisons de sa mort et si l’établissement "par maladresse, négligence et manquement à la sécurité" pouvait être tenu responsable du drame.

Les enfants de la victime étaient présents du côté des parties civiles. Tandis que le directeur de la Mutualité Française, en poste depuis 2020 et donc absent lors de l’accident mortel, représentait l’Ehpad dans cette affaire.

Zone d'ombre sur les événements ayant amené la mort 

Deux scénarii s'opposaient lors du procès pour déterminer dans quelles circonstances la résidente avait pu se retrouver en dehors de l’Ehpad. Le premier suppose que la victime aurait mémorisé les codes de sécurité des portes pour sortir d’elle-même de l’établissement en pleine nuit, avant d’enjamber un portillon et de tomber de sa hauteur sur la terrasse.

L’autre cas de figure serait que la dame âgée est tombée la fenêtre de la salle de pause des deux infirmières qui travaillaient ce soir-là à l’Ehpad, située au premier étage de l’établissement juste au-dessus de la terrasse.

Dans cette affaire, l’avocate des parties civiles a décrédibilisé le premier scénario sur plusieurs aspects. D'abord en indiquant que la dame âgée "n’aurait pas pu retenir les codes de sécurité et les rentrer sur les trois portes à passer pour se retrouver dehors, du fait de sa maladie dégénérative".

Ensuite, elle a signalé les comportements suspects de l'infirmière et de l'aide soignante qui travaillaient ce soir-là. "Elles sont venues à 2h54 du matin observer la terrasse avec la lampe d'un téléphone, pour constater la présence de la victime, qui était toujours conscience à ce moment et appelait à l'aide. Mais les deux femmes sont remontées dans les étages et ne sont ressorties qu'à 3h34 pour aider la résidente et appeler les secours. Pourquoi ?"

Enfin, l'avocate de la victime a évoqué les causes de la mort. Aucune autopsie n'a été réalisée mais les médecins ont indiqué que la victime souffrait d’une fracture du poignet, d'hypothermie et affichait une tension faible lorsque les secours l'ont prise en charge. Avant de faire une crise cardiaque.

Les conclusions du médecin révèlent un choc hypovolémique et une hémorragie interne, qui démontrent qu’elle est tombée d’une plus grande hauteur que sa propre taille. 

Avocate de la famille de la victime

Après sa démonstration, l'avocate de la famille des victimes a demandé une condamnation de l'Ehpad en qualité de personne morale pour des préjudices de "souffrances physiques et psychiques de mort imminente de la victime", "des préjudices d'affection pour la famille" et "des préjudices de dénégation, pour la façon dont l'Ehpad à gérer le dossier".

Elle indique notamment que la directrice en place dans l'établissement à l'époque a tenté de cacher l'affaire et de "faire porter la responsabilité du drame aux enfants, qui ont placé temporairement leur mère dans l'Ehpad".

Des envies de fuite

De son côté, l’avocate de la défense a plaidé pour la relaxe en indiquant "qu’aucune réelle preuve ne peut affirmer avec certitude les causes de la mort de la dame et les événements qui ont amené à ce drame".

Elle met notamment en avant que "toutes les normes de sécurité avaient été vérifiées par l’ARS lors de l’ouverture de l’EHPAD", quelques mois avant le drame.

Et la vidéosurveillance, pointée sur la terrasse, ne montre "à aucun moment une masse tombée, malgré la faible qualité d’enregistrement et la présence d’une toile d’araignée qui gêne la visibilité".

L'avocate de la défense avance un autre scénario. Celui selon lequel "les portes sécurisées de l'établissement ont pu ne pas bien se refermer cette nuit-là. Et la résidente aurait pu en profiter pour tenter de sortir".

La septuagénaire avait intégré temporairement et à contrecœur l'Ehpad, pour des raisons de sécurité et d'autonomie, le temps de l'hospitalisation de son mari. L'enquête révélait qu'elle avait tenté de s'enfuir à plusieurs reprises, notamment pour retrouver son chien auquel elle était particulièrement attachée.

"Nous n'avons pas affaire à une reine de l'évasion"

Dans cette affaire et avec les éléments apportés par les deux camps, le Procureur de la République a conclu que "la victime se trouvait dans un endroit où elle n’aurait jamais dû être, qu’importent les scénarii. Cela prouve, selon moi, un défaut de surveillance des personnels".

Après avoir concédé que "les Ehpad ont des obligations de moyens de sécurité et pas d'obligation de résultat", il a insisté sur le fait que ce cas nécessite d'aller "au-delà, du fait de la mort suspecte dans cet établissement en particulier".

Dans ses conclusions, il affirme que "nous n'avons pas ici affaire à une reine de l'évasion. Il est difficile à croire qu'elle ait prémédité une sortie, en retenant le code pour passer plusieurs portes de sécurité. Le fait que l'infirmière et l'aide soignante qui travaillent le soir-même n'interviennent pas tout de suite pour aider la victime en la voyant sur la terrasse mais remontent à l'étage, montre qu'elles ont compris ce qu'il s'est passé. Je ne vois qu’une issue. La dame est passée par la fenêtre, par négligence des règles de sécurité des personnels. Et les pièces du dossier montrent que la fenêtre de la salle de pause des infirmières s’ouvre entièrement, ce qui ne devrait pas être le cas d’un point de vue de la sécurité".

Le Procureur de la République a requis une amende de 10 000 euros à l’encontre de l’Ehpad « La source » de Mondeville pour la reconnaissance de la responsabilité de l’établissement dans la mort de la victime.

La décision de justice a été mise en délibéré au 12 décembre 2024.

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