SM Caen. Le déficit structurel a doublé, la masse salariale a explosé : est-ce inquiétant pour l'avenir ?

La DNCG (Direction nationale du contrôle de gestion) a publié le 24 avril son rapport annuel sur le bilan financier des clubs professionnels de Ligue 1 et de Ligue 2. Le SM Caen présente un déficit structurel de 2,8 millions d'euros, et une masse salariale en hausse de 35%. Est-il nécessaire de s'inquiéter ?

Le SM Caen est-il en difficulté financière ? C'est ce que l'on pourrait penser en jetant en oeil non avisé au rapport financier publié par la DNCG le 24 avril. Celui-ci reprend le bilan du club normand sur la saison 2022-2023, soit l'an dernier. 

Sportivement, Malherbe avait terminé 5e du classement sous la houlette de Stéphane Moulin, soit le meilleur résultat du club normand depuis sa relégation en Ligue 2 en 2019. Autre aspect positif, la billetterie s'est rarement aussi bien portée en Ligue 2, et les ventes de maillots et produits dérivés ont explosé avec l'arrivée de l'équipementier italien Kappa il y a deux ans.

Économiquement, il ressort du rapport du gendarme financier du football français que le SMC est en déficit. Celui-ci s'élève à de 2,77 millions d'euros, et ce, malgré une balance des transferts excédentaire (6,4 M€), notamment boostée par le transfert de Johann Lepenant à Lyon.

Ce n'est pas un signal d'alerte. D'ailleurs, le club est passé devant la DNCG, il n'y a eu aucune remarque. Même s'il a présenté un bilan de - 2,8 millions d'euros, ses actionnaires ont présenté des garanties suffisantes pour combler ce passif. Toutefois, il ne faudrait pas que ça se reproduise plusieurs années de suite, parce que ça réduit la capacité du club à investir sur le marché des transferts. 

Mathieu Billeaud, journaliste à Foot Normand

Alors qu'est-ce qui plombe les finances du club ?

Il ressort du bilan présenté par le Stade Malherbe que sa masse salariale a explosé. Elle est passée de 9,3 M€ à 14,7 M€. Pour son recrutement, Yohann Eudeline a misé sur des joueurs en fin de contrat dans leurs clubs respectifs, des footballeurs qu'il n'est pas nécessaire de racheter à un club rival, mais aussi susceptibles de choisir la destination la plus attractive, et la plus offrante. 

Venant de L1, Romain Thomas et Anthony Mandréa ne sont pas redescendus d'un étage uniquement pour le plaisir. Courtisés, les deux Palois Daubin et Essende ont choisi la Normandie. Il a fallu ajouter à ça les arrivées hivernales de Moussa Sylla et du Suédois Anton Salétros. Dans le même temps, Caen a revalorisé l'international tunisien Ali Abdi. En parallèle, le board malherbiste s'est délesté de très peu de joueurs à forts émoluments, d'où la significative hausse de cette partie du budget.

Pour autant, est-ce un problème d'avoir un tel déficit global ? Pas forcément à en croire Christophe Durand, enseignant-chercheur en économie et management à l'Université de Caen. "En 2022, Caen avait généré un bénéfice d'1,3 M€. En 2023, c'est un déficit de 2,77 M€. Beaucoup de clubs ont un modèle similaire, où un trou financier peut être renfloué par des transferts". En effet, Le Havre, Guingamp ou encore le Paris FC présentent un bilan négatif similaire à celui du SMC. 

Je ne parle pas de situation alarmante. 80 % des clubs français sont structurellement déficitaires, remis à flots par les transferts. Mais dans un contexte où les droits TV vont être renégociés à la baisse, si les pertes ne sont pas compensés par les transferts, ce sera aux actionnaires de le faire. J'ai compris que Pierre-Antoine Capton voulait attirer de nouveaux investisseurs, un tel bilan n'est pas très attractif.

Christophe Durand, professeur en économie et gestion du sport à l'Université de Caen

Avec ses élèves, le professeur caennais épluche chaque année les bilans comptables du SMC depuis 15 ans. "Sur les 14 dernières saisons, le SM Caen a généré plus de 90 millions d'euros de plus-value sur les transferts de joueurs, ce qui constitue un élément majeur de l'équilibre. Sur la même période, le club est en déficit de 6,5 millions d'euros, ce qui tend à valider la stratégie économico-sportive de ses dirigeants", analyse l'enseignant.

Cependant, même si Olivier Pickeu a réalisé de jolis coups avec les ventes d'Alexis Beka Beka et de Johann Lepenant, il s'avère que Malherbe n'a pas assez vendu depuis que l'ancien angevin a pris les rênes du club. "Il y a une époque où Malherbe générait 14 millions de plus-value sur les transferts (Kanté et Lemar) ! Mais aujourd'hui, Caen est en L2, il réalise moins de grosses ventes car les joueurs sont moins lucratifs", explique Christophe Durand. 

Dans un avenir proche, le SMC devra donc vendre, et bien vendre. Il en a les capacités, avec des joueurs comme Alexandre Mendy, meilleur buteur de Ligue 2, Ali Abdi, international tunisien ou encore des pépites comme Brahim Traoré et Tidiam Gomis, fortement courtisé par le Bayer Leverkusen, récent champion d'Allemagne. 

Un bilan 2023-2024 pire encore ?

Il se pourrait surtout que le club n'ait d'autre choix que d'animer le marché estival des transferts, car cette saison, le bilan risque d'être encore moins bon que sur l'exercice 2022-2023. En effet, si, à l'intersaison le club a dégraissé son effectif, il a aussi revalorisé Mendy, attirer des valeurs sûres comme Henry, Autret et Le Bihan.

Il avait également misé sur Jean-Marc Furlan, l'entraîneur le plus référencé du marché, avant de s'en séparer au bout de quatre mois. Un licenciement imprévu d'un coach bien payé qui pourrait plomber les finances caennaises, même si la procédure judiciaire pourrait faire traîner les paiements. Ensuite, la promotion de Nicolas Seube, entraîneur au départ non-titulaire du BEPF, s'est accompagnée d'une amende de 12 500 € par match. Alors que Pierre-Antoine Capton est en train de finaliser le rachat des parts du fonds d'investissement américain Oaktree, il est probable que l'on ait un été très chaud en Normandie.

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