Les habitants du Pays falaisien sont révoltés. Une fois de plus, on détériore la qualité de leur hôpital à des fins économiques. Quatre ans après la fermeture de la maternité, c'est la cuisine de l'établissement qui doit cesser son activité dans les prochains mois. Explications et réactions.
700 000 euros, tel est le coût estimé pour rénover la cuisine de l'hôpital de Falaise. Etablie au rez-de-chaussée de l'établissement depuis 1994, elle affiche aujourd'hui des signes de vétusté, les travaux de maintenance nécessaires n'ayant pas été effectués aussi souvent qu'il l'aurait fallu. Les irrégularités pointées du doigt par la Direction départementale de protection des population (DDPP) concernent l'humidité et l'extraction des fumées. Plusieurs fois, ces services sanitaires ont alerté la direction de l'hôpital falaisien. Devant l'inaction des directions successives, ils ont fini par prononcer une mise en demeure afin que les travaux soient enfin réalisés.Arrivé début octobre à la tête de l'établissement de soin, Stéphane Péan a fait estimer cette rénovation. Il en a conclu que cela coûterait trop cher à un hôpital déjà endetté et qu'il était préférable de fermer définivement le service. Inconcevable et inacceptable pour les salariés du centre hospitalier, gavés par les couleuvres avalées depuis plusieurs années.
"C'est dans la continuité de la fermeture de notre maternité en 2015, puis de la fin de notre permanence des soins, de notre chirurgie complète. Maintenant, ce sont les cuisines. Demain, on a peur que ce soit encore d'autres services. On dit stop, ça suffit ! On en a marre de voir notre hôpital démonté pierre par pierre, service par service". Karine Velanovski, déléguée CFDT du personnel de l'hôpital de Falaise
La déléguée syndicale pointe aussi les travaux déjà réalisés depuis quelques semaines, à la suite de la mise en demeure. Certains plafonds abîmés par l'humidité ont été changés, des évacuations de fumée réparées. Il en reste à faire mais selon les employés, rénover la cuisine dans son entièreté n'est pas une priorité absolue, la préserver, si. Mercredi 18 décembre, ils ont lancé une pétition sur le site change.org. Au moment où l'on écrit cet article, elle recueille près de 1600 signatures.
La question de la qualité des repas
21 employés travaillent dans les cuisines de l'établissement falaisien. Chaque jour, ils produisent 1 500 repas destinés aux patients hospitalisés mais aussi aux résidents de trois EHPAD de l'agglomération. Si les fourneaux de l'hôpital venaient à fermer, la nourriture pourraient venir du CHU de Caen. Cela pose un problème de qualité selon le personnel hospitalier.
Un cri du coeur partagé par le Maire de Falaise, Eric Macé, médecin de profession et donc farouchement attaché à la qualité des soins dans sa commune. "On sait qu'on mange bien dans notre hôpital. Le repas, pour des personnes hospitalisées, en particuler dans les EHPAD, fait partie, en mon sens, de la prise en charge". L'élu est "tombé des nues" en apprenant la décision de fermeture prise par le nouveau directeur du centre hospitalier."La qualité des repas du CHU ne sera pas la même que ceux que l'on fabrique ici. Pour nos résidents, pour nos personnes âgées, l'un des seuls plaisirs qui leur restent est d'avoir de bons repas. On ne peut pas leur supprimer ça !" Carole Bellaunay, aide soignante/standardiste à l'hôpital de Falaise
E. Macé : "L'exemple typique des problèmes de l'hôpital public"
Eric Macé savait qu'il y avait des travaux importants à réaliser et qu'il y aurait des difficultés à faire face, mais il a été surpris de savoir qu'il y avait des alertes depuis plus de dix ans. Il dénonce surtout la gestion uniquement économique des hôpitaux publics.
"Je comprends que l'on ait privilégié les investissements dans les domaines des soins, mais ce qui m'étonne, c'est que nous n'ayons pas réagi plus tôt vis-à-vis des services sanitaires. Depuis 2008, nous aurions pu prendre les décisions qui s'imposaient pour ne pas arriver à cette situation actuelle. Je n'accepte pas la décision de fermeture. Y'a-t-il un réel besoin d'investir 700 000 euros ? Peut-être, mais ont-ils besoin d'être investis immédiatemment ou pouvons nous les envisager à échéances fixes avec les services sanitaires ?" Eric Macé, maire (SE) de Falaise
Devant ces interrogations, l'édile a décidé de relancer les services de la DDPP, afin de trouver un terrain d'entente pour conserver la cuisine de l'hôpital, et les emplois qui en découlent. Son travail désormais, comme celui des syndicats et salariés hospitaliers, sera de convaincre le nouveau directeur de revoir sa copie et de faire machine arrière.