"Le moto ball a encore cet esprit familial qu'on essaie de faire perdurer" : grâce au système D, il tient son championnat d'Europe en Normandie

Mélanger football et cylindrées n'est pas une nouveauté. Le moto ball existe depuis un siècle et a connu son heure de gloire après la Seconde Guerre mondiale. Le plus vieux club de France, à Houlgate, organise du 20 au 24 août les championnats d'Europe de la discipline.

C'est un cocktail détonnant, au propre comme au figuré. Au stade Emile Langlois, à Houlgate, cité balnéaire du Calvados, le bruit des moteurs couvre souvent les cris des spectateurs. Et ces derniers seront sans doute encore plus nombreux que d'habitude cette semaine puisque c'est en Normandie qu'ont lieu cette année les championnats d'Europe de moto ball, une discipline, comme son nom l'indique, mêlant moto et ballon rond.

Sur un terrain de football, deux équipes s'affrontent avec un même objectif : pousser le ballon dans les buts adverses. "La seule différence, c'est que les joueurs sont à moto", explique Grégory Lemeunier, président du Moto Ball Club d'Houlgate (MBCH). De part et d’autre, quatre pilotes chevauchent une 250 cm3 et tentent de contrôler le ballon d'un kilo et de 40 cm de diamètre."Les meilleurs joueurs de moto ball, en règle générale, ont une très très bonne base de football et ensuite à une bonne maîtrise du pilotage."

Deux arbitres par match

Seuls les gardiens évoluent à pied. Comme les deux arbitres mobilisés sur une rencontre. "Il y en a un dans chaque camp puisque c'est un jeu qui est quand même très très rapide et très spectaculaire. Un arbitre ne pourrait pas se permettre de courir sur tout le terrain sur toute la durée des rencontres qui durent, pour la catégorie junior 4 x 15 minutes, et pour la catégorie senior 4 X 20 minutes." Cette semaine, la France, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Lithuanie vont se disputer, dans les deux catégories, le titre de champion d'Europe au stade Emile Langlois.

Hormis la météo, "exécrable" en ce jour d'ouverture, l'ambiance est à la fête à Houlgate. "C'est une très grande fierté. Ça permet de fêter dignement les 90 ans du club." Car la discipline accuse, selon ses historiens, pas moins d'un siècle d'existence. C'est Outre-Manche qu'on en trouve les premières traces. "Le moto ball a été créé en 1922 en Angleterre. Il s'est ensuite développé, majoritairement en URSS. L'État soviétique finançait l'intégralité de la discipline. Ça ne coûtait rien au club." Aujourd'hui encorela Russie (et son voisin biélorusse) domine la discipline. Mais le champion d'Europe en titre ne viendra pas en Normandie, "compte tenu du contexte international".

Jusqu'à 50 clubs durant l'âge d'or

En France, les premiers clubs de moto ball font leur apparition dans l'est du pays "dès 1923". "Quand il y a eu la guerre, ça s'est arrêté. Les motos ont été enterrées. Dès que la guerre s'est terminée, on a déterré les motos et l'entraînement a recommencé", nous racontait il y a sept ans, Jean Lemeunier, un historique du club et ancien capitaine de l'équipe d'Houlgate. La France va compter jusqu'à une cinquantaine de clubs. Aujourd'hui, Houlgate est le doyen des 13 survivants (dont six dans le seul département du Vaucluse) et le seul du nord-ouest.

"Malheureusement, le sport mécanique n'a pas bonne presse. Entre les nuisances sonores et la pollution, l'utilisation d'énergie fossile, forcément ça n'a pas plu", raconte l'actuel président du MBCH, Grégory Lemeunier, "Au fur et à mesure que les communes se sont étoffées avec un afflux d'habitants, elles ont petit à petit lâché les clubs qui existaient. C'est très compliqué aujourd'hui de maintenir un club de moto ball en activité.

"C'est un peu un sport système D"

À l’exception de ce championnat d'Europe, où les sportifs bénéficient durant quelques jours d'un statut semi-professionnel, le moto ball reste amateur le reste de l'année. "C'est de la débrouille. On doit chercher des financements, des partenaires. C’est un peu un sport système D. Dans certains clubs, vous pouvez avoir des joueurs qui peuvent cumuler plusieurs postes : trésorier, entraîneur, mécanicien. Chez nous, on est à peu près structuré : on a un exécutif, des mécaniciens puis des joueurs qui ne font que ça entre guillemet. Mais on leur demande de participer à l'entretien puisque le club est propriétaire des motos qu'il met à leur disposition.

En comptant les bénévoles (hors pilotes, mécanicien, entraîneur, direction) qui viennent donner un coup de main sur l'organisation des différents événements qui jalonnent une saison (les matchs de championnat de France et de Coupe de France), c'est une soixantaine de personnes qui font vivre le club 90 ans après sa création avec un budget d'environ 100 000 euros par an. De modestes moyens qui n'empêchent pas de se projeter dans l'avenir.

La solidarité du monde amateur

Houlgate est le deuxième club français à s'être équipé en motos électriques pour les juniors. Un investissement de 80 000 euros pour lequel il a bénéficié du soutien de la Région, du Département et du syndicat d'énergie du Calvados. "On est bien ancré dans la société donc pour pérenniser notre pratique on fait un certain nombre d'efforts : le passage à l'électrique, la réduction des nuisances sonores et à terme aussi l'usage de nouveaux carburants pour les motos thermiques."

Pour accueillir les championnats d'Europe - 250 000 euros de budget - il a aussi fallu trouver des solutions. Et dans le monde amateur, celle-ci a été vite trouvée : la solidarité. "L'amour du sport a fait que spontanément plusieurs personnes se sont proposées de venir chez nous pour participer à l'organisation de cet événement, faire partie de l'évènement. Le moto ball a encore cet esprit familial qu'on essaie de faire perdurer au maximum entre nous, les 13 clubs."

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