La campagne pour les élections législatives a démarré. Les électeurs ont moins de deux semaines pour choisir leur candidat. Dans le contexte de cette campagne express, nous sommes allés à la rencontre des votants.
Les électeurs n'ont plus qu'une dizaine de jours pour choisir leur candidat. La dissolution surprise de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron, le 9 juin, a pris tout le monde de court, forçant une campagne express en vue de l'élection des députés, les dimanches 30 juin et 7 juillet.
Sur les marchés normands, où les tracts politiques se distribuent déjà, les élections sont sur toutes les lèvres. C'est aussi l'occasion pour les électeurs de rappeler leurs préoccupations. "Je commence à ne plus trop m'y retrouver financièrement. Avec nos salaires qu'on touche maintenant, ça commence à être très dur. Qu'est-ce qui va être fait par rapport à tout ça ?", demande une résidente de Falaise, dans la 3ᵉ circonscription du Calvados. "C'est un peu stressant pour moi, qui suis maman célibataire, de ne pas savoir où ça va mener plus tard".
"Je veux juste qu'on pense à nous. Ce que je veux, c'est du concret, des gens présents, qu'ils soient de droite, de gauche. On veut des gens locaux, qu'on puisse les avoir quand on a un problème", réclame un vendeur de cidre sur le marché de Saint-Pierre-en-Auge, situé dans la même circonscription.
Là-bas, on est resté très à l'écart des tractations politiques intervenues dès le lendemain de la dissolution de l'Assemblée, et qui ont entraîné la formation d'une large alliance des partis de gauche, sous la bannière du Nouveau Front populaire, et des candidatures communes entre le Rassemblement national (RN) et les soutiens du président contesté des Républicains, Éric Ciotti, dans 70 circonscriptions, dont plusieurs en Normandie.
"Les gens n'ont plus confiance"
L'actualité politique ? "Suivie de loin", lance un habitant de Saint-Pierre-en-Auge. "Ils fatiguent à ne parler que de ça", ajoute une passante. "On subit. lls se battent tous, ils feraient mieux de se réunir, ça me fatigue", complète cette mère de famille, qui annonce qu'elle ira quand même voter. "Les gens n'ont plus confiance dans les politiciens", énonce un agriculteur, qui vend ses produits sur le marché.
Pour l'électricité, on consomme moins, on paie plus, donc il y a un truc qui ne va pas quelque part.
Un vendeur du marché de Saint-Pierre-en-Auge (Calvados)
Aux européennes du 9 juin, l'abstention a touché les 54% à Saint-Pierre-en-Auge, contre 48,5% dans toute la France. "Les gens ne font plus de politique en ce moment. Ils sont tellement désabusés", explique un militant du Nouveau Front populaire, la nouvelle alliance à gauche, venu militer sur le marché de cette commune pour le candidat du Parti socialiste, Olivier Truffaut. "On voit bien qu'il y a une espèce de rejet de la politique et ils ne savent plus à quel saint se vouer". Aux européennes, c'est la liste du Rassemblement national qui est arrivée en tête dans la commune, avec 41% des voix. "On ne s'attendait pas à avoir un accueil unanime, mais on continue à lutter. On essaie de convaincre sur les marchés, on est sur une terre de mission", exprime le militant du Nouveau Front populaire.
"Les gens font la tronche, ils ne sont pas rigolos", déplore un vendeur de vêtements, qui, bien que souriant, avance qu'il a "envie de partir à l'étranger". Depuis les élections, "on ne voit plus les gens comme avant. Ils n'ont plus d'argent, ils n'ont plus rien, les pauvres, c'est triste", témoigne-t-il. "Même pour nous, c'est pas intéressant. Pour l'électricité, on consomme moins, on paie plus, donc il y a un truc qui ne va pas quelque part", déclare le commerçant. Lorsqu'on lui demande si les élections vont changer les choses, il répond sur le champ : "J'espère, il est temps !"
Voter "pour une personne plus qu'un parti"
À Carentan, dans la 1ʳᵉ circonscription de la Manche, le RN a aussi obtenu la victoire aux européennes, avec 35% des suffrages, mais moins nettement qu'à Saint-Pierre-en-Auge. "J'espère qu'il y aura moins d'abstention que la dernière fois, ce qui peut changer le résultat des élections", défend un octogénaire, rencontré sur le marché de cette ville de 5 800 âmes, qui déclare "ne pas aimer les extrêmes".
"Je pense qu'il n'y aura pas de majorité, ça va être le bordel (sic), on va retourner à la quatrième République", connue pour l'instabilité de ses gouvernements, commente un homme sur le marché de Carentan. Une autre électrice fait part de son désarroi à l'approche du suffrage. "Je ne comprends rien", déclare-t-elle. Et d'ajouter, au sujet des alliances partisanes : "Je n'écoute même pas ça, ça ne m'intéresse pas plus que ça, c'est tous des menteurs". Elle indique voter "au feeling, pour une personne plus qu'un parti".
Dans les milieux ruraux, nous n'avons plus les services qui existaient autrefois.
Un résident de L'Aigle (Orne)
À L'Aigle, dans la 1ʳᵉ circonscription de l'Orne, un retraité confie ses doléances : "Ce que j'ai constaté, c'est que, dans les milieux ruraux, nous n'avons plus les services qui existaient autrefois. Des services simples, comme celui d'un autocar qui permet à des gens de venir au marché, aller à l'hôpital". Un autre avance que "les étrangers, ils arrivent, ils ont le droit à un logement, à ceci, à cela. Moi, j'ai une petite gamine à garder en ce moment, j'ai pas le droit à l'allocation logement, j'ai le droit à rien du tout. Je ne suis pas contre les autres, mais qu'on commence par soi-même", affirme l'homme de 82 ans.
Plus loin, une électrice s'inquiète plutôt de la montée de l'extrême droite : "Moi, je suis maman de deux enfants. Je n'ai pas envie d'idées très réactionnaires, ça ne me convient pas du tout, ça me fait peur".
Découvrez les listes complètes des candidats aux législatives des 30 juin et 7 juillet dans le Calvados, la Manche, l'Orne, l'Eure et la Seine-Maritime.