Quand Bernard Cazeneuve dit partir "en homme de gauche", Edouard Philippe lui rétorque : "je suis moi-même un homme de droite". Les deux hommes ont cependant convoqué l'esprit de Tocqueville lors de cette cérémonie. "Je crois que dans ces moments, il faut de la sagesse" a dit Bernard Cazeneuve.
Edouard Philippe a fait son apparition d'un pas vif à 15h55. Le nouveau premier ministre nommé dans l'après-midi a été accueilli par celui qui occupait le poste depuis six mois. Les deux hommes se sont enfermés pendant une quarantaine de minutes pour un entretien avant de réapparaître dans la cour, devant les journalistes et le personnel qui assure le fonctionnement des services du premier ministre.
Bernard Cazeneuve n'a d'abord pas caché sont "grand plaisir" d'accueillir un Normand : "ça compte pour vous comme pour moi, la Normandie, cette région dont Tocqueville disait - il a écrit une bonne partie de son oeuvre au coeur de ce que fut ma circonscription - que les Normands sont violemment modérés, c'est à dire qu'ils sont imprégnés de sagesse, et je crois qu'il faut de la sagesse dans le moment historique particulier où nous nous trouvons et qui doit appeler ceux qui exercent la plus haute resoponsabilité au sommet de l'état à essayer de rassembler et d'apaiser".
Cazeneuve : la loyauté et la fidélité ont constitué une bousole
Après avoir évoqué les cinq années passées dans les gouvernements du quinquennat Hollande, Bernard Cazeneuve a conclu en ne cédant rien à son engagement politique. "Je quitte la responsabilité qui est la mienne en homme de gauche, avec mes convictions". Le premier ministre sortant cite alors Blum, Jaurès, Mitterrand, Mendès-France, Fabius, Hollande, "qui m'ont montré le chemin".
"Ces convictions je les emporte avec moi parce que j'ai la certitude que la modernisation du pays n'est possible que dès lors qu'il y a dans l'engagement de chacun une authenticité, un attachement aux lecons de l'histoire. On en vient pas de nulle part, et si l'on veut montrer fermemebnt la direction, il faut précisemment savoir quels sont ces héritages dont on est comptable." Bernard Cazeneuve glisse alors ce que certains interprèteront comme un coup de griffe destiné au nouveau président de la république. "Dans ma vie politique, la loyauté, la fidélité (...) ont constitué une boussole au même titre que le sens de l'état."
L'allocution de Bernard Cazeneuve
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Edouard Philippe salue alors le parcours "assez exceptionnel" de Bernard Cazeneuve, aux affaires européennes, à l'intérieur, et au poste de premier ministre. "Vous avez souhaité servir l'état. Vous l'avez fait avec votre style, dont je ne sais pas s'il est normand, mas dont je sais qu'il est empreint d'une élégance constante, d'un sérieux attentif, d'un sens de l'humour qui est une sorte de politesse de l'esprit et d'un sens de l'état qui constitue une exemple".
Edouard Philippe : "je suis moi-même un homme de droite"
Le nouveau premier ministre ajoute alors : "les Normands sont violemment modérés, ils sont aussi parfois conquérants, et vous êtes complètement normand, et moi aussi. C'est la raison pour laquelle j'ai été heureux alors même que j'étais député de l'opposition de voir que la république vous confiait des responsabilités. J'en ai été rassuré. Vous avez dit que vous étiez un homme de gauche, il se trouve que je suis moi-même un homme de droite. Et pourtant, je sais que nous avons l'un pour l'autre de l'estime et nous savons que l'intérêt général doit guider l'engagement des élus, des agents de l'état et, d'une certaine façon, l'engagement de nos concitoyens".
L'allocution d'Edouard Philippe :
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Bernard Cazeneuve quitte l'Hôtel Matignon après la passation de pouvoir à Edouard Philippe, nouveau Premier ministre pic.twitter.com/6akbktdyPb
— franceinfo (@franceinfo) 15 mai 2017
Bernard Cazeneuve, cinq années au pouvoir
L'ancien député-maire de Cherbourg est l'un des rares à avoir occupé des fonctions ministérielles du premier au dernier jour du quinquénnat. Nommé en 2012 aux affaires européennes, il a ensuite récupéré le portefeuille du budget quand Jérôme Cahuzac a été poussé à la démission. Il a succédé à Manuel Valls au ministère de l'intérieur, puis à l'hôtel Matignon où il a pris le poste de premier ministre pour une durée de six mois.Récit de Catrherine Berra :
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