Face aux vols de chariots, un supermarché de Val-de-Reuil dans l'Eure ne les laisse plus en libre-service. Il est demandé aux clients de confier à l'entrée leur pièce d'identité comme une caution pour s'assurer qu'ils le rendront. Un usage qui se banalise mais n'a pas de base légale.
Dans ce supermarché de Val-de-Reuil, les clients avaient de plus en plus de mal à trouver un chariot disponible dans les abris sur le parking. Beaucoup disparaissaient ou étaient volés.
Ce phénomène est très répandu dans toutes les grandes surfaces. Le personnel ou les directeurs de magasins doivent partir à leur recherche. Chaque chariot coûte autour de 150 euros.
L'affichette apparue depuis quelques jours a malgré tout surpris. On peut y lire "sur présentation d'une pièce d'identité, nous vous prêtons un "caddie". Cette information pratique n'a pas été mise en avant sur le compte Facebook du magasin.
Passer à la caisse, ranger ses courses et revenir à l'accueil
Dans les faits, les chariots sont désormais à l'intérieur du magasin. Pour prendre son "panier à roulettes", le client doit présenter sa pièce d'identité et aussi accepter de la laisser à l'accueil.
Les courses terminées, après le passage en caisse et/ou après avoir rangé ses courses dans sa voiture, il devra retourner au point d'accueil pour rendre son chariot, et demander qu'on lui restitue sa pièce d'identité.
Une "expérience client" qui perd en fluidité.
Pourquoi cette solution a-t-elle été choisie ? La directrice du magasin que nous avons pu obtenir au téléphone (ce 20 août) nous dit qu'elle n'a pas d'explication à apporter.
D'autres enseignes cherchent elles aussi des parades aux disparitions de chariots de courses. Une des plus efficaces est le système de "boucle magnétique". Les chariots sont équipés d'une roue qui peut se bloquer si l'équipement sort d'un périmètre.
Doit-on confier sa pièce d'identité pour tout et n'importe quoi ?
La loi autorise les commerçants à vérifier l'identité des clients qui paient par chèque. Mais le nouvel usage qui consiste à exiger de garder un justificatif d'identité n'est pas légal dans toutes les circonstances.
À l'entrée d'une installation sensible (certaines entreprises, une centrale nucléaire, une base militaire, l'Assemblée Nationale par exemple), les visiteurs ou sous-traitants doivent laisser une pièce d'identité échangée contre un badge. Leur nom est inscrit sur un registre. Ils récupèrent leurs papiers à la sortie.
Cette exigence devient fréquente dans d'autres circonstances : centres de loisirs, centres aquatiques, cinémas pour servir de caution pour des bracelets de piscine, réhausseurs de siège, pédalos....
Les données d'une carte d'identité ne peuvent pas être laissées entre toutes les mains sans fondement légal.
La sécurité des données personnelles est protégée en Europe par la RGPD, règlement général de protection des données.
Votre carte d’identité ne peut pas être retenue comme caution. Cette pratique n’est pas acceptable étant donné qu’elle vous met en défaut de remplir votre obligation légale d’être porteur de votre carte d’identité. Cette pratique présente de plus des risques de vol d’identité. La prise de copie de votre carte d’identité dans ces circonstances pose aussi des problèmes de compatibilité avec le RGPD
L'autorité de protection des données de Belgique
Autre problème, les justificatifs d'identité sont souvent déposés en vrac dans une boîte à l'accueil de commerces ou de lieux de loisir. La personne qui est chargée de les collecter et de les rendre a souvent d'autres tâches à remplir.
Par erreur, une pièce d'identité peut être restituée à la mauvaise personne... et comme aucun registre n'est tenu, la confusion sera totale.