Les pelleteuses sont à pied d’œuvre sur la falaise des Roches de Ham près de Saint-Lô (Manche). L'abattage des arbres vise à redonner son caractère pittoresque à ce site classé depuis plus d’un siècle. Plus étonnant, il s'agit aussi de favoriser la biodiversité.
L’abattage d’arbres, spectacle impressionnant, suscite souvent l’indignation des témoins. Le site des Roches du Ham, bien connu des randonneurs, est le théâtre depuis le 9 septembre de coupes de frênes. Cette opération menée par le Département de la Manche ne vire pas à la tragédie. Elle vise au contraire à faire renaître le site de ses cendres, en lui redonnant son caractère minéral.
Les Roches du Ham font partie des 26 espaces naturels sensibles gérés par le Conseil départemental. Ce fut le tout premier site classé dans la Manche, dès 1914, au titre des paysages pittoresques.
À l’époque, il ne ressemblait pas du tout à ce qu’il est aujourd’hui. Aux 19e et 20e siècles, il était exploité par l’homme : carrières de pierre, transport de matériaux, agriculture. La roche était donc quasiment à nu, là où elle est aujourd’hui recouverte par des arbres. La repousse des frênes et des chênes s’est faite à partir des années 60.
Il ne s’agit pas pour autant d’abattre tous les arbres du site, un rideau sera laissé devant la falaise. À 70 mètres de hauteur, c’est un chantier très technique. Les arbres sont coupés par des bûcherons, puis attachés un par un à un câble de 90 mètres de long pour être tractés depuis le bas de la paroi rocheuse.
L’objectif n’est pas de faire une coupe à blanc, mais de sélectionner les arbres. On va en abattre entre 70 et 80 arbres, qui sont le long de la pente, pour rétablir le caractère rocheux.
Valérie Samson Directrice de l’entreprise Arbor&Sens
Couper les arbres pour permettre au soleil et aux espèces de revenir
Selon le département de la Manche, les frênes coupés sont pour la plupart atteints de la maladie de chalarose et les quelques chênes en cours d’abattage ne sont pas bien portants non plus.
Et surtout, leur abattage va permettre le retour d'une biodiversité originelle. Selon le Département, plus de 350 espèces de fleurs et plus de 450 espèces faunistiques ont été recensées aux roches de Ham.
Mais certaines espèces ne s'y épanouissent plus à cause du manque de lumière et de chaleur généré par les arbres.
L’objectif est d’arriver à retrouver des zones sans ombre, sur lesquelles le soleil puisse donner directement, pour qu’on puisse retrouver ou conforter des populations d’espèces à la fois faunistiques et floristiques, qui sont spécifiques de ces milieux très chauds.
Blaise Micard, Responsable du service du patrimoine et gestion des milieux naturels au Département de la Manche
Parmi les espèces susceptibles de venir s'épanouir au soleil dans les Roches de Ham, on trouve des reptiles comme les lezards ou les vipères. Les amateurs de fleurs ne seront pas déçus de trouver ou retrouver des espèces adaptées à des milieux très secs et dont les racines s'insèrent dans la roche, par exemple la scille d'automne, que l'on a plutôt l'habitude de trouver dans les pinèdes ou la garrigue.
Les travaux sur cet espace naturel sensible dureront au total 15 jours. Les fleurs et les animaux prendront quant à eux le temps qu'il leur faut pour s'installer durablement dans les Roches de Ham.