Durant toute cette semaine d'entre-deux tours des législatives, la rédaction de France 3 Normandie organise chaque soir à 18 h 38 un débat centré sur une circonscription. Ce mardi 14 juin, les deux finalistes de la 4e de la Manche, Anna Pic (Nupes-PS) et Sonia Krimi (Renaissance, ex-LREM-Ensemble) sont sur notre plateau.
Durant cette semaine d'entre-deux tours des législatives, la rédaction de France 3 Normandie vous donne rendez-vous à 18 h 38 ce mardi, ce jeudi et ce vendredi pour un débat opposant les deux finalistes d'une circonscription. Dans la Manche, à l'exception de la première circonscription ou le député LR sortant Philippe Gosselin arrive en tête, le second tour verra s'affronter dimanche 19 juin un candidat de la majorité présidentielle (Ensemble) et un candidat de la Nouvelle union populaire écologique et sociale. C'est le cas dans la quatrième circonscription de la Manche avec Anna Pic (Nupes-PS) et Sonia Krimi (Ensemble-Renaissance), les deux invitées de notre débat de ce mardi 14 juin.
Cette quatrième circonscription de la Manche est un bastion de la gauche dans ce département traditionnellement plutôt à droite, comme l'ensemble de l'ex Basse-Normandie. L'ancien premier ministre et ancien maire de Cherbourg Bernard Cazeneuve a représenté durant quinze ans à l'Assemblée nationale les électeurs des cantons de Beaumont-Hague, Cherbourg-Octeville-Nord-Ouest, Cherbourg-Octeville-Sud-Ouest, Cherbourg-Octeville-Sud-Est, Équeurdreville-Hainneville, Quettehou, Saint-Pierre-Église, Tourlaville.
Un bastion socialiste tombé dans l'escarcelle de LREM
Mais si les Socialistes ont conservé la mairie, il n'en a pas été de même du siège de député. En 2017, Sonia Krimi fait tomber la circonscription dans l'escarcelle du président tout juste élu, Emmanuel Macron. La jeune femme, alors âgée de 35 ans et consultante dans le secteur du nucléaire, s'est investie très tôt dans la campagne présidentielle. Mais La République En Marche lui préfère Blaise Mistler (aujourd'hui chez Horizons, le parti d'Edouard Philippe). Soutenue par des militants locaux, elle maintient sa candidature et l'emporte face au candidat investi officiellement par le parti d'Emmanuel Macron. Cinq ans plus tard, c'est elle qui est la candidate officielle de la majorité présidentielle. Comme cinq auparavant, elle termine en seconde position de ce premier tour avec 30,1% des voix.
Le Parti Socialiste, au sein de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), compte bien récupérer ce siège de député avec sa candidate Anna Pic. La patronne du PS dans la Manche bénéficie du soutien de Benoît Arrivé, le maire de Cherbourg-en-Cotentin, dont elle est l'un des adjoints. Âgée de 44 ans, cette conseillère principale d'éducation (CPE) a été conseillère départementale de 2015 à 2021 avant de devenir conseillère régionale. Elle est arrivée en tête dans la quatrième circonscription de la Manche au soir du premier tour avec 31,6% des voix.
Deux femmes de gauche ?
"Nous avons su répondre aux interrogations, aux besoins d’une gauche qui propose une augmentation du pouvoir d’achat, que nous puissions nous opposer au projet du président Macron qui propose déjà des mesures qui vont mettre à mal notre système social, de santé, éducatif, et pour tout ça nous allons continuer à aller auprès des gens et remobiliser ceux qui pensaient que leur voix ne comptait pas", déclarait ce dimanche Anna Pic peu après l'annonce des résultats.
Pour autant, rien n'est joué, rappelle son adversaire Sonia Krimi qui pointe une absence de réserve de voix pour Anna Pic (les candidats RN et LR sont arrivés respectivement en troisième et quatrième position avec 16,95% et 11, 23%). Seul 1,5 point sépare les deux finalistes. En outre, la candidate de la majorité présidentielle a incarné à plusieurs reprises durant son mandat l'aile gauche de LREM par des prises de position parfois à contre-courant de celle du gouvernement. "J’ai gagné en 2017 sans aucune investiture. Vous pensez qu’avec l’investiture et le soutien du président Macron je vais avoir froid aux yeux pour faire campagne pendant 5 jours ? Vous pensez que je ne vais pas parler de l’OTAN, de l’Europe, de nos relations avec la police. Résultat au deuxième tour, je vous donne rendez-vous, pour gagner", lançait avec un grand sourire dimanche soir Sonia Krimi.
Les temps forts du débat entre Anna Pic et Sonia Krim
Dimanche soir, c’est Anna Pic qui est arrivé en tête du premier tour des législatives dans cette quatrième circonscription de la Manche avec 31,6% des voix. «Nous avons réussi grâce aux propositions que nous apportons à amener les gens à aller voter pour cette candidature», estime la candidate de gauche (Nupes-PS), tout en déplorant de forts taux d’abstention « notamment dans les quartiers populaires ». Pour la conseillère municipale de Cherbougr-en-Cotentin, « Il faut aller vers ceux qui ne se déplacent pas et qui ne se sentent pas toujours concernés. Il faut leur parler des sujets qui les concernent : leurs revenus, le pouvoir d’achat, leur vie de travailleur. Il faut aller leur dire que leur voix, et c’est bien la seule fois dans notre société assez inégalitaire, qu’ils soient pauvres ou riches vaut exactement la même chose et que toutes leurs voix doivent compter ».
Son adversaire de la majorité présidentielle, Sonia Krimi, note que « l’écart (600 voix) n’est pas si important » et que « dans la circonscription, on est arrivé dans 28 communes ce qui montre quand même notre implantation, ce qui montre aussi le travail de la députée que je suis ». La députée sortante entend faire de son bilan et de celui de la majorité sortante son principal argument pour faire venir aux urnes les électeurs. «Quand on parle d’école, de dédoublement des classes de CP, de l’augmentation des salaires des professeurs, de l'allocation adulte handicapé, du minimum vieillesse, du reste à charge zéro, c’est leur vie qui a augmenté (…) Je vais leur parler de mes cinq années parce que je n’ai pas honte aujourd’hui de défendre ce que nous avons fait. » Et de promettre d’aller « encore plus loin dans l’écologie, la santé, l’éducation et tous les sujets qui les intéressent dans leur quotidien. »
La place du nucléaire dans la transition énergétique
Le nord-Cotentin est l’une des régions les plus nucléarisé de France. « C’est 13 000 emplois directs et des milliers d'emplois indirects », indique Sonia Krimi. Quelle place lui accorder dans la transition énergétique ? Au sein de la Nupes, plusieurs formations souhaitent en finir avec le nucléaire. « Il y a effectivement un point de divergence sur les modalités » , reconnait Anna Pic, « Dans les 600 propositions, il y en a 35 sur lesquelles nous (socialistes) disons nos divergences. Cette divergence sur le nucléaire n’est pas si profonde que ça. C’est la manière dont nous faisons la transition énergétique. Remettons du débat, remettons le parlement au cœur de ce débat démocratique nécessaire.» Et la candidate socialiste d’assurer que «Nous n’allons pas fermer Flamanville, nous n’allons pas arrêter demain matin le nucléaire. Ce qu’il faut par contre c’est massivement investir sur les technologies du renouvelable qui existent mais qui ne sortent pas. ». Favorable à un mix énergétique, Anna Pic indique que « les énergies nouvelles renouvelables, Cherbourg en Cotentin est bien placé pour le savoir, c’est + 1500 emplois. Et ça n’a pas enlevé d’emploi dans le secteur nucléaire. »
Son adversaire pointe les contradictions de l’union de la gauche sur ce sujet. «Le programme de la Nupes est un projet de sortie du nucléaire. Olivier Faure jeudi dernier était contre les six EPR. Être contre la mise en place de ces six nouvelles centrales, c’est l’arrêt dans quelques années de notre nucléaire », estime Sonia Krimi, qui défend dans ce domaine le plan France 2030 du président de la République. « Nous n’avons pas attendu les propositions de la Nupes et de M Jean Luc Mélenchon pour décider qu’il faut remettre un milliard d’euros sur l’hydrogène, investir encore dans les énergies renouvelables, on a même voté la loi Asap qui facilite la mise en place des éoliennes offshore, qui n’a pas été votée par les amis de la gauche et de la France Insoumise. Remplacer une centrale aujourd’hui, ce sont des milliers d’éoliennes à mettre en place. Comment on y arrive alors qu’en France aujourd’hui, on n’a même pas réussi à mettre en place les premières (offshore) ? »
Le secteur de la santé en crise
Il y a quelques semaines, le chef de l’Etat s’est rendu au centre hospitalier du Cotentin (CHPC) pour rencontrer les personnels soignants alors que les services d’’urgence sont en crise un peu partout en France. « Sur la santé, on revient de loin. On revient de trente années sans investissement. C’est ce qu’on a commencé à faire quand on a supprimé le numerus clausus. On n’a pas reconnu à leur juste valeur nos soignants, c’est pour ça qu’on a commencé à augmenter les salaires dans les hôpitaux. Les gens du CHPC savent qu’ils ont été augmentés de 183 euros. On a commencé avec le Ségur de la santé mais je pense qu’il faut aller plus loin », affirme Sonia Krimi.
« Il faut mieux financer l’hôpital et mieux reconnaître le travail dans le secteur hospitalier mais pas seulement », estime Anna Pic, qui pointe comme priorité la lutte contre les déserts médicaux. « L’hôpital est en souffrance et les urgences sont en souffrance lorsque nous avons des difficultés dans l’ensemble du territoire (…) La levée du numerus clausus, c’est dans dix ans que ces jeunes médecins vont sortir. Ce que nous pouvons mettre en œuvre très rapidement c’est sur la dernière année de médecine, sur les internes : demander à ce que, très simplement, ils soient de manière transitoire portés sur des déserts médicaux. » En clair : une obligation géographique « pendant une période transitoire, 2-3 ans éventuellement, qui permettrait qu’on réponde tout de suite à l’urgence. »
Les premières priorités
Pour conclure ce débat, nous avons demandé à chacune des candidates ce à quoi elles s’attèleraient en premier une fois élues à l’Assemblée nationale. « Je vais me battre contre la retraite à 65 ans. C’est un enjeu primordial. Si nous travaillons pour vivre, il ne faut pas qu’on meure au travail. Et pour une grande partie des classes populaires, c’est ça la retraite à 65 ans. », déclare la candidate de la Nupes, Anna Pic. Son adversaire Sonia Krimi préfère dérouler la feuille de route déjà fixée par le gouvernement : « On va attaquer avec une loi qui est déjà prête sur le pouvoir d’achat, on va indexer les retraites sur l’inflation et on travaillera sur les services publics également. »
Les résultats du premier tour dans la 4ème circonscription de la Manche
Cantons de : Beaumont-Hague, Cherbourg-Octeville-Nord-Ouest, Cherbourg-Octeville-Sud-Ouest, Cherbourg-Octeville-Sud-Est, Équeurdreville-Hainneville, Quettehou, Saint-Pierre-Église, Tourlaville.
Résultats des candidats selon les partis et/ou nuances politiques (source : ministère de l'Intérieur)
- Anna Pic (Parti Socialiste-Nupes) 31,61% en ballotage (13.279 voix)
- Sonia Krimi (Renaissance, ex-LREM-Ensemble) 30,14% en ballotage (12.665 voix)
- Eric Fouace (Rassemblement National) battu avec 16,95% (7.120 voix)
- Camille Margueritte (Normandie Conquérante) battue avec 11,23% (4.720 voix)
- Yann Da Cruz-Legeleux (Reconquête!) battu avec 3,04% (1.279 voix)
- Nicolas Calluaud (Union des Démocrates Indépendants) battu avec 2,20% (923 voix)
- Laure Jean (Parti Animaliste) battue avec 2,10% (883 voix)
- Marine Dauge (Mouvement de la Ruralité) battue avec 1,51% (633 voix)
- Abdelkader Benramdane (Lutte Ouvrière) battu avec 1,22% (512 voix)