Les festivals de l'été 2021 pourront avoir lieu, à condition pour l'instant de ne pas dépasser 5000 participants, assis et distanciés. Certains évènements se maintiendront mais les festivaliers seront-ils au rendez-vous dans ces conditions ? Témoignages d'habitués des festivals normands.
A moins que la situation sanitaire ne s'améliore dans les prochains mois, les festivals de l'été se tiendront dans une configuration particulière, que l'on pourrait aussi appelée "dégradée". Pour l'heure, les évènements musicaux en plein air pourraient se tenir à condition d'une jauge maximale de 5000 spectateurs, assis en gradin et distanciés.
Quatre jours de festival assis et masqués, désolé mais ce sera sans nous.
Depuis 2012, Freddy se rend chaque premier weekend de juillet dans le parc de Beauregard, pour assister au festival éponyme. Avec un groupe d'amis, c'est un rendez-vous incontournable. Pourtant, cette année, malgré des Pass achetés dès Noël, ils n'iront pas. "Passer 3 jours assis pendant des heures en plein soleil, puis dans la fraîcheur de la nuit, masqués, en se tenant à bonne distance des groupes voisins, ça n'est plus un festival estival. Un festival, c'est la communion d'une foule devant une scène, pas un concert symphonique avec un public sagement assis". Il espère maintenant obtenir un remboursement arguant que "les organisateurs n'auront pas le choix que de reprendre la billeterie de zéro, de faire une remise en vente des tickets". En effet, plus de 5000 billets par jour avaient déjà été vendus.
"Peur que la programmation ne soit pas alléchante dans ces conditions"
Raphaël est un habitué des festivals normands. Papillons de Nuit, Beauregard : il ne manque pas une occasion d'assister à ces journées et nuits de concerts en plein air depuis plus de dix ans. Depuis un an, la situation sanitaire engendre chez lui une vision à court terme. Il n'avait donc pas réservé de billets pour ces festivals, auxquels il n'ira pas. "Un Beauregard à 5000 personnes, clairement, il manquera quelque chose. Un festival, c'est une communion". Ce qui le gène le plus, c'est l'obligation d'être assis qui "enlève tout l'aspect libre". Il pointe également la difficulté de faire des rencontres en restant sur son siège. "Tu ne peux pas renverser ta bière sur ton voisin ou encore glisser dans la boue", plaisante-il. Plus concrètement, il craint surtout une dégradation de la qualité de la programmation musicale du festival.
"J’ai besoin d’être dehors et d’écouter de la musique. J’ai trop envie de retrouver un petit bout de ma vie d’avant.
Emilie a acheté deux pass vendredi-samedi-dimanche pour le festival Beauregard. Elle a prévu d'y aller avec sa meilleure amie, et compte bien maintenir ce programme, malgré les conditions dégradées. "Ce n’est pas trop dans l’esprit, mais c’est certain, j’irai quand même. Et même s’ils changent la programmation, j’y serai. Même si on ne peut pas boire de bière, je vais y aller". Emilie invoque un "besoin quasi-vital" de retrouver une once de "la vie d'avant". Peu importe si les tribunes sont clairsemées. "Si l'on est assis loin les uns des autres, ça n’aura pas le même goût, c’est sûr, mais je fermerai les yeux et me laisserai embarquer par la musique". Son inquiétude est désormais de s'assurer qu'elle pourra bien assister au festival. "S'ils ont déjà vendu plus de 5000 pass, qui y va ? Qui n'y va pas ? Est-ce qu’ils vont faire un tirage au sort si on est trop nombreux ? Des questions qui devraient rapidement trouver leurs réponses.
Sans le camping et son ambiance, 80% des gens n'iront pas aux festivals
Comme de nombreux aficionados des festivals de la région, Thomas est désabusé par la décision annoncée jeudi 18 février par le Gouvernement. Il estime que les dirigeants français sont passés à côté de la véritable problématique. "L'importance des festivals dans la vie des français, et notamment des jeunes, n'a pas été comprise, ni prise au sérieux. Ces évènements auraient pu être une réponse à la situation critique de détresse de la jeunesse". Celui qui participe à une demi-douzaine de festivals de la région chaque année regrette que la France n'ait pas autant anticipé que ses voisins européens. "Les Pays-Bas, l'Espagne et l'Allemagne ont déjà organisé des évènements tests depuis longtemps, parce qu'ils ont saisi que les festivals tenaient une part prépondérante dans la vie de la jeunesse". L'Ornais, proche de la trentaine, soulève aussi des questions non tranchées par le gouvernement, concernant les buvettes et restaurations et surtout les campings. "Sans l'ambiance camping, notamment dans les festivals ruraux comme Art Sonic ou les Papillons de Nuit, 80% des gens ne viendront pas. Certains ne viennent même que pour ça", certifie celui qui a pris pour habitude de monter avec ses amis une discothèque éphémère très prisée dans les campings des festivals auxquels il participe. En 2021, à moins d'un inattendu retournement de la situation sanitaire, il paraît peu probable qu'il puisse l'animer.