Pour acheter un chat ou un chien, plusieurs options sont possibles. Refuge, élevage, petites annonces : pas toujours simple de s'y retrouver dans une galaxie où éleveurs professionnels et amateurs gravitent. Le syndicat des professions des chats et des chiens demande d'interdire la vente d'animaux aux amateurs.
Les éleveurs professionnels de chiens et de chats de race sont en souffrance. Laurie Zaina élève dans le Calvados depuis 15 ans des chiens d'origine japonaise. Elle possède 15 Shiba et Akita.
Une situation de concurrence déloyale
Pour elle, les sites de petites annonces proposées par les particuliers constituent une concurrence déloyale pour la vente de ses chiens. "Comme la race que j'élève est très en vogue en ce moment sur les réseaux sociaux, j'ai plus de difficulté à les placer. Beaucoup de vendeurs les proposent sur LE Bon Coin par exemple et ils n'ont pas les mêmes charges que moi. Ça fait baisser les prix : aujourd'hui je dois vendre mes chiots 500 à 600 euros moins chers qu'avant", se désole l'éleveuse.
Même constat pour Ingrid Villette, passionnée de bergers allemands dans l'Eure. Depuis plus de 30 ans, elle a vu les réglementations évoluer pour les professionnels tandis que "les particuliers n'ont ni les mêmes charges ni les mêmes contraintes sanitaires : impôts, TVA à 20%, normes sanitaires, et classement ICPE - installation classée protection de l'environnement...". La liste des règles à respecter est longue en effet pour les professionnels. Actuellement, les particuliers qui vendent des chatons ou des chiots de race pour la première fois n'ont pas besoin d'obtenir un numéro de Siret.
Plus d'un million de chats et chiens proposés par des particuliers
Dans le pays, la grande majorité des compagnons à quatre pattes est proposée par des particuliers : 1 192 000 animaux selon une enquête du syndicat national des professions du chien et du chat. Anne-Marie Le Roueil sa présidente rappelle une étude réalisée sur un site de petites annonces qui propose le don ou l'achat de chiens et de chats : "plus de 83% des chiens et des chats dans les annonces sont identifiés par des non-professionnels." Ce qui signifie en creux que 17% seulement du marché est réservé aux professionnels.
Il ne faut pas oublier que les éleveurs professionnels font vivre des entreprises, qui elles-mêmes emploient des salariés.
Anne-Marie Le Roueil, syndicat des professionnels des chiens et des chats
Bien trop peu pour le syndicat qui souligne que la situation entre 2014 et 2024 est restée sensiblement la même. "Quand on nous dit que l'on gagne de l'argent sur le dos des animaux, c'est surtout un métier passion où l'on doit travailler 7 jours sur 7, sans week-end ni vacances!" s'insurge Anne-Marie Le Roueil.
Des annonces frauduleuses
Pourquoi demander la fin de la vente d'animaux par les particuliers ? L'idée, c'est de simplifier le marché pour éviter les fraudes. Certaines annonces de particuliers qui affichent un numéro de Siret (obligatoire pour pouvoir vendre des animaux qui ne sont pas certifiés de race) sont en réalité frauduleuses.
"Ces numéros quand on les vérifie renvoient vers des entreprises de plomberie ou des garagistes. Cela veut dire que la vente n'est pas déclarée légalement. D'ailleurs, parfois il est précisé que les chiots sont donnés alors qu'au premier coup de téléphone, on vous demande de l'argent en espèce", s'agace Laurie Zaina l'éleveuse d'Akita.
Professionnaliser la vente pour éviter de futurs abandons?
L'autre but affiché par les professionnels est de limiter les abandons. "La grande majorité des chiens ou chats que l'on retrouve abandonnés dans les refuges sont ceux qui ne sont pas issus d'élevages pros." Ce phénomène est lié à la proportion plus faible de chiens vendus comme pure race certes, mais pour les professionnels, cela serait évitable.
Acquérir son animal chez un particulier peut favoriser l'achat non réfléchi, le coup de coeur.
Ingrid Villette, éleveuse de bergers allemands
"Si cela se passe mal avec l'animal, le particulier n'acceptera pas de le reprendre, tandis que moi, comme professionnelle, cela m'est déjà arrivé de reprendre un jeune chien que je pensais pourtant avoir placé dans une famille adaptée" souligne Ingrid Villette. De fait, adopter un chien de race auprès d'un éleveur nécessite parfois de montrer patte blanche et de convaincre le professionnel que le chien grandira dans un milieu épanouissant.
Un professionnel peut refuser de vendre l'un de ses chiots
Laurie Zaina complète :"entre l'éleveur professionnel et l'adoptant d'un chien, la relation va dans les deux sens. Je m'interroge toujours pour déterminer si les candidats seront capables d'éduquer l'un de mes chiots. C'est une race à caractère fort, il faut être prêt à beaucoup s'investir dans l'éducation. Il m'est déjà arrivé de refuser de placer l'un de mes chiens parce que j'estimais que la personne n'avait pas choisi la race qui lui correspondait vraiment. En échange, l'acheteur peut attendre de ma part beaucoup d'aide et de conseils ."
Certains amateurs sont de bonne foi et élèvent une seule portée, dans les règles de l'art et pour l'expérience que cela représente pour toute la famille de voir naître des chiots ou des chatons.
"Mais dans ce cas, les chiots et chatons ne doivent pas être vendus" clôt Anne-Marie Le Roueil. La demande du syndicat trouvera peut-être une oreille favorable auprès des autorités.