L'historien normand Valentin Schneider lance un avis de recherche pour retrouver des clichés de Caen priss en 1941 et 1942 par Alois Raab, un soldat de la Luftwaffe. Des photos rares en couleurs qui montreraient les monuments de la ville avant les bombardements.
En 1988 était publié à compte d'auteur en Allemagne un petit livre bilingue de 85 pages intitulé "impressions normandes".
Il était signé d'Aloïs Raab, un ancien soldat de la Luftwaffe, enrôlé pendant la Seconde guerre mondiale dans une unité de transmission. Il a stationné en Normandie en 1941 et 1942, dans la région de Flers, puis de Caen.
L'historien normand d'origine allemande Valentin Schneider, dont la thèse a porté sur la présence allemande en Normandie de 1940 à 1948, a été intrigué par une mention du livre.
Aloïs Raab mentionne qu'il a donné un nombre important de photos en couleurs à la ville de Caen par l'intermédiaire d'un groupe de marionnettistes de Strasbourg pour les confier au syndicat archéologique de Caen.
Valentin Schneider
"Le problème, c'est qu'il n'y a pas de syndicat archéologique à Caen et qu'il n'y a aucune trace de ces photos, ni aux archives municipales, ni à l'association Cadomus, ni au Mémorial de Caen, regrette le Docteur en Histoire. Alors, je cherche d'autres pistes. Peut-être ne sont-elles jamais arrivées jusqu'à Caen et peut-être sont-elles toujours entre les mains de marionnettistes en Alsace ?"
Alois Raab, un soldat et un artiste
Né le 9 juillet 1911 en Bavière, Aloïs Raab, était un artiste. Aquarelliste, il partait à vélo, chevalet sous le bras, peindre la Normandie. "Il s'intéressait beaucoup à la Normandie, il écrivait une Histoire normande pour instruire les autres soldats et il a peint de nombreux monuments de Caen, comme l'église Saint-Pierre, l'abbaye-aux-hommes, l'église Saint-Jean, avec des détails, des croquis", précise Valentin Schneider. "Il a également dessiné une belle carte postale de la Normandie avec les lieux d'intérêt, et réalisé des aquarelles de paysage, comme à Saint-Germain le Vasson, Falaise, Lisieux ou Mortain."
De retour à la vie civile, Aloïs Raab a exercé le métier de marionnettiste en Bavière. Il a même créé un musée dédié aux marionnettes. C'est donc à des marionnettistes alsaciens qu'il aurait confié, vers la fin de sa vie, son fond de photographies en couleurs de Caen.
Des Caennais se souviennent de lui
Valentin Schneider a pu rencontrer ce jeudi 30 décembre Annick et Jacques, un couple qui a connu Aloïs Raab. Nés en 1938 et 1939, ils étaient très jeunes enfants à l'époque de l'Occupation allemande. Mais après la guerre, la famille d'Annick ayant gardé des liens avec Aloïs Raab, ils se sont rendus en Bavière visiter le musée de marionnettes. "Ils se souviennent de lui comme un homme chaleureux, très aimable, très cultivé et croyant", relate Valentin Schneider qui souligne que "cette histoire de liens entre Français et Allemands dans la sphère privée sous l'Occupation est passée sous silence." Annick et Jacques ont d'ailleurs toujours l'original de l'aquarelle du cloître de l'Abbaye-aux-hommes peinte par Aloïs Raab, et reproduite dans le livre.
Les photos, outil de propagande
"Beaucoup de soldats prenaient des photos, surtout au début de la guerre, explique Valentin Schneider. Ils étaient encouragés par la propagande allemande pour créer un lien entre le front et la patrie, car les photos personnelles avaient plus de crédibilité auprès de la famille et des amis que la propagande officielle."
Mais les photos d'Aloïs Raab présentent, elles, un intérêt particulier. "D'abord parce que c'est un artiste qui réalisait non pas des portraits mais des clichés des monuments historiques, cela donnerait donc une image précise de ces monuments avant leur destruction. Et puis, elles sont en couleurs, ce qui était assez rare à l'époque."
Si vous avez des informations sur les photos d'Aloïs Raab, n'hésitez pas à contacter Valentin Schneider : info@valentinschneider.eu