Le conducteur à l'origine d'un accrochage mortel entre un véhicule de "go-fast", convoi transportant de la drogue, et un motard des douanes, a réaffirmé ce mercredi n'avoir eu aucune conscience de l'accident devant la cour d'assises de Paris qui le juge.
Le drame s'ést produit le 24 mars 2011. Deux motards des douanes de Poitiers prennent en chasse une voiture pendant une dizaine de minutes, parfois à plus de 200 km/h. Ils poursuivent une puissante BMW qui a cherché à échapper à un contrôle sur l'A10. Après avoir percuté la voiture des trafiquants, Damien Rouillé sera éjecté de sa moto pour finir sa chute encastré dans le rail de sécurité.Zohire Zaafari, 34 ans, est accusé de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, mise en danger d'autrui et trafic de stupéfiants en bande organisée. Deux complices, qui étaient à bord d'une voiture "ouvreuse", comparaissent pour le seul trafic. Tous encourent 30 ans de prison.
"C'était un accident, je ne l'ai pas vu" a déclaré Zohire Zaafari, interrogé sur les circonstances de l'accident. Il a souligné que, se trouvant ralenti par des véhicules dans une zone de travaux, il ne pensait pas avoir été rattrapé par le motard. "Dès que j'ai pu j'ai déboîté (pour doubler à la fin de la zone de travaux) et à ce moment, je suis sûr qu'il (le motard) est très loin derrière", a-t-il dit.
Un bouclier pour les douaniers
En fait, le motard de 38 ans, père de deux enfants en bas âge, est tout près et est heurté par le flanc gauche de la voiture. L'accusé, qui explique n'avoir pas regardé dans ses rétroviseurs, affirme n'avoir rien senti ni entendu et s'être rendu compte de l'accident uniquement en voyant la moto renversée et sans pilote quelques instants plus tard. Il n'avait toutefois pas stoppé sa fuite, mais avait dû abandonner son véhicule endommagé quelques kilomètres plus loin avec les 420 kilos de résine de cannabis transportés. Il s'était rendu à la police après 10jours de cavale.
Un expert en accidentologie avait au contraire estimé mardi que la manoeuvre était volontaire, pour empêcher le motard de dépasser le véhicule. Interrogé par Me Ralph Boussier, avocat de la famille du douanier, pour savoir pourquoi il se refusait depuis quatre ans à dénoncer les commanditaires du trafic, jamais retrouvés, Zohire Zaafari a répondu craindre "pour ma femme et mes enfants".
"C'était un accident, je vous présente mes condoléances, je suis sincèrement désolé, je ne peux pas ramener votre mari, le père de vos enfants, je suis totalement responsable", a-t-il dit à la veuve du douanier, qui a ensuite témoigné dans une grande émotion de "l'anéantissement" de la vie de sa famille qu'a représenté ce drame.
Me Boussier a demandé à la cour une "décision qui doit être un bouclier pour ces douaniers qui se retrouvent en première ligne face à des gens sans foi ni loi", relevant la multiplication d'incidents et dénonçant dans ces convoyeurs de drogue "des gens prêts à tout pour passer".
Les réquisitions sont attendues demain jeudi, avant les plaidoiries de la défense. La cour est composée uniquement de magistrats professionnels, comme c'est possible en matière de grand banditisme.