Entre angoisse et attente, le difficile accès à la vaccination des personnes obèses

La vaccination par tranche d'âge ne permet pas aux personnes de moins de 50 ans atteintes d'obésité de se faire vacciner, tandis que les personnes obèses représentent 45% des personnes décédées du Covid, soit presque un mort sur deux. La Ligue contre l'obésité dénonce cette situation. 

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À Libourne, Jérome Bornerie, tente tant bien que mal de passer cette période sombre de Covid, malgré ses angoisses. Responsable logistique dans une entreprise viticole d'une cinquantaine de personnes, il stresse à chaque nouvelle alerte dans la société. "Je vois énormément de monde dans la journée, à chaque cas contact dans l'entreprise, je me demande si je ne vais pas l'attraper" dit il. 

Opéré d'une sleeve en 2018, il perd tout d'abord le poids qui l'éloigne de l'obésité morbide, puis se stabilise à grand renfort de sports et d'activités. Mais depuis le confinement, avec l'annulation des marches et randonnées organisées par l'association à laquelle il adhère (association Baria 33), ainsi que l'annulation des groupes de parole qui le remotivaient, la maladie le rattrape. Aujourd'hui, il a repris une quinzaine de kilos qui le mettent en danger.

À 50 ans, on peut se faire vacciner, mais pas avant

Résultat, depuis deux semaines, il se bat pour se faire vacciner, car Jérôme a 41 ans. Son premier coup de fil va à son médecin traitant, auprès de qui il espère avoir une attestation, qui lui est refusée. "Pas avant juin, juillet pour votre tranche d'âge", lui répond le practicien. Il contacte alors sa nutritionniste, qui lui parle du cas de deux de ses jeunes patientes en obésité morbides, elles aussi recalées. 

Puis il prend finalement rendez-vous dans un centre de vaccination via Doctolib "au culot" et verra bien s'il est finalement admis sans attestation et surtout sans avoir l'âge requis. "J'ai des amis qui sont allés dans ce centre, ils ne leur ont même pas demandé le formulaire de santé, on verra bien" dit-il.

Aujourd'hui, il ne comprend pas : "J'ai un collègue d'une trentaine d'années qui a été vacciné pour de l''asthme... je refais de l'apnée du sommeil et de l'hypertension et je ne rentre pas dans les cases".

 

Des inégalités territoriales

"Pas reconnues, pas soignées et désormais pas vaccinées", voilà la triple peine des personnes obèses, que dénonce Agnès Maurin, directrice de la Ligue contre l'obésité. En France, plus de 7 millions de personnes souffrent d'obésité, dont la moitié a moins de 50 ans.

Depuis un an, Agnès Maurin et la LCO ont pu faire bouger les lignes, pour faire accepter l'obésité comme faisant partie des critères à risque, tout d'abord pour des mesures de protection spécifiques dues au confinement (isolement et télétravail), puis pour la vaccination des plus de 50 ans. Mais il y a une ligne qu'elle n'arrive pas encore à faire bouger : étendre la vaccination à toutes les personnes en état d'obésité. 

Mais il y a une nouvelle qui la réjouit : "à Strasbourg depuis le week-end dernier, on peut se faire vacciner à tout âge, c'est un bon début". Car un centre de vaccination accepte désormais tout public en situation d'obésité. Une dérogation mise en place avec l'aval de l'ARS du Grand Est, mais qui n'a pas été généralisée sur tout le territoire. 

La ligue est à la fois contente que certaines personnes prennent les devants, mais très ennuyée, car c'est révélateur d'une inégalité sur le territoire français.

Agnès Maurin, Directrice de la Ligue contre l'obésité

Avec cette limite à 50 ans "On est en totale incohérence avec le calendrier vaccinal, l'obésité en soit est déjà une maladie, donc déjà un cas à risque" insiste-t-elle.

"Comment peut-on classifier l'obésité en Très haut risque, mais ne pas généraliser la vaccination ?". Agnès Maurin fait référence à la décision de la Haute Autorité de Santé du 27 novembre 2020, à la suite du conseil d'orientation de la stratégie vaccinale, de ne pas considérer les personnes obèses comme étant prioritaires à la vaccination, bien que considérées à très haut risque. 

Entre angoisse et parcours du combattant

De 9h à 17h, tous les jours ouvrables, Noelle Bastide, psychologue, répond à la ligne d'écoute mise en place par la Ligue contre l'obésité. 

"7 à 8 appels par jour concernent la procédure pour se faire vacciner" rapporte-t-elle, "et certains appellent pour me dire, ça y est c'est bon, et me donner leurs trucs".

Elle ne se cache pas d'inciter à faire du forcing auprès des professionnels de santé, dans la mesure où d'un médecin à l'autre et d'un centre de vaccination à l'autre, les considérations ne sont pas les mêmes. 

De nombreuses personnes sont dépassées par leur angoisse et me disent : c'était pas la peine de nous mettre vulnérables pour ne pas nous mettre en priorité !"

Noelle Bastide, psychologue

La psychologue, au bout du fil, entend de très nombreux appels de détresse et d'incompréhension. Elle tente de les faire relativiser, "mais ce n'est pas facile, quand soi-même, on ne trouve pas ça logique". 

→ Pour aller plus loin : Covid-19 : les personnes obèses de moins de 50 ans se disent oubliées de la vaccination (reportage France 2) 

 

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