Tous les musiciens écrivent une histoire intime avec leur instrument. Pour Patrice Veillon, c'est celle de ses chères guitares qu'il souhaitait conserver et transmettre. Il a donc créé ce carnet qui intéresse autant les propriétaires que les luthiers.
C'était une magnifique Gibson de 1936. C'était il y a plus de vingt ans, mais Patrice Veillon s'en souvient encore. Amateur de blues et musicien lui-même, le graphiste aurait bien voulu en savoir plus sur cette guitare.
"Je me suis demandé quelle était son histoire", explique le Rochelais. "Peut-être que Robert Johnson en avait joué !"
Il n'a jamais su si le mythique bluesman américain avait effectivement pu titiller ces cordes à Greenwood sur le bord du Mississipi. Mais ainsi est née l'idée du Pass'Guitar.
"Les belles guitares ont une longue vie"
"Ce que je voulais, c’est une traçabilité, quelle est son pédigrée avec ses caractéristiques, ses cotes, tout ce qu’il faut savoir sur cette guitare", continue Patrice. "Et puis il y avait une deuxième partie pour les propriétaires parce que les belles guitares ont une longue vie et peuvent se transmettre. On peut noter sur ce carnet des souvenirs, des faits marquants liés à cette guitare, y mettre des photos et c’est ça qui donne une valeur ajoutée, tout ce vécu de la guitare. Et puis le plus important, c’était l’espace "entretien" pour les luthiers, pouvoir noter toutes les interventions et réparations réalisées sur l’instrument".
C'est dans l'atelier de Sylvain Zbinden, à deux pas du vieux port de La Rochelle, que Patrice Veillon nous avait donné rendez-vous pour présenter son Pass'Guitar. L'auteur-compositeur Laurent Lamarca nous avait aussi rejoint, avec sa guitare évidemment. Depuis son passage aux Francofolies en 2011, le musicien a fait son petit bonhomme de chemin avec deux albums et des collaborations multiples avec Francis Cabrel, La Grande Sophie ou Ben Mazue.
"On passe du temps avec, on s'y attache"
"Moi, je sais que j’ai une vieille Gibson qui est en piteuse état, que j’avais déjà fait réparer par un luthier et, quand j’ai dû la confier à Sylvain, je ne pouvais pas lui dire ce qui avait été fait dessus", nous confie Laurent. "Mais rien que pour l’histoire de la guitare, c’est important. On passe du temps avec, on s’y attache. J’écris beaucoup de chansons, toujours une guitare dans les mains, donc c’est difficile de se séparer d’une guitare. Si j’en prends une, c’est qu’il y a une rencontre et que je suis un peu tombé amoureux."
Pour Sylvain Zbinden aussi donc ce petit carnet est plus que précieux.
"Quand je fais de la restauration, je peux me trouver par exemple devant des fissures et je ne sais pas comment elle a été réparée, comment elle a été colée. Comme quand on fait un reset neck, quand on enlève le manche et qu’on le recolle, parfois je me pose des questions mais si tout est écrit dans le carnet, on gagne une étape énorme."
Neuves ou d'occasion, il se vend près de 700 000 guitares en France chaque année. Parmi elles, des guitares de collections ou de luthier qui, toutes, ont une histoire à raconter. Si ça se trouve, Robert Johnson a joué un jour sur la vôtre.