Limousin : Le difficile déconfinement du sport au collège

L'EPS (éducation physique et sportive) est forcément l'une des matières scolaires les plus impactées par le confinement, puis par les nouvelles règles sanitaires lors du retour à l'école. En Corrèze, les professeurs de sport tentent de s'adapter.

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Exit les ballons, balles et autres raquettes. Sports de contact ou de combat prohibés. Pas de sports collectifs non plus et des gymnases désespérément fermés. Dans ces conditions, pas tous les jours facile d'être prof d'EPS au collège ! 

"On fait plus de la garderie sportive que de la vraie éducation physique", se désole Nicolas Martinie, professeur au collège Jean-Lurçat de Brive. "C'est super frustrant de se lever le matin, nos collègues de Français par exemple, peuvent faire leurs cours quasi normalement, nous pas du tout. Mais notre matière n'est pas la priorité du moment, on le sait."

Les consignes de L'Inspection d'Académie sont tombées au fur et à mesure, réduisant tous les jours un peu plus le champ d'activités possibles. Tous les programmes prévus en début d'année scolaire ont bien sûr été annulés. "On s'adapte", confirme Nicolas. "Hier, avec mes 5èmes et aujourd'hui avec mes 6èmes, nous sommes allés au Parc des Bouriottes (plaine des jeux entre Brive et Malemort) pour de la course d'orientation. On a installé un parcours semi-permanent, mais même là, il faut penser à tout. Comme aux photocopies (noir & blanc, question de budget...) de cartes pour chaque élève, ou aux plots qu'il faut désinfecter à la moindre suspicion de contact avec un élève."

Un protocole sanitaire spécifique pour l'EPS a été mis en place. "C'est compliqué à la fois pour nous et pour les élèves. Le côté ludique nous manque beaucoup, par exemple", poursuit Nicolas Martinie. A partir du 2 juin, l'accès aux gymnases pourrait être de nouveau autorisé, dans le respect des distances sanitaires, bien sûr. Mais en attendant, les cours sont donc exclusivement en extérieur. En cas de pluie, ce sera en salle de classe pour visionner des vidéos ou des exposés sur la culture sportive.

Pendant le confinement, Nicolas et ses collègues ont tenté de garder le contact avec leurs élèves. "40 à 50% d'entre eux nous ont renvoyé les fiches de suivi, pour les autres on ne sait pas." À Jean-Lurçat, 97 élèves de 6ème et 5ème ont fait leur rentrée cette semaine, sur un effectif total de 350. "Ceux qui sont revenus ne sont pas trop rouillés, certains m'ont même avoué qu'ils avaient fait plus de sport que d'habitude pendant le confinement ! À se demander à quoi on sert", conclut Nicolas Martinie dans un sourire.


Incompatibilité entre effort et port du masque


Pour quiconque a déjà essayé, il paraît évident qu'il est impossible de garder son masque quand l'intensité de l'effort augmente un tout petit peu. Les élèves sont supposés porter un masque pour se rendre en cours, puis l'enlever en cas de course s'ils sont bien espacés de 10 mètres, puis en remettre un propre en quittant le cours. Seule la marche semble compatible avec le port d'un masque.

Professeur au collège privé Notre-Dame de Brive, Jérôme Loppin revient d'un cours à Bahuet avec ses 5èmes : "on profite de l'espace de la grande cour, puisque les lycéens n'ont pas encore repris." Au menu de ce cours de reprise, un jeu de l'oie amélioré. À chaque case son exercice individuel, pompes, gainage, abdos... "Sans trop d'intensité", précise Jérôme. Pendant le confinement, ses élèves recevaient deux défis chaque semaine, "pour conserver une petite activité physique. On a même établi un classement entre les classes, histoire de les motiver !"

A présent mon objectif c'est de les remettre en forme doucement, j'ai l'impression qu'ils sont un peu rouillés !

Arsène, 12 ans, est justement en 6ème à Notre-Dame et a donc eu droit à son jeu de l'oie du corona ! "Sur nos 2h de cours d'EPS, nous avons passé la première à parler de ce qu'on avait fait comme activité physique pendant le confinement, puis nous sommes déscendus dans la cour, en gardant toujours un mètre de distance entre nous. Pour le jeu de l'oie, le prof lançait le dé et nous devions faire l'exercice correspondant à la case, 20 flexions, 10 fentes... malgré les gestes barrières, c'était assez sympa quand même pour nous défouler !"


Pendant le confinement, Arsène a fait du sport "presque tous les jours" seul ou en famille. "J'ai essayé de varier les plaisirs, cardio, muscu, un peu de footing ou du foot et du rugby avec mes frères." Pas de quoi toutefois compenser l'arrêt des compétitions pour le jeune licencié du CAB. "Ca me manque vraiment, avoir le ballon en main, les émotions, les contacts."

Au collège, Arsène fait donc contre mauvaise fortune, bon coeur. "Je ne savais même pas s'il y aurait bien des cours d'EPS, alors même 1h dans la cour j'ai trouvé ça bien, de bouger avec d'autres personnes que la famille." D'autant que pour les prochaines séances, les élèves ont été associés à la réflexion. "Les profs nous ont demandé si on avait des idées pour réinventer un peu la pratique de chaque sport. Peut-être que par exemple, on pourra faire de la course d'orientation dans les bois en imprimant les cartes chez nous", conclut le rugbyman en herbe, plein d'espoir. 

Nathan, lui, est en Seconde à Limoges. Comme tous les lycéens, il n'a pas encore repris le chemin de son bahut, mais reçoit chaque semaine de la part de son prof d'EPS, des exercices particulièrement détaillés, où il doit, entre autres, relever l'évolution de sa fréquence cardiaque ! "J'ai essayé de suivre le programme, réussi je ne sais pas, mais en tout cas j'ai essayé ! C'est un peu compliqué, je dois faire du sport dans une pièce de 10m2, en essayant de m'aider d'objets récupérés un peu partout dans la maison. Par exemple, j'ai dû trouver de quoi faire une marche pour poursuivre nos cours de step !" 
 


Pas de quoi effrayer ce gaillard de 15 ans qui joue aussi au rugby en club, et qui a même réussi à perdre quelques kilos pendant le confinement.  la base j'aime bien l'EPS, mais là c'est un peu beaucoup, surtout avec la somme de travail à faire dans toutes autres matières", précise-t-il. Pas simple de trouver le bon dosage à distance. Dans certains établissements de la région, certains ont même tenté des cours par visioconférence !
 

L'UNSS réduite à peau de chagrin


C'est l'activité du mercredi pour de nombreux collégiens et lycéens, l'Union nationale du sport scolaire est comme l'EPS en jachère en ce moment. Mêmes règles, et donc même litanie d'interdictions. Tous les championnats et autres compétitions sont arrêtés depuis la mi-mars. "Nous avons dû renoncer au challenge national de kick-boxing prévu à Bugeat du 11 au 13 mars", explique Philippe Gautier, responsable de l'UNSS en Corrèze. "C'était avant même le confinement, mais plusieurs chefs d'établissement nous avaient prévenus qu'il n'enverraient pas d'équipe dans ces conditions."

Même avec un gros effort d'aménagement, toutes les animations départementales prévues semblent pour l'instant compromises, également à cause des problématiques de transport. "On espère que courant juin, certaines activités redeviendront possibles. Là, on attend que la rentrée soit effective pour tout le monde pour prendre la température, sachant que les principaux et les proviseurs seront les décideurs, puisqu'ils sont, de fait, présidents des associations sportives de leurs établissements", poursuit Philippe Gautier.

À l'heure actuelle, les seules activités compatibles sont celles individuelles, en pleine nature, comme la randonnée, la marche nordique ou la course d'orientation, avec pas mal de mise en place préalable. Canoë ou VTT seraient envisagés, si le jeune peut, par exemple, venir avec son vélo personnel. Dans tous les cas, l'effort doit rester modéré.

"Avec l'ensemble des collègues, qui sont avant tout des pédagogues, nous espérons pouvoir proposer des animations physiques et sportives, à défaut de véritable sport. Elles permettraient aux jeunes de reprendre goût à l'activité encadrée, de leur redonner un peu de plaisir et de les remettre en contact avec la vie sociale en dehors des salles de classe", conclut Philippe Gautier.

Des journées qui pourraient être organisées fin juin, si le monde du sport parvient à slalomer entre les offensives du virus.
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