Coronavirus : le plateau de Millevaches globalement préservé

Il arrive qu'il souffre de son isolement mais c'est parfois un atout, notamment en période de confinement. Sans cas grave pour le moment, le plateau de Millevaches, en Limousin, fait figure d'îlot préservé. Pourtant les professionnels de santé restent vigilants.

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Actuellement notre priorité, c'est de ne pas être vecteurs de contamination

Thomas Droz, fait partie du cabinet d'infirmiers libéraux de Royère de Vassivière (avec ses confrères Sylvain Buffet, Fabien Langlois et sa consœur Coralie Iribarne). A quatre, ils se répartissent un grand territoire et visitent chaque jour 70 à 80 patients. Essentiellement des personnes âgées. "Elles sont très anxieuses. On essaie de les protéger un maximum. On fait de la pédagogie. "
Pas facile car si les masques ne manquent pas, tout le reste fait défaut. Pas de gel, pas de surblouse, peu de protections.

Tout ce que nous avons pu avoir pour le moment ce sont des tabliers de boucher ! 

Heureusement le Plateau semble plutôt épargné pour le moment

"Les cas que nous avons eu étaient importés. C'est la vague d'arrivants qui a précédé le confinement. Nous avons vu les maisons se rouvrir. Pour protéger nos patients nous avons d'ailleurs refusé de prendre en charge cette population. Ceux qui ont été infectés n'ont pas eu de symptômes graves, nous pouvions donc nous contenter d'un balluchon de Doliprane et d'antibiotiques déposé devant chez eux."

Une impression confirmée par Antoine Prioux, pharmacien à Bugeat, membre du réseau Mille soins.

"Il n'y a pas de cas confirmé sur le plateau. La plupart des cas suspects se sont avérés négatifs. Il faut rester optimiste. Nous avons eu le temps de nous préparer à faire face. Nous avons mis en place une organisation à optique préventive."
 

Grâce au système de partage d'information sur les dossiers de patients entre tous les professionnels de santé, le pharmacien peut anticiper les renouvellements d'ordonnances pour les malades chroniques. Un système de livraison des médicaments a d'ailleurs été mis en place pour desservir ceux qui sont isolés. Un gros défi logistique dans le secteur de la montagne limousine. Cette relative tranquillité est aussi appréciée par le maire de Royère de Vassivière.

Nous n'avons pas de cas l'EHPAD, et c'est déjà très bien et très rassurant. Les résidents sont bien protégés.

En revanche,  si l'établissement est bien équipé par des masques, l'élu ne décolère pas car la commande qu'il a passé via le département il y a quinze jours n'est toujours pas arrivée. "Nous en avons commandé 1 000 et nous étions prêts à les distribuer nous même à la population" explique Raymond Rabeteau,"nous souffrons plus de l'organisation contre le Covid que du Covid lui-même".

Un calme apparent qui ne doit cependant pas masquer certaines difficultés, dont certaines, effets collatéraux, peuvent s'avérer graves.

"Nous faisons face à la paralysie du système de santé qui touche nos malades chroniques. Beaucoup ont loupé les rendez-vous qu'ils avaient pris chez les spécialistes. Des rendez-vous souvent pris plus d'un an à l'avance et malheureusement annulés. Seules les urgences sont maintenues, mais ça peut poser problème. Si une insuffisance rénale se déclare actuellement, pas moyen de voir un néphrologue. Certaines séances de chimio ont été repoussées et des protocoles repoussés. On en mesurera peut-être l'effet plus tard."

Un état de fait très anxiogène pour les patients qui ne savent plus sur quel pied danser. Soit ils ne veulent simplement plus se rendre dans un établissement de santé par peur de contracter la maladie, soit ils sentent que quelque chose ne va pas mais ne peuvent pas aller à l'hôpital.

Un constat d'autant plus préoccupant que cette zone est particulièrement sensible en terme de maladies chroniques, ce qui avait conduit l'ARS à lancer un plan pour améliorer le dépistage et la prise en charge des patients.

Le calme avant la tempête ?

Enfin, ce que redoutent particulièrement les soignants, c'est la fin du confinement. Vraisemblablement, le virus ne s'est que très peu propagé dans notre région et peut-être d'autant moins sur le Plateau. Ce qui fait craindre un retour de bâton si le déconfinement est trop rapide.

"Nous craignons vraiment un relâchement alors que l'épidémie va durer plusieurs mois. Elle n'a peut-être pas vraiment débuté chez nous. Si les grandes villes sont déconfinées, les gens auront peut-être envie d'aller à la campagne…"

…Et apporter avec eux le virus au sein d'une population particulièrement fragile. C'est ce que craint aussi Thomas Droz :

Les perspectives ne sont pas joyeuses du tout. Il y aura certainement une deuxième vague. Nous avons heureusement gagné du temps. Le confinement est arrivé peut-être un peu tard en ville, mais au bon moment chez nous. Il faudra peut-être se poser la question de maintenir confinées chez elles les personnes âgées et/ou fragiles…

Ce qui fera peut-être naître une situation tendue chez les infirmiers libéraux en milieu rural touchés par une réforme dont l'application ne pouvait pas arriver plus mal : le plafonnement des indemnités kilométriques. A partir du 31 mars 2020, leurs frais kilométriques ne sont plus pris en charge qu'à hauteur de 50% à partir de 300 kilomètres par jour et disparaissent totalement au-delà de 400 kilomètres. "C'est une perte de 125 à 140 euros par jour puisque sur le plateau nous pouvons faire jusqu'à 600 kilomètres dans la journée" appuie Thomas Droz. 

A la fin de la crise, la révision des priorités budgétaires de la Nation promise par le gouvernement permettra peut-être de jeter un regard neuf sur cette question... 






 
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