La députée socialiste des Deux-Sèvres et ancienne ministre, Delphine Batho, veut interdire à tout député d'exercer une fonction de conseil pour "protéger" de "tout lien d'influence ou de dépendance vis-à-vis d'intérêts particuliers".
Delphine Batho a déposé une proposition de loi organique hier mercredi en pleine affaire Fillon. Dans son article unique visant à modifier le Code électoral (article LO146-1), ce texte, qui doit être enregistré formellement le 15 février, stipule: "Il est interdit à tout député d'exercer une fonction de conseil".
Si des textes encadrent déjà les incompatibilités, "d'importantes failles subsistent", notamment "l'exercice par les députés, pendant leur mandat, de la fonction de conseil pour des intérêts privés, comme en témoignent de récentes révélations", note la députée des Deux-Sèvres dans son exposé, dans une allusion à François Fillon et à sa société de conseil 2F.
Une atteinte grave aux règles de déontologie
Pour cette ancienne ministre, qui dénonce depuis longtemps le poids des lobbies, l'exercice de la fonction de conseil "constitue une atteinte grave aux règles d'intérêt général, d'indépendance et de probité" prévues dans le code de déontologie des députés.Mais la rédaction actuelle du code électoral, selon laquelle "il est interdit à tout député de commencer à exercer une fonction de conseil qui n'était pas la sienne avant le début de son mandat", a laissé subsister une ambiguïté, selon l'élue PS des Deux-Sèvres.
Et de glisser, sans nommer François Fillon mais dans une référence claire, que "cette brèche n'a pas manqué d'être utilisée par exemple par un candidat aux élections législatives, qui a fondé une société de conseil cinq jours avant son élection comme député".
Non seulement "l'intention initiale du législateur de ne pas interdire une activité professionnelle (...) exercée de longue date est ainsi détournée", aux yeux de Mme Batho, mais la fonction de conseil, exercée auparavant ou non, "peut être un moyen pour des représentants d'intérêts privés de s'acheter la collaboration d'un parlementaire dans l'exercice de son mandat, autrement dit de le corrompre".
Sans compter que la fonction de conseil peut servir à enfreindre d'autres règles du code électoral, selon lesquelles "des fonctions conférées par un Etat étranger ou une organisation internationale et rémunérées sur leurs fonds" sont aussi incompatibles avec le mandat de député, a relevé la députée socialiste.
Aux prises avec des accusations d'emplois fictifs de son épouse et de deux de ses enfants, François Fillon fait aussi l'objet d'attaques
de plusieurs adversaires politiques sur sa société de conseil "2F Conseil", créée en 2012 au sortir de Matignon. Selon des révélations du Canard enchaîné, cette société lui aurait permis de toucher 757.000 euros de revenus nets depuis cette date.