Dans une décision rendue publique ce jeudi, la Cour d'Appel de Bordeaux confirme la suspension de l'arrêté pris par la maire de Pas-de-Jeu (Deux-Sèvres) interdisant aux poids-lourds la traversée de sa commune. Près de 1.000 camions passent par le village chaque jour, parvenant à peine à se croiser.
"Je suis dépitée", lâche Marie-Antoinette Dain, conseillère municipale à Pas-de-Jeu (Deux-Sèvres) à la lecture de la décision de la Cour d'Appel de Bordeaux qui vient de confirmer la suspension de l'arrêté pris début juin 2022 par la mairie pour interdire la traversée de la commune aux poids-lourds de plus de 3,5 tonnes.
Selon cette conseillère municipale qui suit le dossier, la portée de l'arrêté de la mairie a été jugée "disproportionnée" par la justice.
La Cour d'Appel de Bordeaux se prononçait sur la recevabilité de la suspension de l'arrêté par la préfecture des Deux-Sèvres et non sur le fond du problème (les nuisances causées par les flux de poids-lourds).
Incroyable qu'il n'y ait pas eu de morts !
"On nous dit que si les nuisances causées par les passages incessants des poids-lourds sont importantes, le préjudice créé à la liberté du commerce en interdisant le passage des poids-lourds est plus important", explique-t-elle, circonspecte.
Ce qui est affligeant dans ce dossier, c'est que personne ne s'est déplacé pour comprendre la problématique de Pas-de-Jeu.
Marie-Antoinette Dain, conseillère municipale
Depuis des mois, le passage des poids-lourds perturbe fortement la vie de la commune. Les comptages effectués évaluent à un millier le nombre de camions qui traversent chaque jour Pas-de-Jeu. "Les poids-lourds peinent à se croiser" dans certaines des rues étroites du village, causant parfois de sérieux dégâts. "C'est incroyable qu'il n'y ait pas encore eu de morts", lance Marie-Antoine Dain !
La municipalité dénombre ainsi une toiture de maison en partie arrachée par le passage d'un poids-lourd. Un peu plus loin, elle recense un mur démoli par un camion ayant manqué un virage. Il y a aussi ceux qui se renversent ou se mettent en portefeuille. Et, surtout, les habitants ne supportent plus le bruit incessant occasionné par le passage continu des véhicules.
Une "victime choisie"
Les améliorations proposées à la commune laissent la conseillère municipale perplexe. "La solution, nous dit-on, serait d'installer des feux de circulation", lâche-t-elle en retenant un rire. Puis elle précise : "Il y a plusieurs endroits dans la commune où les camions ne peuvent pas se croiser. Alors, mettre des feux va occasionner des queues incroyables et les habitants ne pourront plus sortir de chez eux. Niveau sonore, les freinages, les redémarrages, vont occasionner des nuisances en plus !"
"Ce qui est affligeant dans ce dossier, poursuit Marie-Antoinette Dain, c'est le fait que parmi toutes les parties prenantes, la justice, le département, la préfecture, personne ne s'est déplacé pour comprendre la problématique de Pas-de-Jeu !"
Pour cette élue locale, la commune apparaît comme "la victime choisie" de ce problème de circulation, alors que, selon elle, "il existe d'autres itinéraires possibles". "On avait d'ailleurs déposer tous ces éléments en annexe au dossier", poursuit-elle.
La municipalité de Pas-de-Jeu attend désormais de pouvoir débattre devant la justice sur le fond du dossier, ce qui devrait être le cas dans un délai de six mois.