La société Photosol veut installer un parc de panneaux photovoltaïques sur 182 122 m2 de surface à Sigoulès en Dordogne. Sur un terrain privé. Une aberration pour un collectif de riverains qui dénonce un projet trop visible, trop proche des habitations et d'un monument classé.
"Voilà l'église de Monbos, c'est une pièce extraordinaire du patrimoine français, elle pourrait être classée au patrimoine mondial".
Thomas Hettlage ne peut pas concevoir qu'un immense champ de panneaux photovoltaïques soit implanté à quelques centaines de mètres de ce petit bijou de l'art pré-roman. "C'est une aberration ! 18 hectares c'est énorme !" dénonce t-il.
Ce retraité allemand installé à Sigoulès a pris la tête de l'association des amis de l'église de Monbos.
"Installer un tel site industriel à près de 500 mètres d'un édifice classé, alors que le périmètre protégé s'arrête à 500 mètres, est absolument contraire à l'esprit de préservation du patrimoine" plaide t-il.
Le groupement des riverains des Renardières, lieu-dit du projet, dénonce lui aussi le risque de dévalorisation du patrimoine local. "Qu'une installation industrielle ayant un impact lourd sur le paysage soit possible à seulement 501 m d'un bâtiment classé va à l'encontre de l'esprit de cette réglementation" a t-il écrit à l'attention du commissaire enquêteur chargé de l'enquête d'utilité publique.
Autre crainte : l'impact sur le tourisme. "L'attractivité touristique que suscite le site classé pourrait en être affectée" redoute le collectif.
Un projet qui permettrait de fournir 12,5 MWc d'énergie verte
C'est la société Photosol, l'un des leaders français de la production d'énergie photovoltaïque qui porte ce projet. Elle compte implanter 27 840 panneaux d’une puissance totale de 12,5 MWc sur une surface globale clôturée de 17,9 ha.
Le dossier de demande de permis de construire
Deux postes transformateurs sont également prévus pour récupérer le courant continu produit et le transformer en courant alternatif en vue de fournir une partie de la région.
Ces panneaux, inclinés de 20°, avoisineraient les 3 mètres de hauteur.
Ce parc viendrait s'ajouter aux 3 577 autres installations que compte le département de la Dordogne dont la puissance totale s'élève à 77 MW selon Photosol qui s'appuie sur les chiffres établis au 31 mars 2019 par le commissariat général au développement durable.
Il serait implanté sur un vaste champ, ancienne terre agricole transformée en zone habitable, qui jouxte un lotissement récent.
Chantal Chassaigne y réside. "J'ai beaucoup réfléchi, je me suis renseignée et je suis tout à fait pour" dit-elle.
"J'y suis favorable dans un but écologique, il faut évoluer avec notre temps et je ne pense pas qu'il y ait vraiment de nuisances. Il faut bien les installer quelque part ces parcs photovoltaïques pour en profiter. Ils vont permettre d'apporter de l'électricité à toute une partie de la région".
La société Photosol assure que des haies seront plantées tout autour pour éviter une pollution visuelle et que l'impact environnemental sera limité.
Une position contredite par le groupement des riverains. Il souligne que le projet arrive sur un site naturel doté d'une riche biodiversité. "L’aménagement du site en parc photovoltaïque va dégrader l’environnement et réduire cette biodiversité dont l’existence de plusieurs espèces rares ou protégées".
"La population n'est pas bien informée" regrette Thomas Hettlage. "En ce moment (crise sanitaire oblige) on ne peut pas organiser de réunion publique, c'est assez malin de leur part de mener l'enquête d'utilité publique pendant cette période".
L'enquête d'utilité publique a été prolongée jusqu'au 26 mars. A l'issue de la procédure, c'est la préfecture qui donnera ou non le feu vert au permis de construire.
Voir le reportage de Philippe Niccolaï et Pascal Tinon: