"C'était un monstre à 19 ans" : il découvre que l'ami de la famille était un ancien membre de la Gestapo

Le Vendéen Frédéric Albert a fait cette découverte après la mort de l’ami de sa famille, Paul Pradier. Ce dernier était dans sa jeunesse un redoutable agent du Sipo-SD, sévissant en Dordogne en 1944. Après des mois d'enquête, il publie un livre sur l'obscur passé du Périgourdin, "Le dernier Gestapo".

Quand Paul, le grand ami de la famille, décède à 93 ans, Frédéric Albert ne sait pas qu'il a côtoyé toute sa vie un membre redoutable de la Gestapo. Probablement le dernier qui ait sévi en Dordogne.

"Un monstre à 19 ans"

Paul Pradier est né à Montagrier en Dordogne dans une famille d'agriculteurs. Il a passé la fin de sa vie en Vendée, dans l'anonymat le plus total. Le retraité est mort d'une infection pulmonaire en 2018. En contactant un de ses neveux pour lui annoncer son décès, Frédéric Albert entend parler "de guerre" et "de prison". Intrigué, il va s'intéresser au passé caché de l'ami de sa famille qu'il croyait connaître...

Dans un livre sur la Seconde Guerre mondiale en Dordogne, Frédéric Albert va trouver le nom de Paul Pradier, milicien originaire de Montagrier. Après des mois d'enquête, il découvre le côté sombre de celui qu'il considérait comme un grand-oncle. Le tableau fait froid dans le dos : à 19 ans, Paul Pradier faisait partie de la Sipo-SD, un service de renseignement de la SS. Il a participé à des massacres comme celui du 12 juin 1944 à Antonne-et-Trigonant où une stèle a été érigée en mémoire des victimes. "C'est assez émouvant de venir ici, sachant que Paul Pradier était ici, il y a 80 ans", raconte Frédéric Albert devant le monument aux morts de la commune.

Frédéric Albert découvre en plus que Paul Pradier était un membre actif et redoutable, au service de la Gestapo. "Il infiltrait des maquis et renseignait les Nazis". En 1943, Paul Pradier dirigeait des soldats allemands chargés d'arrêter une famille juive à Périgueux.

Les gens sont sidérés, car on ne peut pas imaginer ce petit bonhomme que l'on a connu âgé et qui était un mec sympa et jovial, qui là devient un monstre à 19 ans !

Frédéric Albert,

auteur du livre "Le dernier Gestapo"

VIDÉO. Voir le reportage sur le passé de Paul Pradier, milicien de la SS en 1944 en Dordogne ►►

durée de la vidéo : 00h02mn32s

Reportage de B.Lasseguette et de Pascal Tinon. Frédéric Albert a côtoyé pendant près 40 ans un ancien collabo membre de la Gestapo. Le Périgourdin, aujourd'hui décédé, était devenu un ami de la famille vendéenne. C'est à sa mort que Frédéric Albert a appris l'insoutenable vérité. Après des mois d'enquête, il publie un livre : "Le dernier Gestapo". • ©France 3 Périgords

Un redoutable milicien de la Gestapo

Lors de son enquête, Frédéric Albert va interroger l'historien périgourdin Patrice Rolly qui lui donnera des précisions. Paul Pradier est responsable de la déportation de plusieurs personnes. Il a participé à l'attaque du maquis de Durestal et au massacre des Piles. 

Arrivé à Périgueux à 17 ans, il sera recruté par la Gestapo qui siégeait dans les locaux actuels du Crédit Lyonnais. "Il était très efficace dans ce qu'il faisait. C'est pour cela qu'on lui donne une carte de policier allemand, membre du Sipo-SD. Et il devient très actif", précise Frédéric Albert qui raconte tout ce sombre passé dans son livre.

À la fin de la guerre, Paul Pradier fuit avec les Allemands. Il sera condamné à mort par la justice française à deux reprises. La peine sera commuée en prison à perpétuité. Il en sortira au bout de dix ans. Il sera très discret sur sa vie, jusqu'à sa mort.