On leur propose 500 euros par mois pour l'installation d'éoliennes sur leur terrain, une offre difficile à refuser dans un monde agricole en crise

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Vent de discorde contre ce nouveau projet d'éoliennes en Dordogne, des installations géantes dans une zone inadaptée selon les opposants ©France 3 Périgords -Thibault grouhel & Anne-Laure Meyrignac

Le projet d'une dizaine d'éoliennes en Périgord Noir, à quelques kilomètres de Sarlat, révolte des riverains. Ils y voient un véritable non-sens. Mais les partisans du projet ont aussi des arguments, notamment financiers, qui se défendent.

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Les projets d'éoliennes soulèvent décidément bien des oppositions, et en Dordogne particulièrement. Cette fois, c'est autour de la petite commune d'Orliac, en Périgord noir, que la tempête s'est levée. Le scénario est connu. Un opérateur étranger, Iberdrola, un leader espagnol du marché déjà positionné en Nouvelle-Aquitaine sur des projets éoliens ou solaires, repère un lieu encore vierge. Il entame alors des démarches pour "tâter le terrain" dans l'éventualité d'une implantation.

Vent contraire

Mais le scénario est également bien rôdé chez les opposants. Des riverains, alertés par les nombreux précédents, ont organisé une résistance préventive. Le collectif Vent debout Périgord noir regroupe des habitants des environs, et notamment de la commune voisine de Doissat, depuis fin août dernier. Le conseil municipal s'est même prononcé contre ce projet d'une dizaine d'éoliennes, avoisinant les 200  mètres de haut.

Mats campagnards

Les arguments sont classiques : le risque de voir ruiner la qualité de vie dans un cadre préservé. Le lieu, très touristique, est niché dans le Périgord noir, à quelques encablures de Belvès et Villefranche-du-Périgord, à une trentaine de kilomètres de Sarlat, des joyaux touristiques. Un environnement calme et naturel, loin des axes, des villes et des pollutions diverses.

L'éolienne, c'est officiellement 150 mètres, mais ça peut monter à 240 mètres. Donc, vous imaginez, là, c'est plein ciel. Tout l'horizon va être occupé par des éoliennes !

Nicolas Schneider

Opposant au projet

Rationalité, esthétisme et mercantilisme

Le collectif dénonce un " projet dénué de toute rationalité économique et susceptible de s’implanter dans une zone protégée" et fustige "les visées mercantiles d’une société sans scrupules qui, depuis deux ans et dans le plus grand secret, a fait miroiter, de manière indifférenciée, l’obtention de revenus substantiels à une poignée de propriétaires terriens afin de leur arracher une promesse de bail.

Les problèmes se ramassent à la pale...

Le collectif affirme même qu'en cas d'incendie ces pylônes gêneront les opérations aériennes "sur plusieurs centaines d'hectares". A cela s'ajoute un impact sonore et même visuel, la nuit, avec les puissants flashes de signalisation, sans oublier la faune, avec les oiseaux migrateurs qui risquent la collision. Bref, ils disent non en bloc à ceux qu'ils appellent les "bétonneurs du ciel".

"Je ne suis pas opposé à l'éolien, je suis pour les énergies renouvelables, assure Nicolas Schneider. Mais l'éolien ici, c'est terrible, d'abord d'un point de vue des risques d'incendies, mais aussi pour l'impact visuel".  

Je préfère voir des peupliers que des éoliennes !

Nicolas Schneider

Opposant au projet

Des sous pour du vent

Reste qu'Iberdrola ne vient pas qu'avec du vent dans les mains, il y a aussi des sous. Christian Ventelou, maire d'Orliac, est lui-même propriétaire d'un terrain, pour lequel il a signé une promesse de bail contre un petit loyer si le projet devait se faire.
Avec son premier adjoint, lui aussi propriétaire-signataire, il a invoqué son droit de retrait et missionné le second adjoint prendre le dossier en charge au nom de la commune, pour éviter d'être accusés de conflit d'intérêt. Ce qui ne l'empêche pas de livrer son point de vue en tant que maire, mais aussi en tant qu'agriculteur en difficulté.

Je pense que si les gens gagnaient correctement leur vie, s'ils avaient des retraites correctes et qu'ils puissent vivre comme il faut, peut-être qu'ils ne signeraient pas pour avoir des éoliennes.

Christian Ventrelou

Maire d'Orliac et agriculteur

" Moi, personnellement, on a signé parce qu'on ne veut pas être en reste. [...] Vu les difficultés financières qu'on a : moi, je souhaite installer un jeune hors cadre familial, je cherche des solutions aujourd'hui pour pouvoir l'installer dans de bonnes conditions, pour que la vie puisse continuer sur la commune, que les terrains continuent à être entretenus. ", plaide-t-il.

Aujourd'hui, ne vivre que de l'agriculture, dans nos zones, ça devient pratiquement impossible !

Christian Ventrelou

Maire d'Orliac et agriculteur

"Il y a des retraités agricoles, il y a des retraités qui ont entre sept et huit cents euros de retraite par mois.  Ils sont en dessous du seuil de pauvreté. Et eux, ils me disent, ça nous intéresse. Bien sûr que ça nous intéresse ! Il faut les écouter, il faut écouter tout le monde."

"Je comprends, ce sont des propriétaires qui ont du mal à finir leurs fins de mois, on leur propose une poule aux œufs d'or, ils la prennent. Mais finalement, ils vont se retrouver avec un coq dans les mains, et des œufs, il n'y en aura aucun.", prédit Patrick Vivies, deuxième adjoint d'Orliac.

"Un projet à 7 ou 10 ans"

L'argument financier vaut aussi pour la collectivité. Les recettes pourraient être de 240 000 euros par an pour la communauté de commune, et 40 000 euros pour la commune. "À l'heure où les dotations baissent, ça reste quand même un point de vue intéressant. Si on veut conserver notre économie et conserver notre cadre de vie, il faut essayer aujourd'hui de mettre toutes les choses de notre côté pour pouvoir pérenniser nos communes", ajoute le maire d'Orliac.

En début d'année, Iberdrola doit installer un mât pour mesurer les vents et confirmer la rentabilité de l'installation. Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres. "Aujourd'hui, on ne sait pas si le projet sera réalisable ou pas, parce qu'il n'y a eu aucune enquête environnementale, aucune enquête de vent, ce ne sont que les prémisses d'un dossier", temporise le maire d'Orliac. "De toute façon, c'est un projet à 7-10 ans, donc on n'est pas près de les voir !"

Les précédents et l'avenir

Pour mémoire, il y a trois ans à proximité, un projet similaire (six éoliennes de 230 mètres à Mazeyrolles envisagées par la société Nordex) avait échoué face à l'opposition locale et notamment celle du conseil municipal. Le projet a changé de promoteur et s'est un peu déplacé, mais il se situe en définitive dans des termes très proches.

En Dordogne, il n'y aurait qu'entre un et six pour cent du territoire où l'implantation d'éoliennes serait réglementairement possible. Mais dans la région, le département est en dessous de la moyenne régionale pour la production d'énergies renouvelables. L'État est donc favorable aux nouveaux projets dans le département, qu'ils soient éoliens, de méthanisation ou solaires. Reste que nombre d'élus et d'habitants sont opposés à l'éolien en Dordogne et que leurs combats contre les moulins à vent ont été, la plupart du temps, victorieux.

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