Dans les forêts, la lutte s'organise pour contrer la "sylviculture standardisée" accusée de détruire les écosystèmes au nom de la rentabilité immédiate

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5 213, c'est le nombre d'espèces et de sous-espèces d'arbres peuplant les forêts françaises métropolitaines et ultramarines. Ce chiffre officiel avancé par l'inventaire national des ressources forestières fait de la France le 5 ème pays comptant le plus grand nombre d'essences forestières après le Brésil, la Colombie, l'Indonésie et la Malaisie. Mais cette bonne nouvelle, c'est aussi l'arbre qui cache la forêt. Car cette diversité est menacée. Tout d'abord par le réchauffement climatique, mais aussi par l'activité forestière humaine.

Un collectif anti-lobbies forestiers

Le collectif SOS Forêt a été créé en Lorraine en février  2011 autour d'associations, de syndicats de professionnels de la forêt, et de personnalités. Son but est de contrer les lobbies forestiers industriels qu'il accuse d'exploiter les ressources forestières dans l'unique recherche de profits immédiats, sans réel discernement environnemental et sans considération pour l'avenir.

Sensibiliser le grand public

Proche du terrain, le collectif compte beaucoup sur la sensibilisation du public pour défendre une richesse collective menacée. C'était tout l'objectif de la marche pour des forêts vivantes organisée ce samedi 9 avril dans la forêt de la Double. Ce massif forestier majeur de la Dordogne représente 12% de la surface boisée du département, réputé pour la qualité de ses forêts.

En Nouvelle-Aquitaine, les résineux occupent déjà 38 % du territoire régional forestier et le pin maritime couvre une superficie d'environ 820 000 ha, soit près de 30 % de la surface boisée. Une situation liée à sa prédominance historique dans les Landes de Gascogne où il est particulièrement bien adapté au sol sableux (85% du territoire y est peuplé en pins maritimes).

Dans la Double il se retrouve aussi, mais traditionnellement mélangé avec des feuillus, taillis de châtaignier ou de chênes. Le problème, c'est que cet arbre à croissance rapide, rentable et facile à exploiter, colonise peu à peu d'autres territoires.

Les dégâts en direct

Rien de plus parlant que de voir sur place les effets de ce que SOS Forêt qualifie de "sylviculture standardisée" et "d'enrésinement industriel" de la forêt traditionnelle. 200 personnes, sympathisants ou curieux, avaient fait le déplacement pour cette marche : un circuit de 6 km à travers la forêt, près de trois heures de marche, d'échanges, de sensibilisation à la fragilité des écosystèmes forestiers... et de constatations des dégâts en direct. Châtaignier, robiniers, hêtres, peupliers, chênes ou frênes, la balade sous le soleil avait bien commencé. Mais bientôt se dévoile un paysage lunaire, entièrement pelé de ses bouquets de feuillus par des coupes rases. Cette parcelle sera prochainement repeuplée uniquement de pins à croissance rapide, plus rentables. 

Coupes rases... et repeuplement industriel

 Le collectif accuse la politique des industriels de la filière bois qui détruisent les peuplements forestiers mixtes et irréguliers pour y substituer ces cultures monospécifiques de résineux. Une "dénonciation des trajectoires aberrantes et subventionnées de la filière industrielle régionale et internationale". 

On a un peu l'impression aujourd'hui qu'on est dans une fuite en avant où la forêt est devenue une planche à billets et une usine à bois et où on ne voit pas le côté environnemental...

Jean-Claude Nouard, ancien forestier, association SOS Forêt Dordogne

Mobiliser tous les acteurs

Si la sensibilisation du public est une chose, lutter contre cette politique du profit en est une autre, plus compliquée. Le collectif compte pour cela toquer à un autre niveau, explique Séverine Gérardin, Co-présidente de l'association SOS Forêt. Elle veut mobiliser ceux qui ont vraiment les leviers d'action en main, élus et propriétaires forestiers. Dans ce département qui a déjà tant fait pour la protection de ses sites naturels, et qui est particulièrement sensible à son cadre de vie, l'enjeu devrait pouvoir trouver un écho. Une question de bonne volonté, afin d'éviter que la Dordogne ne finisse par ressembler aux Landes... pour raisons financières.

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