La Compagnie de Gendarmerie des Transports Aérien de Bordeaux-Mérignac a reçu du renfort ce lundi 22 juillet. Au moins six enquêteurs du BEA, venus de Toulouse et Paris, se sont rendus sur les lieux de l'accident d'ULM qui a fait deux morts la semaine dernière.
Il était là pour les accueillir et les guider. Le capitaine Beaugrand supervise l'équipe de la compagnie de gendarmerie des transports aériens de Bordeaux-Mérignac, chargée d'enquêter sur l'accident. Ce lundi 22 juillet, il s'est donc rendu à l'Isle-Saint-Georges où six agents du BEA, le Bureau enquête et analyse, sont arrivés dès 6 h du matin.
"Nous leur apportons notre concours sur les faits, le moment de l'accident, et les premières avancées", explique le capitaine. "On est les locaux, on essaie de leur faciliter la tâche". Jeudi 18 juillet, deux hommes âgés de 42 et 46 ans sont décédés dans le crash d'un avion-léger de type ULM, dans un champ de la commune de l'Isle-Saint-Georges, en Gironde.
Une aile "relevée" qui pose question
"On avance prudemment dans cette enquête", explique Franck Beaugrand. "On attend désormais les orientations du BEA". Celui-ci n'est en effet pas intervenu immédiatement après l'accident.
La scène ayant été détériorée, il n'y avait donc plus d’urgence à intervenir rapidement".
Franck BeaugrandGendarmerie des transports aériens de Bordeaux-Mérignac
Leur travail va désormais consister à remettre en place la mécanique et la structure de l'ULM pour voir s'il y a eu une défaillance. Ils vont travailler sur les lieux de l'accident, mais vont également se rendre là où les pièces de l'ULM ont été entreposées. En l'occurrence, chez un garagiste pouvant garantir des conditions de stockage sécurisées.
Patrick Kadour, un riverain, a entendu l'avion chuter en direct. "Au début, j'ai entendu un bruit bizarre dans le ciel, se souvient le retraité. J’ai tourné la tête et j’ai vu ce petit avion à 80 mètres de hauteur, avec une aile relevée".
Cette aile est-elle à l'origine de l'accident ? "Il est trop tôt pour le dire", répond le capitaine de gendarmerie. "On ne sait pas si cette aile a été défaillante ou si la défaillance provient d’une autre cause. Elle peut provenir de plusieurs origines. Par exemple, pour certains accidents, afin de savoir s'il y a eu une panne de moteur, on va analyser l'essence, voir en amont si celle-ci n'a pas été contaminée. Là, c'est pareil"
Toutes les causes susceptibles vont être analysées. Parfois, c'est flagrant, parfois, on procède par élimination. Là, ce n'est pas flagrant.
Franck BeaugrandGendarmerie des transports aériens de Bordeaux Mérignac
"C'est complexe, car il s'agit d'un ULM"
Difficile de dire quand le BEA remettra son rapport. Cela peut parfois prendre plusieurs années. En attendant, l'enquête se poursuit. Elle a été confiée à la gendarmerie départementale et à la Compagnie de Gendarmerie du Transport aérien de Bordeaux-Mérignac. Cette dernière a détaché quatre enquêteurs sur cet accident d'ULM. Ils se concentrent sur la partie technique aéronautique. Ils vérifient la conformité administrative de l'avion (un ULM de type classe 3), celle du pilote et de ses qualifications, ainsi que celle du vol. Ils sont également en train d'étudier la météo et les conditions de vol le jour de l'accident ainsi que la trajectoire de l'ULM.
"C'est complexe, car il s'agit d'un ULM, confie Franck Beaugrand. Il n'est pas tenu à la même réglementation qu'avion de tourisme. Il n'y a pas non plus de transpondeur ni de contact obligatoire".
Un propriétaire, qui aurait un terrain suffisamment grand, peut décoller de chez lui s'il a obtenu de la préfecture un arrêté l'y autorisant. "Là en l'occurrence, l'ULM avait l'autorisation de décoller d'un terrain privé dont l'une des deux victimes était propriétaire. Mais à ce stade de l'enquête, on ne sait pas si c'est de là qu'ils ont décollé".
Drone et modélisation
Les gendarmes de la BGTA travaillent également sur un document précieux pour l'enquête. Une modélisation réalisée avec un drone. "Elle nous a permis de figer la zone de l'accident avant toute détérioration, avant même la désincarcération des deux victimes, précise le capitaine de gendarmerie. Cela va pouvoir aider le BEA".
Cette technique qui existe depuis l'apparition des drones, déjà utilisée lors d'accidents de voitures ou d'incendie de maisons, présente de nombreux avantages. "C'est un regard supplémentaire qui peut être très intéressant dans l'enquête. Avant, nous n'avions que la photographie. Là, on est en 3D, avec un point de vue qu'on ne peut pas obtenir en photo. On peut modéliser et tourner autour d’une scène".
On peut prendre du dessus, voire de très haut, pour observer des traces qu’on ne verrait pas à l'oeil nu.
Franck BeaugrandGendarmerie des transports aériens de Bordeaux Mérignac
Cette modélisation est en cours d'exploitation, avant d'être éventuellement transmise à la section de recherche qui travaille également sur l'accident ou à l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale. "On ne le fait pas systématiquement, mais cela permet d'avoir un regard. Ils ont une expertise et des outils supplémentaires". Régulièrement, certains choix seront faits en concertation avec le BEA. "On communique nos avancées avec les autres services et ils nous disent s'ils veulent des pièces supplémentaires".
Nulle ne sait quand les enquêteurs du BEA quitteront la Gironde et encore moins quand ils rendront leurs conclusions officielles. En attendant, un long travail de collaboration est engagé avec la BGTA. La Brigade de Gendarmerie des Transports Aériens de Bordeaux restera dans les mois qui viennent à la croisée des recherches effectuées dans le cadre de cette enquête. En parallèle, elle continue son travail habituel de contrôle et de surveillance dans le secteur aérien.