Reconnu coupable d'un double meurtre à l'hôpital psychiatrique de Pau en 2004, Romain Dupuy est placé depuis dans l'unité pour malades difficiles de l'hôpital de Cadillac en Gironde. Dans une lettre co-signée par 18 malades, il dénonce les conditions de soins de cette unité et alerte sur leur "prise en charge thérapeutique minimale".
C'est un courrier peu commun. Dans un texte cosigné avec 17 patients de l'unité pour malades difficiles de Cadillac, Romain Dupuy, auteur d'un double meurtre en 2004 et interné depuis 2005 dans l'établissement, s'exprime sur les conditions de soin réservées aux malades de cette unité.
Une prise en charge des soins dégradée
"Les personnels de santé sont restreints dans la reconnaissance de leur travail et cela nuit à la continuité des prises en charge des patients (...) , écrivent les signataires.
Depuis plusieurs mois, voire des années, nous remarquons en tant que patients, une diminution importante de notre liberté et d'une prise en charge des soins dégradée, malgré le fait que les soignants reviennent sur leur repos pour que nous puissions bénéficier de la meilleure qualité de prise en charge".
Soutien au personnel soignant
Manque de personnel, turnover de l'équipe soignante, elle même peu considérée et rémunérée... Autant d'éléments qui pénalisent les malades.
"Ces patients ont exprimé le caractère alarmant et alarmiste de ce qui se passe aujourd'hui en psychiatrie en France, qui est un peu le rebut de la médecine, de manière générale, explique Hélène Lecat, l'avocate de Romain Dupuy.
C'est un texte qui est en soutien du personnel soignant. Ils ont voulu dénoncer les conditions délétères dans la prise en charge et la qualité des soins
Hélène Lecat, avocate de Romain DupuyFrance 3 Aquitaine
Une démarche soutenue par les professionnels
"Ils sont privés de sortie thérapeutique depuis plusieurs mois", rappelle l'avocate. Des sorties, qui constituaient , selon les signataires de la lettre, " la seule fenêtre qu'[ils avaient] sur la société".
"Un de mes clients n'est pas sorti depuis le mois d'avril, illustre Me Lecat. C'est catastrophique : cela leur coupe toute perspective d'avenir ou d'être raccroché à la société. Et cela finit par tuer l'espoir".
La démarche de ces 18 patients est par ailleurs, soutenue par des soignants de Cadillac. Dans un communiqué, le collectif Printemps de la Psychiatrie, qui rassemble psychiatres, psychologues et différents professionnels de la santé a, lui aussi salué l'initiative. "Le Printemps de la psychiatrie dénonce ce système de maltraitance généralisée et sa banalisation. Il exige des mesures d’urgence : remédier à la déliquescence de soins psychiatriques dignes et respectueux des psychiatrisés et traiter l’hémorragie des professionnels de la psychiatrie publique", écrit ce dernier.
Un double meurtre particulièrement marquant
Auteur d'un double meurtre à Pau en 2004, Romain Dupuy, schizophrène, a été déclaré pénalement irresponsable.
Les faits remontent au 17 décembre 2004 : alors en crise, le jeune homme avait pénétré dans l'enceinte de l'hôpital psychiatrique de Pau. Il avait poignardé une aide-soignante et décapité une infirmière.
Déclaré pénalement irresponsable, interné depuis 2005, il a demandé à plusieurs reprises à être transféré dans un autre service de psychiatrie, plus souple. Une demande qui a de nouveau été rejetée en appel le 17 juin.