Fin de la trêve hivernale : le témoignage d'une retraitée expulsée

La trêve des expulsions, obtenue par l'Abbé Pierre après l'hiver 1954, a démarré le 1er novembre. Elle a protégé les plus démunis, empêchant l'intervention de la force publique jusqu'au 31 mars à minuit. Depuis ce matin, les expulsions sont à nouveau possibles. Témoignage.

"Des milliers de personnes" vont se retrouver à la rue, disent les associations, car au même moment, les 8.000 places d'hébergement d'urgence ouvertes durant l'hiver pour les sans-abri vont progressivement fermer.

En 2013, 126.000 jugements d'expulsion ont été rendus et 140.000 SDF recensés.

C'est le cas de Catherine, cette girondine retraitée de l'éducation nationale a vécu cette lente descente aux enfers. L'an dernier, elle a connu le traumatisme de l'expulsion de son domicile. 

Pour Marion Lagaillarde, du Syndicat de la magistrature, seule "une part infime" de locataires menacés d'expulsion sont "indélicats". Ce sont "des gens qui ont un accident de vie": "un simple frigo en rade, une maladie, ça fait un trou dans le paiement du loyer, impossible à rattraper", explique cette juge d'instance.

La Chambre nationale des huissiers de justice recommande pourtant aux locataires défaillants "de se rapprocher le plus en amont possible de l'huissier" qui peut, dit-elle, aménager la dette, solliciter des aides, intervenir dans des démarches de relogement.  

Drame humain​

"Il n'y a pas de volonté politique de prévention des expulsions", regrette Benoit Fillippi, du Réseau Stop aux expulsions (Résel). Il rappelle que selon une circulaire de 2012, les préfets doivent informer les personnes menacées qu'elles peuvent recourir au droit au logement opposable (Dalo), qui oblige l'Etat à trouver un logement

La Fondation Abbé Pierre souligne que sur l'ensemble des jugements d'expulsion, 12.760 ont abouti à une expulsion par la force publique, sans compter "les dizaines de milliers de familles" qui anticipent l'intervention et quittent leur logement, parfois sous la pression des propriétaires.

Les associations estiment qu'avec les conséquences sociales et psychologiques (placement des enfants, etc.), cela coûte plus cher à l'Etat d'expulser que de maintenir une famille dans son logement.
Malgré la création de 2.000 places supplémentaires pérennes annoncées par la ministre du Logement Sylvia Pinel, s'ajoutant aux 102.000 places d'hébergement déjà disponibles en France, "l'angoisse pour les sans-abri perdure", déplorent plusieurs associations (Emmaüs, Samu social de Paris, Aurore, etc.), en réclamant "la mobilisation en urgence des immeubles et locaux vides".
"Il faut apporter des réponses humaines en mettant tout en oeuvre pour maintenir
les familles dans le logement qu'elles occupent", déclare Sylvia Pinel dans une tribune parue aujourd'hui dans l'Humanité. La ministre promet la prochaine parution de deux décrets mettant en oeuvre "une véritable charte de prévention des expulsions" et "le maintien des aides personnalisées au logement pour les allocataires de bonne foi, même en cas d'impayés de loyers".

Écoutez le témoignage de Catherine, retraitée de l'Education nationale et expulsée l'an dernier

 

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