C'est une forêt ancestrale, un lieu unique en France. La fôret usagère de La Teste-de-Buch fait près de 4000 hectares. Elle est accessible aux riverains qui peuvent profiter gratuitement de bois de chauffage mais aussi de bois de construction grâce à une nouvelle scierie.
Ils viennent seuls ou accompagnés de l'Association de Défense des Droits d'Usage et de la Forêt Usagère (ADDUFU). Ce sont souvent des hommes, pères de famille ou retraités. Tous viennent couper du bois gratuitement. Quand on sait qu'un stère de bois se vend au moins 60 euros dans le commerce, il y a de quoi sourire.
Jean-Jacques Perrot, Gujanais à la retraite, est venu comme les autres faire son stock de bois pour l'hiver. Sur place ils trouvent un peu de tout : pins, chênes, houx, arbousiers, hêtres. En mélangeant les essences ils pourront obtenir un bon combustible pour leur cheminée. En revanche ils ne peuvent ramasser que le bois mort. Le bois est gratuit (pour les habitants de La teste, Gujan, Arcachon, et du Cap-Ferret) mais des règles existent. On ne peut pas tout ramasser. C'est la raison pour laquelle certains préfèrent venir avec l'association ADDUFU. Ainsi ils ne peuvent pas se tromper."Moi je consomme à peu près huit stères par an alors il y a qu'à faire le calcul !" raconte ce Gujanais.
Ensemble ils participent, parfois sans le savoir, à l'entretien de la forêt.
Une forêt historique
Ce système de fonctionnement unique en France remonte à très loin. Les premières traces écrites datent du XVe siècle. A l'époque les seigneurs avaient décidé d'accorder certains habitants le droit de se servir en bois gratuitement dans un but bien précis. Cela leur permettait de fixer les populations qui réalisaient ainsi une économie substantielle. Avec ce même système juridique de "baillettes" d'autres habitants obtenaient le droit de récolter la gemme dont ils allaient tirer la plus grande ressource. Ceux là s'appelaient les "ayants pins".Durant 2000 ans, le gemmage a été pratiqué par ces "ayants pins". Aussi appelés les résiniers ils ont participé jusque dans les années 1980 à l'entretien de la fôret. Ils taillaient en effet les petits chênes pour favoriser la pousse des pins. Leur activité a décliné. Aujourd’hui ils ont disparus. Mais leurs descendants, sont toujours propriétaires du sol et uniquement du sol. C'est à dire que les arbres ne leur appartiennent pas. Les habitants des communes voisines peuvent donc venir se servir en bois mort. C'est ce qu'on appelle une forêt usagère, unique en France.
Ailleurs dans l'Hexagone, les habitants possèdent généralement un droit d'affouage. Ils peuvent prendre du bois mais ils sont limités en quantité et doivent émettre une demande à la mairie. A la Teste-de-Buch, pas de demande, ni de limitation.
Une toute nouvelle scierie pour du bois de construction
Il y a un peu plus d'un an, l'association ADDUFU a reçu un don qui allait tout changer : une scierie. Il a bien fallu la retaper et la faire voyager, mais pas de quoi décourager les bénévoles qui se vouent corps et âme à la défense de cette forêt et aux droits de ses usagers.En septembre 2015, juste en face de l'entrée du zoo de Cazaux, naissait donc ce lieu unique. Chaque mois 20m3 de pin brut y sont découpés. Grâce à cette scierie le nombre d'adhérents à presque doublé.
Ici les particuliers se procurent du bois deux fois moins cher que dans le commerce car ils ne paient que le transport et la découpe. Reste après à remplir le cahier des charges.
"Il faut avoir sa résidence principale depuis plus de 10 ans sur l'une des quatre communes. Après on peut en prendre autant qu'on veut, il n'y a pas de limites. La seule chose c'est qu'on ne peut pas en faire le commerce" explique Christian Gousset de l'ADDUFU.
Des projets 100% dans le jus
Résultats beaucoup d'habitants se lancent dans de petites constructions. Un cabanon au fond du jardin, une petite maison style "Arcachonnaise", ou tout simplement une petite terrasse en bois de la forêt usagère. Des chantiers réalisés avec du bois local, comme au bon vieux temps. Ces dernières années, les commerces avaient tendance à le délaisser pour d'autres bois venus d'ailleurs.Christine Cartier, fleuriste, habite Gujan Mestras. Après avoir retapé son domicile avec le bois de la forêt usagère elle se lance maintenant dans la construction d'une petite maison tout en pin. L'idée de faire une bâtisse avec des essences locales l'a séduite, sans parler du côté associatif :
"C'est la proximité du fournisseur de bois qui m'a plu, et puis l'esprit associatif et puis voilà c'est le bois d'ici" sourit-elle.
De la même manière sur le port ostréïcoles, certaines cabanes sont elles aussi refaites grâce au pin de la forêt usagère participant à la magie de ce paysage unique.
Voyez le reportage de Candice Olivari et Sylvie Tuscq-Mounet dans lequel interviennent Jean-Jacques Perrot (retraité à Gujan Mestras), Mathieu Pellerin (habitant de La Teste-de-Buch), Jean-Claude Dupoy (président de l'association ADDUFU), Alain Pailler (chauffeur de bus à La Teste-de-Buch), Christian Gousset (ADDUFU), et Christine Cartier (fleuriste à Gujan Mestras) :