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École. "Derrière ces fermetures, il y a des enfants" : la fronde contre la carte scolaire en Haute-Vienne

Parents d'élèves, élus locaux, syndicats enseignants se mobilisent depuis plusieurs semaines en Haute-Vienne pour protester contre la future carte scolaire qui prévoit la suppression d'une trentaine de classes. Quels moyens pour l'école alors qu'un vaste plan d'économies vient d'être annoncé par le gouvernement ? C'est le thème de notre émission Dimanche en Politique en Limousin.

C’est un éternel recommencement chaque année : les services de l’État dans les académies présentent ce que l’on appelle les cartes scolaires. En Haute-Vienne, une trentaine de classes sont menacées de fermetures dans le premier degré (en primaire), même si la décision n’est pas encore définitive.

C'est dans ce contexte qu'un décret du gouvernement vient d'acter dix milliards d'euros de coupes budgétaires. Le texte, paru le 22 février 2024 au Journal officiel, "annule" les dépenses budgétées dans 29 domaines. Près de 700 millions d'euros du budget de l'Éducation nationale sont annulés. Le ministère a indiqué que ces 700 millions en moins ne représentent qu'une baisse d'environ 1% de son budget et assure qu'il n'y aura pas d'impact sur les recrutements et les réformes engagées. Des arguments très loin de convaincre les syndicats enseignants, tout comme la CFDT qui, dans un communiqué paru le 23 février, estime que "les niveaux d’impacts attendus sur les politiques publiques les plus touchées sont d’une gravité telle qu’ils compromettent l’avenir et les transformations indispensables. Décision après décision, les ressorts sont toujours les mêmes : en s’entêtant dans son choix dogmatique de tailler dans les dépenses sans s’intéresser aux recettes, en refusant d’ouvrir le chantier de la fiscalité, le Gouvernement concentre toujours l’effort sur les plus modestes".

Pour évoquer la fronde contre la carte scolaire en Haute-Vienne, la question des moyens alloués à l'école publique, mais aussi les rapports entre public et privé, Annaïck Demars reçoit quatre invités :  

  • Alice Lebraud Raymondaud, représentante du collectif des parents d’élèves de Haute-Vienne, parent d’élève RPI Chamboret-Vaulry
  • Fleur Bidon, directrice de l’école de Saint-Sylvestre et représentante du syndicat FSU-SNUIPP
  • Bernard Deloménie, maire de Saint-Priest-Ligoure et président de l’association des maires ruraux de Haute-Vienne
  • Choukri Ben Ayed, professeur de sociologie à l’Université de Limoges, auteur de plusieurs livres sur l’égalité scolaire et membre du GRESCO 

La rectrice n’a pas pu se rendre disponible pour cette émission et l’inspection académique de Haute-Vienne n’a pas souhaité s’exprimer alors que le CDEN (conseil départemental de l’éducation nationale) n’a pas pu se tenir et a été reprogrammé le 4 mars. 

Extraits

Fleur Bidon (FSU -SNUIPP) : "Les collègues globalement sont très inquiets, je pense qu'on peut même parler de souffrance au travail. Cette souffrance, elle se mesure entre l'écart qui existe entre les annonces, ce que l'on nous demande de faire et ce qu'on vit réellement sur le terrain. Derrière ces fermetures, il y a des enfants, des conditions d'apprentissage de nos futurs citoyens, ce n'est pas un petit sujet".

On a des annonces qui sont terribles : 700 millions encore en moins sur notre budget et M. Attal qui a annoncé le choc des savoirs, plein de petites mesures gadgets. C'est une grande souffrance au travail pour les enseignants.

Fleur Bidon

Enseignante (FSU -SNUIPP)

Alice Lebraud Raymondaud : "La baisse démographique, seule pour eux [le rectorat] explique la nécessité de fermer les classes, jamais, on entrevoit un espoir d'amélioration. 700 jours non remplacés depuis septembre, ce n'est pas acceptable. Et puis au lieu de faire des grands discours sur l'inclusion, il faudrait réellement mettre des moyens".

Je ne comprends pourquoi le Ministère fait toujours exactement l'inverse de ce que disent les recherches. On dit que la réduction du nombre d'élèves par classe est bénéfique : en fermant les classes, on fait exactement l'inverse. Il y a des rapports de recherche depuis les années 60 qui disent que les classes de niveaux sont contre-productives et on annonce des classes de niveaux

Choukri Ben Ayed, sociologue de l'éducation

France 3 Limousin

Choukri Ben Ayed, sociologue : "On a un système très élitiste avec de très très bons élèves, mais aussi une cohorte très importante de mauvais élèves et ça, on ne sait pas le corriger. Ce qui est inquiétant - et je le dis en tant que chercheur siégeant dans beaucoup d'instances qui font partie du ministère – c'est que je ne comprends pourquoi le Ministère fait toujours exactement l'inverse de ce que disent les recherches. On dit que la réduction du nombre d'élèves par classe est bénéfique : en fermant les classes, on fait exactement l'inverse. Il y a des rapports de recherche depuis les années 60 qui disent que les classes de niveaux sont contre-productives et on annonce des classes de niveaux. Le SNU, personne ne l'a demandé, les uniformes à l'école non plus, on ne sait pas comment ça va être financé."

Sur la question d'une concurrence déloyale de l'enseignement privé, relancée par le cas des enfants d'Amélie Oudéa-Castéra, Bernard Deloménie, président des maires ruraux de la Haute-Vienne : "Je trouve insupportable qu'on soit capable de fermer une classe dans une école publique alors que va se créer une école à côté, sous contrat peut-être — je ne relancerai pas la guerre privé-public – mais l'État doit faire attention à l'école républicaine qui est aujourd'hui tenue par les collectivités plutôt que de nous attaquer par fermetures de classes successives".

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