Ce mercredi 19 janvier 2022 s’est tenu à Limoges le procès en appel de la propriétaire des chiens qui avaient attaqué une septuagénaire le 15 octobre 2020 à Lamazière-Basse. La prévenue qui ne s’était pas présentée en première instance a aujourd’hui reconnu les faits.
Elle n'était pas présente à son 1er procès, cette fois, Laura a montré son visage lors de ce procès en appel, en Haute-Vienne. A Limoges, ce mercredi 19 janvier 2022, les cheveux bruns coiffés en chignon, des lunettes rouges relevées sur la tête, emmitouflée dans une doudoune noire, cette femme d’une trentaine d’années a, d’une voix chevrotante, reconnu les faits.
Je ne voulais pas voir la réalité en face car jusque-là mes chiens n’avaient agressé personne.
Prévenue, propriétaire des chiens
Quand le président du tribunal lui demande si elle consent avoir semé la terreur dans le village, la propriétaire des 6 chiens répond "Oui". Un soulagement pour la victime grièvement blessée, toujours en fauteuil roulant depuis l’agression. "Enfin, elle peut mettre un visage sur un nom" explique son avocate Me Nadège Pouget-Bousquet.
Traumatisée par ce qu’elle a vécu, cette femme de 73 ans, les cheveux grisonnants, tenus par un serre-tête, les lunettes de vue bien ajustées, n’a pas tenu à s’exprimer pendant l’audience.
« Chronique d’une tragédie annoncée »
Quand l’avocat général revient sur les faits, il parle "d'une tragédie annoncée". Depuis août 2020, les chiens de Laura étaient laissés sans surveillance, errant dans la commune. A plusieurs reprises, les molosses s’attaquent aux chiens d’un voisin. Ils causent la mort d’un d’entre eux, en blessent un autre.
Ils agressent aussi certains habitants et deux gendarmes qui se rendaient au domicile de Laura. Alors que cette dernière reçoit plusieurs contraventions pour divagation des chiens, la propriétaire continue de les laisser sortir sans se soucier d’un éventuel accident.
Mais, le 15 octobre 2020, ces divagations des chiens virent au drame. Une dame de 71 ans est attaquée très violemment en fin de journée par six chiens en liberté alors qu’elle se promenait près de chez elle à Lamazière-Basse. Elle est traînée sur 23 mètres. Cinq chiens sont de race Cane Corso, des "molosses" de 45 kilos et le plus petit, aussi plus féroce, est un bouledogue Anglais. Ils vont lacérer cette femme, lui mordre les bras, lui arracher le mollet gauche. La victime est retrouvée allongée, dans un pré, tremblante, en état d’hypothermie, les vêtements déchiquetés. "En 27 ans de carrière, c'est l'une des interventions les plus traumatisantes" indique un gendarme. Elle est héliportée au CHU de Limoges et restera hospitalisée pendant 9 mois.
Le 27 mai 2020, les chiens ont été euthanasiés.
L'avocat général a requis trois ans d'emprisonnement assorti d’un sursis probatoire de deux ans
Laura a été condamnée le 16 septembre 2021 par le tribunal correctionnel de Tulle à trois ans d'emprisonnement dont deux avec sursis.
En appel aujourd’hui, son avocate dresse le portrait d’une femme qui a perdu pied à plusieurs reprises. Un passé sur fond de violences conjugales et ses 4 enfants qui lui sont retirés. La jeune femme plonge, elle se réfugie seule, avec ses chiens.
Elle a été prise dans le tourbillon de la misère, ses enfants placés… elle a perdu pied. Elle a été aveuglée car elle est incapable de prendre la moindre décision. Ses chiens étaient tout pour elle.
Avocate de la prévenue
"La maintenir en détention, c’est la laisser dans un enfer", poursuit son avocate, Me Maeva Richard qui reconnait l’essentiel des infractions mais demande qu’elle ne fasse pas l’objet d’emprisonnement.
La succession des faits reprochés, l’indifférence, le déni que Laura a affiché de nombreuses fois et son logement très mal entretenu, ne plaident pas en sa faveur. Une lettre écrite de sa main au président de la Cour d’appel "dont la décence ne permet pas de donner lecture" vient noircir le tableau.
La prévenue est poursuivie pour "blessures involontaires par chiens avec une ITT supérieure à 3 mois" et "pour mise en danger d’autrui par violation délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence". L’avocat général a demandé la même peine qu’au précédent jugement, à savoir trois ans d'emprisonnement assorti d’un sursis probatoire de deux ans.
L’affaire a été mise en délibérée au 16 mars 2022. La prévenue restera incarcérée d'ici la décision.