Il ne faut se fier ni à la poésie de son nom, ni à la majesté de son allure, la Berce du Caucase est une plante invasive et dangereuse pour la santé : elle peut provoquer de graves brûlures. Elle a aussi ses défenseurs.
Comme de nombreuses plantes exotiques, la Berce du Caucase, originaire d'Asie, a été importée en France au début du XXe siècle, pour orner les jardins botaniques.
Aujourd'hui, on la trouve dans la nature, sur les bords des cours d'eau, dans des forêts humides, sur les talus des routes, les prés, les terrains vagues.
Les dangers de la Berce du Caucase
En occupant un espace plus important, la Berce du Caucase expose également de plus en plus de personnes à ses dangers : elle est phototoxique.
Le contact de sa sève ajouté à l'exposition de la lumière provoque des brûlures qui vont de l'érythème à la douloureuse brûlure au deuxième degré, avec des cloques et parfois des cicatrices durables.
Mais comment est-on exposé à sa sève ?
C'était il y a quelques années, je n'avais jamais entendu parler de la Berce du Caucase, explique ce père de famille de Limoges. J'en avais dans mon jardin, je l'ai coupée et de la sève nous a touchés, mon fils et moi. Il devait avoir quatre ans. Nous n'y avons pas pris garde, et deux jours plus tard, nous avions tous les deux de grosses brûlures sur les bras avec des cloques. A l'époque, le médecin ne nous a pas crus quand nous lui avons parlé de la sève d'une plante.
Les plus exposés aux dangers de la Berce du Caucase sont en effet les jardiniers, les randonneurs, les enfants, qui les cueillent dans les prés, ou les agents chargés de l'entretien des routes.
Reconnaître la Berce du Caucase
Pour ne pas se laisser prendre au piège de la Berce du Caucase, mieux vaut donc la connaître et savoir l'identifier.
La Berce du Caucase, de son nom latin "Heracleum Mantegazzianum" est une plante ombellifère, aux fleurs blanches, tirant parfois sur le rose, le vert ou la jaune. Elle fleurit tous les deux ans et peut atteindre cinq mètres de hauteur.
Même si elles sont plus petites, attention à ne pas la confondre avec les inoffensives Angélique ou Berce commune.
Que faire quand elle pousse dans un jardin
Quand la Berce du Caucase s'implante dans un jardin, on peut l'éliminer rapidement, avec précaution pour ne pas mettre de sève en contact avec la peau, et il faut l'incinérer, car placée sur un tas de mauvaises herbes au fond du jardin, ou au compost, elle reprend vie.
On peut aussi la conserver, mais dans ce cas, mieux vaut la maîtriser.
Il faut couper la tige juste après la floraison, renseigne Laurent Chabrol, botaniste au conservatoire botanique national du massif central, pour éviter que les graines ne se propagent. Quand la Berce du Caucase est déjà implantée, elle est très difficile à éradiquer.
En expansion ?
Depuis le 14 février 2018, il est interdit de vendre, d'acheter de la Berce du Caucase :
Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps l'introduction sur le territoire, y compris le transit sous surveillance douanière, l'introduction dans le milieu naturel, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la mise en vente, la vente ou l'achat de spécimens vivants des espèces végétales énumérées en annexe I au présent arrêté.(arrêté du 14 février 2018)
C'est une plante exotique et envahissante. Bien qu'elle ne soit pas très répandue en Limousin, comme l'atteste la carte du site "Si Flore", elle semble de plus en plus présente. Encore qu'un doute subsiste à ce sujet :
Ce qui est certain, c'est qu'on la cherche davantage, du coup on en trouve plus. Cela ne signifie pas forcément qu'elle est plus implantée dans notre région, indique Laurent Chabrol. Mais il y a des communes où on en trouve en quantité, comme Saint-Mathieu en Haute-Vienne, ou du côté de Naves en Corrèze, alors qu'elle est absente du Plateau de Millevaches.
La question de l'éradication divise
Faut-il pour autant l'éradiquer ? Les avis divergent.
L'idéal, c'est de savoir la reconnaître et savoir à quels risques on s'expose, explique Christel Goutiéras, technicienne à la FDGDON de la Haute-Vienne (fédération départementale de groupements de défense contre les organismes nuisibles). Il ne faut pas chercher à la cueillir et il faut savoir la contenir. Quand elle commence à s'étendre sur les bords des routes, nous conseillons aux collectivités de les supprimer, car elle prend de plus en plus d'ampleur au fil des floraisons. Le sol est sans arrêt réensemencé.
Une des implantations privilégiée de la Berce du Caucase se trouve sur les bords des cours d'eau.
Les graines tombent alors dans l'eau et sont disséminées un peu plus loin, précise Christel Goutiéras.
La technicienne de la FDGDON conseille aux communes envahies par la Berce du Caucase de la faucher, chaque année, avant la floraison afin d'épuiser la plante. Mais ça peut prendre du temps.
Au bout de quatre à cinq ans, le pied est à trois mètres de profondeur.
En plus du danger qu'elle représente pour la peau, certains lui reprochent également sa taille, ses fleurs et ses feuilles immenses qui bloquent le passage de la lumière et empêche le développement de toute autre végétation, autrement dit elle serait un frein à la biodiversité.
Mais la Berce du Caucase a aussi ses défenseurs.
Plante d'ornement, elle est élégante et présente une certaine grâce. A Fursac, dans la Creuse, le parc de Tancognaguet en présente à ses visiteurs.
Le paysagiste Gilles Clément vante les mérites de cette "plante vagabonde", qui s'installe là où bon lui semble, dans "un jardin en mouvement".
A Limoges, le jardinier Mathieu Caulier lui trouve des avantages :
Elle se balade, s'implante là où d'autres ne vont pas se mettre. Elle s'adapte au milieu et les insectes l'adorent. Il faut faire attention à ses très grandes feuilles qui peuvent être tranchantes. Je les coupe et laisse les plus petites pour ne pas qu'elles fassent de l'ombre et empêchent la biodiversité.
La berce du Caucase et l'art
La beauté de cette plante exotique, géante et spectaculaire, a inspiré de nombreux artistes du début du XXème siècle alors que l'Art Nouveau glorifait la nature.
L'un des vases les plus emblématiques de la cristallerie Daum à Nancy porte le nom "grande Berce du Caucase".
Le musée de l'école de Nancy présente aussi une chaise "Berce du Caucase".
Au MOMA de New-York, on peut également découvrir un vase de Paul Reverse figurant des Berces du Caucase.
Où signaler la présence de Berce du Caucase en Limousin
Si vous voyez de la Berce du Caucase, vous pouvez prévenir un de ces organismes chargés de répertorier les lieux où elle pousse :En Haute-Vienne : la FDGDON 87 - 05 55 04 64 06
En Creuse : CPIE des Pays Creusois - 05 55 61 95 87
En Corrèze : CPIE de la Corrèze - 05 55 95 93 79
ou le site du conservatoire botanique national du Massif Central