La bataille juridique, au cœur de laquelle se trouve l'animal sauvage, continue entre les partisans du déterrage, hors période de chasse, et les associations de défense. Après une première suspension en mai dernier, une nouvelle audience se tenait aujourd’hui au tribunal administratif de Limoges.
En ce mardi 1ᵉʳ août 2023, la petite salle du tribunal administratif de Limoges est plutôt remplie. D’un côté, Coline Robert, la jeune avocate des associations One Voice et AVES France, arrive de Paris pour demander l’annulation de trois arrêtés préfectoraux.
De l’autre, la partie adverse est largement représentée : plusieurs agents et représentants des services préfectoraux de la Haute-Vienne et de l’Indre ont fait le déplacement. À leurs côtés, les fédérations de chasse de la Haute-Vienne et de la Creuse sont représentées par Thomas Bonzy, l’avocat de la Fédération nationale de la chasse, venu spécialement de Lyon. Deux agriculteurs sont également présents.
Compte tenu du fait que « les requérants sont les mêmes et le tribunal connait déjà le dossier », le président annonce que les trois affaires sont appelées ensemble. À savoir, les trois arrêtés émanant des préfectures de la Creuse, de la Haute-Vienne et de l’Indre qui ouvrent, chacun, une période complémentaire de vénerie sous-terre du blaireau (périodes étendues de juin à septembre, selon les départements. NDLR).
Des autorisations qui ne passent pas auprès de plusieurs associations de défense des animaux. Voilà pourquoi depuis 2021, One Voice, ASPAS et AVES France se sont lancées dans une bataille juridique : devant les tribunaux, elles contestent chaque arrêté préfectoral légitimant cette pratique en dehors de la période de chasse.
Une bataille pour l’heure sans fin, car les arrêtés se multiplient un peu partout (plus vite que les blaireaux semble-t-il) : « Rien que pour cette année, nous en sommes à 25 dossiers environ », soupire l’avocate.
Après une annulation, un 2ᵉ arrêté contre les blaireaux
Parfois aussi, les dossiers reviennent. C’est le cas en Haute-Vienne. Le 5 mai dernier, le tribunal administratif de Limoges a suspendu un premier arrêté préfectoral. Mais les services de l’État, épaulés par les chasseurs, sont revenus à la charge : face aux « dégâts divers d’ordre agricole (…), urbains (détérioration de routes ou voies de chemin de fer) », la préfecture a publié un nouvel arrêté pour l'ouverture d'une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau du 15 juillet au 14 septembre 2023.
Les chiffres présentés dans le dossiers sont fiables. Ces dégâts sont bien réels, ils sont recensés par les agriculteurs et les préfectures qui sont sur le terrain, pas comme ces associations qui sont dans des bureaux à Paris ».
Thomas Bonzy, avocat des fédérations de chasse 87 et 23
Pour appuyer les dires de l'avocat devant le président du tribunal administratif, un agriculteur témoigne en évoquant « plusieurs dizaines d’agneaux attaqués dans le nord de la Haute-Vienne ».
Face à ces accusations, l’avocate, spécialisée dans le droit animalier, argumente :
Ces données sont surestimées. Il n’existe pas de preuve : aucun justificatif ou aucune photo pour démontrer que ces dégâts sont bien liés aux blaireaux.
Coline Robert, avocate de One Voice et AVES France
Autre argument pour les défenseurs du blaireau, l’absence d’un recensement précis de ces animaux. « On n’a que des comptages partiels. Donc, on ne peut pas dire que leur nombre est en hausse ou suffisamment élevé pour légitimer une période complémentaire de vénerie », poursuit l'avocate. Une période, qui selon les associations, entrave la reproduction de l’espèce, car les jeunes blaireaux ne sont pas encore en âge de se reproduire.
Le tribunal administratif de Limoges rendra sa nouvelle décision ce vendredi 4 août.