L'amende forfaitaire de 200 € pour l'usage de stupéfiants s'applique désormais à toutes les drogues y compris le cannabis. L'objectif affiché est de couper le lien entre les trafiquants et les consommateurs. Cette politique est-elle efficace ?
Ces dernières semaines, les opérations de contrôles pour consommation de stupéfiants se multiplient à Limoges. La détention de cannabis est désormais passible d’une amende de 200 €, comme les autres drogues.
L’objectif de cette politique serait de couper le lien entre les trafiquants et les consommateurs, en dissuadant ces derniers de venir se fournir sur la voie publique.
Pas dissuasif pour certains
Ce type de fonctionnement est-il efficace ? Nous avons interrogé une Québécoise, installée en France depuis plusieurs années. Cette ex-fumeuse de cannabis explique que dans son pays, la légalisation en 2018 de la consommation de cette drogue a fait évoluer les comportements, allant de la répression vers la prévention.
Elle affirme que l’amende de 200 € ne la dissuaderait d’acheter de la drogue : « Ce n’est pas la bonne manière de faire : la répression, mettre une amende… Pour moi, ça ne changerait rien. Je payerais l’amende, je ne serais pas heureuse de payer ce prix-là, mais j’irais en trouver ailleurs. »
Pour elle, les politiques de prévention, qui informent sur les risques liés à la consommation de ces produits, sont plus efficaces.
Un nouvel outil pour lutter contre les trafics
A Limoges, la police nationale affirme procéder à deux ou trois interventions hebdomadaires de contrôles anti-stupéfiants dans les quartiers sensibles de la ville.
Avec des résultats efficaces, selon Yannick Salabert, le directeur de la police de la Haute-Vienne : « Ces opérations provoquent des tensions entre les bandes de dealers. Nous trouvons de l’argent, de la drogue, nous interpellons les guetteurs… Les caméras de vidéosurveillance dans ces quartiers font régulièrement l’objet de dégradation car elles gênent les trafics ». Pour lui, l’amende forfaitaire est un nouvel outil juridique qui permet de s’attaquer à la demande de drogue, et non plus seulement l’offre.
Contre-productif, selon un juriste
Ce n’est pas l’avis de Renaud Colson, juriste spécialiste des drogues, que nous avons contacté.
Pour lui, cette amende serait même contre-productive, car elle empêche la poursuite de toute procédure : « C’est une arme qui, certes, permet de réprimer les usagers de stupéfiants de manière systématique, mais qui protège presque les trafiquants. Puisque dès lors qu’un usager fait l’objet de cette sanction, il ne peut plus est soumis à un interrogatoire qui pourrait donner lieu au démantèlement d’un trafic. »
Selon lui, la répression augmente depuis une quinzaine d’années, sans que les trafics et l’usage de stupéfiants ne diminue. « Il est remarquable qu’en France, le budget alloué à la répression en matière de stupéfiants est dix fois supérieur à celui consacré à la prévention et à l’éducation. On continue avec l’amende forfaitaire à être dans la logique répressive qui se désintéresse du soin. »
On estime à un million le nombre d’usagers quotidien de cannabis en France, et 5 à 6 millions de consommateurs réguliers.