La consultation "Ma France 2022", menée par France Bleu en partenariat avec France 3 et Make.org, montre que la santé est une préoccupation majeure des français avant l’élection présidentielle. En Nouvelle-Aquitaine, la "désertification médicale" inquiète de nombreux citoyens.
Le nombre de médecins généralistes en activité régulière a baissé en Nouvelle Aquitaine depuis 10 ans : 8374 en 2021 contre 8671 en 2011. Selon l’Agence régionale de santé, en 2019, 54% de la population était couverte par les dispositifs d'aide à l'installation des médecins.
Un constat préoccupant
Depuis 2017, de nouvelles aides à l’installation ont été mise en place, la télémédecine s’est développée. Des délégations de soins ont vu le jour avec par exemple le développement des infirmières de pratique avancée qui peuvent réaliser des suivis plus important sous la supervision d’un médecin.
Enfin l’exercice en groupe c’est beaucoup développé : on compte aujourd’hui 255 maisons de santé pluri-professionnelles en Nouvelle-Aquitaine, dont 31 créées depuis janvier 2020, et 64 centres de santé, dont 23 créés depuis janvier 2020.
Alors que la crise sanitaire n’est pas terminée, la population est toujours très préoccupée par la désertification médicale, et les candidats à l’élection présidentielle ont tous réservé dans leur programme une place, plus ou moins importante, à ce sujet.
Installation des médecins dans les déserts médicaux : obliger ou inciter ?
Un thème nouveau revient chez plusieurs candidats : la fin de la liberté d’installation des médecins. C’est sujet très polémique, qui par le passé a provoqué de nombreuses manifestations, et plusieurs projets allant dans cette direction ont été enterrés. Désormais, plusieurs candidats avancent clairement cette possibilité.
A gauche, la socialiste Anne Hidalgo veut créer pour les futurs généralistes une quatrième année d’internat à effectuer dans un désert médical. L’écologiste Yannick Jadot défend le conventionnement sélectif en zone "surdense" médicalement, où les soins prodigués par les médecins en surnombre ne seraient plus remboursés. Jean-Luc Mélenchon voudrait un service public de santé permettant d'avoir "des médecins salariés qui vont là où il y a des besoins".
A droite, Valérie Pécresse ne mise pas sur la coercition. Elle se contente de vouloir instaurer une 4 année d'internat généraliste avec des docteurs qui travailleraient en priorité dans les "zones en tension", et préfère parler de mesures incitatives, avec une meilleure rémunération des professionnels de santé en fonction de leur activité dans ces zones sous denses. Marine Le Pen suggère dans le Quotidien de médecin de moduler le tarif de consultation selon le lieu d’installation : "Un médecin qui choisit d’exercer dans la Creuse sera mieux payé qu’un médecin qui s’installe dans une grande ville où il y a beaucoup de confrères". Éric Zemmour parle aussi d’un "conventionnement spécifique" avec un tarif de consultation plus élevé dans les zones en tension.
Former davantage de médecins
Cette thématique semble faire l’unanimité, même si les chiffres ne sont pas les mêmes selon les candidats.
Actuellement, on compte environ 9000 médecins en fin d’étude. Selon le bilan d’Emmanuel Macron, le nombre d’étudiant a déjà augmenté de 20% en 2021.
Anne Hidalgo fixe un objectif de 15 000 nouveaux médecins chaque année, Valérie Pécresse 25 000 de plus en 5 ans, et Jean-Luc Mélenchon veut recruter 100 000 soignants.
Pour y parvenir, il faut augmenter les capacités d'accueil des facultés de médecine et trouver des maîtres de stage en zone sous dense. Yannick Jadot veut doubler ces capacités de formation.
De nouvelles compétences
Là encore, le mouvement est déjà lancé avec de nouveaux actes ouverts aux sages-femmes ou aux infirmières de pratique avancée.
Pour l’heure, les candidats ne sont pas très précis dans leurs volontés d’évolutions. Dans le Quotidien du médecin, Anne Hidalgo veut transférer des tâches vers les infirmières de pratique avancée ou les pharmaciens. Marine Le Pen veut une "montée en gamme" du personnel soignant, et Valérie Pécresse appelle à un élargissement des compétences après validation des acquis de l'expérience pour les infirmières et les sages-femmes.
Emmanuel Macron veut lui poursuivre sur sa lancée dans ce domaine et propose même selon l’institut Montaigne de désigner un infirmier référent sur certains territoires en tension, et permettre le renouvellement d'ordonnance par des infirmiers ou des pharmaciens
Dans le détail, voici l’ensemble des programmes… Bonne lecture !
Yannick Jadot
Dans son programme, on peut lire : "Nous en finirons avec les déserts médicaux"
Yannick Jadot veut "proposer le conventionnement sélectif pour limiter les nouvelles installations dans les zones déjà bien pourvues en médecins : un médecin ne pourra s’y installer en étant conventionné que lorsqu’un médecin libéral du territoire cessera son activité."
Il veut également mettre en place "de façon temporaire et transitoire une obligation d’effectuer la dernière année d’internat et les deux premières années d’exercice dans les territoires sous-denses." Pour y parvenir, Yannick Jadot veut accompagner "l’installation des médecins et de leur famille."
Le candidat écologiste souhaite doubler "les capacités d’accueil des universités de médecine sur le quinquennat." et favoriser "de nouvelles modalités d’exercice, sous une forme salariée dans les maisons de santé, prise en charge par l’hôpital du territoire."
Marine le Pen
Dans son programme, on peut lire : "Agir contre les déserts médicaux grâce à des incitations financières fortes pour les soignants et augmenter le nombre de maisons de santé."
La candidate du Rassemblement National propose des incitations financières pour les médecins qui exercent en zone sous dense.
Marine Le Pen mise aussi sur le développement de la télémédecine, l'augmentation des maisons et centres de santé, ainsi que sur l'ouverture "de places suffisantes dans les facultés de médecine pour disposer des médecins dont les Français ont besoin".
Jean-Luc Mélenchon
Dans son programme on peut lire : "Créer des réseaux de centres de santé pluridisciplinaires publics en lien avec les hôpitaux publics pour combler les déserts médicaux."
Concrètement, le candidat de la France insoumise propose de "mailler le territoire de centres de santé pluri-professionnels", de "créer des postes salariés d’infirmier·e de pratique avancée dans les centres de santé locaux en lien avec les médecins vacataires", ou encore d’ "Engager un plan de formation massif des professionnel·les de santé." et d’"augmenter les moyens alloués aux facultés de médecine et réformer la formation pratique pour rendre effectif la fin du numerus clausus."
Plus largement, Jean-Luc Mélenchon veut "opérer la refonte des instances territoriales chargées de traiter des politiques de santé avec la création d’unités territoriales de santé (UTS) et d’union départementales de santé (UDS) qui se substitueront aux Agences régionales de santé (ARS)."
Valérie Pécresse
Dans son programme, on peut lire : "Un programme « Zéro Désert » : moins de délais, moins de trajet"
Dans le détail, Valérie Pécresse veut créer une 4ème année de formation dans un désert médical. Elle souhaite offrir à chaque Français "une réponse en matière de santé à moins de 30 minutes de son domicile (consultation, prise en charge hospitalière, service d’urgence)."
La candidate des Républicains veut aussi "Doubler le nombre de médecins formés d’ici 5 ans pour porter à 20 000 d’ici la fin du quinquennat le nombre d’étudiants admis chaque année en 2ème année."
Valérie Pécresse souhaite lancer "dans chaque région, à l’initiative des présidents de régions et de départements, une alliance de tous les professionnels de santé, pour que sur chaque territoire les professionnels de santé établissent eux-mêmes leur plan d’action pour réduire concrètement les délais d’attente, assurer les permanences de soins et faciliter l’accès aux soins des plus fragiles."
Valérie Pécresse veut enfin demander à l’Assurance-maladie de prévoir, par région, une dotation "lutte contre la désertification sanitaire" pour ajuster la rémunération des professionnels de santé en fonction de leur activité dans les zones sous tension.
Eric Zemmour
Dans son programme, on peut lire : "Je mettrai fin aux déserts médicaux"
Le candidat d’extrême droite veut recruter 1000 médecins salariés par l’Etat sur 5 ans pour soigner dans les déserts médicaux. Mais il ne dit pas où il va trouver ces médecins.
Il veut créer des services hospitaliers de proximité (avec "maternité, chimiothérapie, dépistage et chirurgie dentaire"), et rétablir un système de garde obligatoire pour les médecins.
Emmanuel Macron
Dans son programme, on peut lire : "Le chantier pour l’accès aux soins et contre les déserts médicaux"
Le président de la République et candidat souhaite lancer "une conférence des parties prenantes (patients, professionnels et élus locaux) pour construire les solutions locales et nationales autour d’un objectif : assurer l’accès aux soins pour tous."
Plusieurs dispositifs sont proposés dans la continuité de la politique actuellement menée : assistants pour aider le médecin, possibilité pour les pharmaciens et infirmiers de réaliser davantage de prescriptions et d’actes de prévention.
Emmanuel Macron veut construire de nouveau leviers : "hôpital hors les murs (ex. médecins exerçant en ville mais salariés de l'hôpital), désengorgement des urgences par une participation plus large aux gardes, numéro unique pour un rendez-vous médical dans les 48 heures si besoin..."
Emmanuel Macron veut aussi développer de la téléconsultation, organiser des "permanences ponctuelles dans les territoires les moins dotés", et on note aussi une "régulation de l’installation".
Anne Hidalgo
Dans son programme, on peut lire : "La santé pour tous, la santé partout"
La candidate du parti socialiste veut accroître "les capacités d’accueil de nos facultés de médecine". Elle veut aussi, "à la place de la création d’une quatrième année d’internat prévue par le gouvernement sortant, une année de professionnalisation comme médecin-assistant dans les déserts médicaux".
Fabien Roussel
Dans son programme, on peut lire : "Des mesures urgentes seront prises pour rendre les soins accessibles à toutes et à tous"
Principale mesure contre les déserts médicaux du candidat communiste : "Les centres de santé seront massivement développés. Les quotas officiels ou officieux pour les formations initiales, médicales comme paramédicales, seront supprimés, des moyens supplémentaires étant donnés aux universités, avec des pré-recrutements ouvrant un pré-salaire aux jeunes pendant leur formation."
Nicolas Dupont-Aignan
Dans son programme, on peut lire : "Assurer une offre de soins de proximité à tous les Français et redresser l'hôpital public"
Nicolas Dupont-Aignan veut augmenter le nombre de places dans les études de médecine, créer une bourse pour les étudiants en médecine en échange de laquelle ils s’engageront à s’installer dans une zone sous-dotée pendant leurs 5 premières années, simplifier et dématérialiser l’ensemble des tâches administratives des médecins, favoriser l’implantation des maisons de santé, développer le système de camions mobiles de santé.
Nathalie Arthaud
La candidate de Lutte Ouvrière répond dans une lettre aux questions de "l'Association de citoyens contre les déserts médicaux" : "Pour les médecins comme pour les pharmaciens qui font des études et apprennent leur métier grâce à l’argent public dans des facultés et des hôpitaux, il faut réfléchir à un système permettant l’installation de médecins et de pharmaciens en fonction des besoins réels des populations et pas sur le simple critère du profit personnel en s’installant dans des départements favorisés, quitte à les aider pour leur installation."
Philippe Poutou
Dans son programme, on peut lire : "Création de centres de santé sur tout le territoire"
Le candidat du NPA les décrit comme "publics et gratuits, polyvalents, financés par la Sécu. Ils permettront de mener une politique de santé participative avec la population (contraception, prévention des maladies et des épidémies) en lien avec les médecins libéraux, la médecine du travail, la médecine scolaire et universitaire, les travailleurs·euses sociaux·ales, les élu·e·s, les associations, les syndicats."
Jean Lassalle
Dans son programme, on peut lire : "La santé pour tous"
Jean Lassalle veut augmenter le nombre de places dans les universités de médecine, revoir les critères de sélection au concours pour les rendre plus adaptés au métier de soignant, et financer les études pour ceux qui s’engagent pour une durée de 6 ans dans les territoires déficitaires.