Ce mardi 10 août marque le 40e anniversaire de la loi Lang qui a instauré un prix unique du livre. Si elle a permis la sauvegarde de nombreuses librairies indépendantes en les protégeant de la concurrence des grandes surfaces et des enseignes culturelles, elle reste "un combat de tous les jours".
"C’est ce qui a assuré notre survie". Alain Terpereau est formel. La loi Lang, promulguée il y a quarante ans jour pour jour, a sauvé de nombreuses librairies indépendantes. Libraire depuis le début des années 90, il se rappelle de l’arrivée des grandes chaînes de magasins sur le marché du livre. "La Fnac a débarqué et est devenue la référence. Elle avait la volonté agressive de faire disparaître tout le monde."
Pour en finir avec les prix cassés sur les livres neufs, le gouvernement fait alors passer une réforme d’ampleur. Adoptée le 10 août 1981, la loi Lang, du nom du ministre de la Culture de l’époque, Jack Lang, dispose que chaque livre neuf a un prix unique, quel que soit le lieu où il est vendu. Fixé par l'éditeur, le prix doit être imprimé sur la couverture du livre. Seule une réduction jusqu’à 5 % peut être appliquée par le vendeur.
Une loi encore trop méconnue
Quarante ans plus tard, la loi Lang reste fragile. D’après le Syndicat de la librairie française, la moitié seulement de la population connaît cette règle du prix unique, quelque soit le lieu de vente. Alain Terpereau le confirme. Nouveau directeur de la librairie des Halles à Niort (Deux-Sèvres), il constate que "les clients sont surpris quand on leur parle du prix de la loi unique. C’est pourtant un message que l’on martèle."
Même sentiment du côté d’Angoulême (Charente), dans la librairie indépendante Cosmopolite. "On a encore un gros travail d’information, même 40 ans après", estime Pascal Dulondel, gérant de la librairie. "C’est un combat de tous les jours."
Pourtant, "Jack Lang a changé la vie des libraires", poursuit Pascal Dulondel, qui a rencontré l’ancien ministre de la Culture il y a trois ans, lors de sa venue à Angoulême pour remettre la médaille des arts et de la culture à Marie-France Brière. "Je l’ai croisé, je l’ai salué…puis j’ai fait demi-tour pour lui dire tout le bien de ce que je pensais de lui et de sa réforme".
Sans cette loi, tout un pan de la librairie indépendante n’existerait plus à l’heure actuelle. Non seulement les choix éditoriaux en auraient pâti, mais c'est surtout le lecteur qui serait pénalisé.
Le combat des frais d’envoi
Aujourd’hui, les libraires indépendants font face un autre combat, surtout depuis la crise sanitaire : celui des frais d'envoi pour les commandes en ligne. Car Amazon, le numéro un du commerce en ligne de livres en France, propose systématiquement la livraison au prix minimum fixé par la loi d’un centime. Difficile pour les autres acteurs de s’aligner avec ce tarif.
Alors, depuis le confinement de novembre, le gouvernement propose aux libraires indépendants de prendre en charge les frais d’envoi. Un coup de pouce temporaire qui ne convient pas à Pascal Dulondel : "Cette histoire de frais de port avantage quand même les grands faiseurs du monde de l’Internet. Pourtant, la crise nous a poussés dans nos retranchements. Le monde de la librairie indépendante est prêt à se faire une place sur la vente en ligne."
La mise en place d'un prix plancher facturé au client pour les frais d'envoi de livres est en tout cas prévue par une proposition de loi.