D'après un document résumant les résultats d'une étude de l'agence régionale de santé menée sur les sols de l'Estuaire de l'Adour, à Anglet, Bayonne, Boucau et Tarnos entre 2012 et 2019, la teneur en plomb sur certains secteurs dépasserait les seuils de référence.
Le sol autour du port de Bayonne présente-t-il une teneur en plomb trop importante dans certains secteurs ?
C'est ce qu'indique un document de l'agence régionale de santé daté du 5 novembre dernier, intitulé "Estuaire de l'Adour - Questions réponses sur l'Etat des sols" et publié sur le site de la CPAM à destination des professionnels de santé.
Ce rapport de huit pages résume les résultats d'une étude menée entre 2012 et 2019 dans l'Estuaire de l'Adour, sur le territoire de quatre communes, que sont Anglet, Bayonne, Boucau et Tarnos.
Selon ce document, après avoir réduit le secteur étudié à deux zones, l'une à Bayonne et l'autre à Anglet, "trois campagnes de prélèvements ont eu lieu en 2016, 2018 et 2019, sur l’air, l’eau, les sols et les végétaux auto-produits."
Carte : les deux zones sur lesquelles les prélèvements ont été effectués.
Plomb, arsenic, et manganèse...
Sans préciser les taux exacts, le document rédigé par l'ARS indique que, concernant le plomb, "certains prélèvements des sols extérieurs dépassent les valeurs de référence".
L'ARS poursuit en indiquant : "Ceux-ci nécessitent de mettre en place des mesures de vigilance. Pour cela, les riverains doivent être informés des conduites à tenir pour limiter l’exposition éventuelle à ce polluant. Et les professionnels de santé avertis de la prise en charge des patients de ces secteurs, en cas de symptômes suspects."
Le plomb n'est pas le seul élément potentiellement dangereux à avoir été détecté lors de cette étude. En effet, de l'arsenic a également été retrouvé "avec une concentration supérieure aux valeurs de référence" sur deux échantillons.
Mais contrairement au plomb, l'ARS note qu'"après analyse de ces résultats, ces échantillons ne sont à priori pas représentatifs des sols environnants. La situation vis-à-vis de ce polluant ne présenterait pas de risque pour la santé et ne nécessite pas de recommandations particulières."
L'ARS indique aussi que du manganèse a été détecté, mais "aucun seuil de référence n’est établi pour cet élément. En l’absence de seuil, il est difficile de se prononcer sur les effets d’une telle exposition, a priori négligeable. Les seules expositions importantes, voire massives, ont lieu en milieu professionnel et sur le long terme."
Quels risques pour la santé ?
Selon le document rédigé par l'ARS, cette présence du plomb dans le sol n'est pas alarmante : "du fait, de la présence très hétérogène du plomb dans les prélèvements, et même si parfois les mesures sont au-dessus des valeurs de référence, le risque pour la santé des riverains de l’Estuaire de l’Adour reste limité".
L'agence régionale de santé note aussi qu'il n'y a pas plus de cas de saturnisme (maladie provoquée par une surexposition au plomb) dans le secteur que dans la population générale.
Elle tempère toutefois : "il ne peut pas être conclu à l’absence totale d’impact sur l’état de santé des habitants des secteurs A et B. C’est pour cela que les autorités vont mener différentes actions, notamment une information des professionnels de santé (Anglet, Bayonne, Boucau et Tarnos) pour les informer et recommander un dépistage s’il le juge nécessaire."
L'ARS émet également une liste de recommandations pour éviter d'être exposé aux polluants, parmi lesquelles surveiller que les enfants n'ingèrent pas de la terre ou de la poussière, se laver les mains fréquemment en gardant les ongles courts, ou encore arroser les jardins potagers avec de l'eau potable.
Militants et riverains s'alarment et s'impatientent
Après la publication de ce document, les militants de plusieurs associations environnementales et les riverains s'alarment et s'impatientent. D'autant plus que ce rapport de huit pages a été publié puis retiré du site de la CPAM, car il n'aurait dû être diffusé qu'à l'attention des professionnels. Il reste néanmoins accessible grâce à un lien direct ici.
Un "cafouillage" de communication dénoncé par des militants associatifs, qui réclament la publication des données de l'étude depuis qu'elle est terminée, c'est-à-dire en 2019.
"On a déjà participé à cette étude de zone en émettant nos réserves pendant tout le déroulement de l'étude. Depuis qu'elle est officiellement terminée en 2019, on réclame que les résultats soient publiés pour qu'on puisse s'en emparer et réclamer les actions qui doivent en découler" déplore Bernard Dulau, vice-président de l'association des amis du littoral Anglet (ADALA).
De leur côté, les responsables du port de Bayonne assurent qu'il n'y pas eu de volonté de dissimulation.
"On a retrouvé des pollutions historiques [...] ce sont des pollutions éparses, c'est-à-dire des matériaux qui ont été déplacés. Probablement lors de construction de maisons, on a pris des gravats sur les terrains portuaires, et c'est pour cela qu'on a une pollution qui est disséminée" précise Mathieu Bergé, président du port de Bayonne et conseiller régional PS.
D'après le document publié par l'ARS, un plan de communication des résultats de l'étude était déjà prévu prochainement, avec notamment l'organisation d'une conférence de presse par la préfecture des Pyrénées-Atlantiques "début 2022".
→ le reportage de René Garat et Emmanuel Galerne :